Keskastel, l'orgue Verschneider.Cet orgue a été construit de 1859 à 1861 par Georges et Nicolas Verschneider, de la célèbre dynastie de facteurs de Puttelange et Rémering. Il a été payé par cotisations volontaires, et a juste fait l'objet d'une subvention de la commune. Verschneider fit un bien joli dessin du buffet pour le faire approuver par l'architecte Furst. Mais, une première fois modifié en 1933, ce bel orgue Verschneider a été une des victimes de la "période noire" de la facture alsacienne : il a été épouvantablement "baroquisé" en 1970, c'est-à-dire muni de petits jeux criards, à la mode dans les années 1960 - bien sûr totalement étrangers à son esthétique. Il a donc perdu toute authenticité. Le bilan est très lourd : 10 jeux d'origine sur 21 ont été perdus !
Historique
L'édifice date de 1841. C'est le 26/10/1861 que fut reçu l'orgue Georges et Nicolas Verschneider. Il était censé avoir 18 jeux (deux claviers) à l'origine, mais 20 ou 21 est plus probable. [IHOA] [HOIE]
Le traité date du 04/01/1858, et l'orgue livré pour Keskastel devait être le même que celui pour Phaffans (Fontaine) en Franche-Comté. (Achevé en 1858, II/P 20j.) [HOIE]
Malheureusement, l'orgue de Phaffans, longtemps resté très authentique, a lui aussi été épouvantablement transformé en 1974. Palissy affirme d'ailleurs : "La composition a été dénaturée lors d'une restauration en 1966-1974." Mais à un jeu près, on connaît sa composition d'origine, qui est donc a priori celle de l'orgue de Keskastel à sa livraison : [Palissy]
L'instrument de Keskastel nécessita une réparation dès 1887. [HOIE] [ITOA]
Une autre en 1898. [HOIE] [ITOA]
Et encore une en 1902. [HOIE] [ITOA]
Les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités le 13/06/1917. [HOIE]
En 1933, om a été transformé par Henri Vondrasek, pour lui donner un côté néo-classique. Les changements de composition semblent toutefois avoir été limités : une Fourniture pour le positif, devenant un récit expressif, une Tierce pour le grand-orgue (en remplacement du Clairon sûrement rarement utilisé), une Voix céleste (de façon surprenante au grand-orgue). La Trompette de pédale a été supprimée, mais cette pédale a été portée de 18 à 30 notes, ce qui la rendait donc utilisable. Malheureusement, l'instrument perdit sa Gambe 4' du second clavier au profit d'un Principal. [IHOA] [HOIE] [ITOA]
Voici la composition en 1933 :
Deux articles du "Nouvel alsacien" relatent l'inauguration, qui fut très festive : le premier (daté du 12/04) est une invitation à destination de tous les amis de la musique, pour le lundi de Pâques. Le second, daté du 18/04, est un compte-rendu de la fête. L'opération est bien décrite comme une reconstruction ("Umbau"), par Henri Vondrasek, de Sarre-Union. L'orgue était censé avoir 17 jeux ("Klingende Register") : apparemment, les 3 jeux de pédale ont été oubliés. Les "Aliquotstimmen" (Mutations) sont signalées, la Tierce 1'3/5 au grand-orgue et une Fourniture de récit étaient remarquables à l'époque. [NAlsacien]
La chorale prit bien sûr part au concert, avec H. Wernert aux claviers. Il y eut un Te Deum, le Psaume 150, et l'assemblée - forte de plus d'une centaine de voix - chanta, bien sûr, le "Grosser Gott" final. [NAlsacien]
L'instrument avait bien entendu été doté d'une console indépendante, et d'une transmission pneumatique. La console indépendante est d'ailleurs certainement ce qui a motivé le projet, car H. Wernert semble, d'après l'article, avoir été à la fois organiste et chef de chœur, et une console indépendante est alors quasi indispensable. De toutes façons, quel organiste se plaît vraiment à jouer avec la tête plongée dans une armoire ?
En 1958, il y eut une réparation par Curt Schwenkedel [HOIE] [ITOA]
Le désastre de 1970
En 1970, l'orgue a été mécanisé par Willy Meurer, et fortement transformé dans le sens "néo-baroque". [IHOA] [ITOA]
Certaines sources appellent-ça une "réparation"... [HOIE]
En fait, il s'agit presque d'une caricature de ce qui se passait à l'époque : destruction de la structure sonore par suppression des (coûteux) jeux de 8', et remplacement par des "petits jeux" (bon marché). Ici, l'instrument a été affublé de la symptomatique Sesquialtera, stigmate des fantasmes de "l'orgue nordique" alors à la mode. Pourtant, ça n'en a clairement pas fait un Schnitger... Et puis, pour percer les tympans, non pas une, mais deux Cymbales ! (Sûrement un expert qui s'y connaissait en cymbales a déclaré qu'il en faut deux : une pour taper sur l'autre.) De même, il y a deux Doublettes... Peut-être une promotion du genre "Un jeu acheté, le deuxième gratuit" ?
Le Cromorne n'a également rien à voir avec l'esthétique d'origine, mais dans les années 1960-70, la définition d'un orgue était : "un instrument de musique, sur lequel on joue Couperin". La pédale avec des petits jeux est également symptomatique de l'époque. Son 2' et sa Fourniture relèvent du grand n'importe quoi : ils sont totalement inutiles, vu qu'il y a les deux tirasses... De plus, ils paraissent avoir été réalisés avec des tuyaux Verschneider... qui ont donc dû être totalement ré-harmonisés. Cela compliquera encore plus la tâche de ceux qui, peut-être, un jour, voudront remettre de l'ordre dans ce malheureux instrument.
Le buffet
Le dessin de Verschneider pour Keskastel.Le buffet est probablement ce qui reste de plus authentique dans cet instrument. On y retrouve, au-dessus des culots des tourelles, un cylindre au niveau de la ceinture du buffet, qui est caractéristique des buffets Verschneider. Les jouées sont finement sculptées et ajourées. Il y a des claires-voies, mais pas de rinceaux. (Pourtant, ils étaient prévus sur le dessin.)
Ce buffet Verschneider fait partie d'une série de trois : Phaffans (90), Notre-Dame-de-l’Assomption (1858) (où il y a des rinceaux et presque les mêmes jouées qu'à Keskastel), Châtenois-les-Forges (90), St-Etienne (1859) (où il y a des rinceaux), et Keskastel (1861).
Caractéristiques instrumentales
Console en fenêtre de 1970.
Sources et bibliographie :
Photo du 27/07/2006.
Die kath. Ki. 1840; - letztere 1840 (Liste) ohne O. - Nach MATHIAS 48 : O. von 1850, mit 18 Reg., 2 Clav.,Ped., sommier, tract. souffl. mec. - Für die Orgeln beider Ki. wurden zw. 1850 u. 1860 verausgabt: 4.291 Fr. Vfr. 9 (1866) 303.
PM90000374 pour Phaffans, église Notre-Dame de l'Assomption
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