En 1913, Zimmerbach reçut un orgue de Martin et Joseph Rinckenbach, l'opus 136 de la grande maison d'Ammerschwihr. Il est représentatif de l'esthétique post-symphonique alsacienne, et peut être considéré comme authentique, grâce à des travaux menés en 2006 par Hubert Brayé.
Historique
La présence d'un premier orgue est attestée à Zimmerbach par l'enquête-inventaire de 1840. On ne sait pas grand chose sur cet instrument, dont on ignore la provenance, si ce n'est qu'il a été démonté puis remonté dans l'église neuve (1878), et qu'il était encore là en 1911. [IHOA] [Barth]
Historique
En 1913, Zimmerbach reçut l'opus 136 de Martin et Joseph Rinckenbach. L'instrument avait été très désiré par la population, puisqu'il a été payé par cotisations volontaires. Le devis Rinckenbach date du 20/10/1900, et on ne sait pas pourquoi l'orgue n'arriva que 13 ans plus tard. [IHOA] [Barth]
La composition, à 13 jeux, est la même que l'actuelle. Elle est caractéristique de l'esthétique post-symphonique alsacienne. On note l'absence de Flûte ouverte du grand-orgue : la Flûte de Concert, toute en bois, est au récit. Il n'y a pas non plus de Flûte 8' de pédale : le Violoncelle, décidément, y est un jeu absolument prioritaire, et une pédale limitée à deux jeux est donc forcément constituée d'une Soubasse et du Violoncelle. Au récit, il y a la fameuse Trompette "solo", qui est la seule anche de la composition. Elle sert à la fois de Trompette et de Hautbois. On devine que c'est ce jeu - fort coûteux - qu a motivé les autres concessions ! Mais la disposition intelligente des jeux a permis de limiter ces dernières, et cette composition constitue un modèle du genre pour 13 jeux.
C'est en 1968 que l'orgue perdit deux jeux importants (Mixture et... Trompette solo, cela ne s'invente pas !) au profit d'une absurde Doublette 2' et d'un inutile Nasard. Les travaux avaient été confiés à Alfred Kern. [IHOA] [Zimmerbach2004]
Voici la composition relevée par l'inventaire historique des orgues d'Alsace (complétée par des informations collectées sur place, car, comme il s'agit d'un orgue romantique, il a été "expédié" : le nombre d'accouplement est donné (4), mais pas leur nature... idem pour les combinaisons libres).
Evidemment, sans la Trompette du récit, l'ensemble n'avait plus aucun sens...
L'instrument a été restauré dans sa configuration initiale de 1913 en 2006, par Hubert Brayé, sous la maîtrise d'œuvre de Jean-Christophe Tosi. [Zimmerbach2004] [YMerlin] [Visite]
Cette opération fut exemplaire : non seulement les deux jeux supprimés en 1968 ont été restitués, mais c'est une "vraie" Trompette de Joseph Rinckenbach, en Spotted, qui a pris place dans l'instrument. Si l'on ne connaît pas son histoire, impossible de se douter qu'elle n'est pas d'origine ! La Mixture aussi a été restituée : elle est sans reprise, le rang de 1'1/3 est neuf.
On peut toutefois se demander, vu que ce second rang de quinte 1'1/3 dépasse le "plafond" des Mixtures des Rinckenbach, si ce n'était pas plutôt une Tierce (1'3/5) à l'origine. Evidemmemnt, rien qu'avec les faux-sommiers, ce n'est pas facile à établir. Mais, à l'écoute, ce rang 1'1/3 (sans reprise !) ne paraît pas du tout conforme aux habitudes de la maison d'Ammerschwihr.
Le buffet
Le buffet, néo-gothique, a été construit par la maison Boehm, de Mulhouse. La façade est d'origine. Le dessin est une évolution d'un plan cher à la maison Rinckenbach : 3 plates faces séparées par des plates-faces doubles. Les lignes de bouches sont en "V" dans les tourelles, et horizontales dans les plates-faces. Ici, l'ensemble est inscrit dans un rectangle, avec des couronnements constitués d'une galerie ajourée et de pinacles.
Caractéristiques instrumentales
Console indépendante face à la nef, fermée par un rideau coulissant. Tirants de jeux de section ronde avec porcelaines frontales, disposés en une seule ligne au-dessus du second clavier. Les porcelaines sont à fond blanc pour le grand-orgue, rose pour le récit, et bleu pour la pédale. Les tirants de la pédale sont à gauche, puis viennent ceux du récit, et le grand-orgue est à droite. Claviers blancs.
Commande des accouplements et tirasses par taquets (manuels) à accrocher (en "L", comme les pédales habituelles, mais en plus petit), en fer forgé, placées sous le premier clavier, à gauche, et repérées par des porcelaines rondes disposées au-dessous : "Sub octav koppel II a I." (II/I 16'), "II a P." (II/P), "I a P." (I/P), "II a I" (II/I). Ces porcelaines sont bicolores, et respectent le code de couleur, "II a P." étant par exemple rose en haut et bleue en bas.
Commande des combinaisons fixes par 5 pistons blancs, situés sous le premier clavier, du côté droit, et repérés par de petites porcelaines rondes placées en dessous : "P.", "MF.", "F.", "Tutti", et "0." pour l'annulateur.
La pédale basculante commandant l'expresison du récit, placée au-desuus du "fis" du pédalier, constitue la seule commande à pied.
Plaque d'adresse en position centrale, au-dessus du second clavier, à l'horizontale, constituée de lettres en laiton incrustées sur fond foncé, et disant :
Pneumatique tubulaire, notes et jeux.
A membranes, de Rinckenbach. Les sommiers du grand-orgue sont diatoniques, en "M" (basses aux extrémités), et disposés de façon conventionnelle derrière la façade. Récit également diatonique, mais disposé orthogonalement à la façade, avec les basses au fond, dans une niche du clocher.
Deux sommiers diatoniques pour la pédale dans soubassement, de chaque côté, orthogonaux à la façade, avec les basses au fond.
C'est vraiment un instrument enthousiasmant : grâce à au succès de l'opération de 2006, on dispose à nouveau d'un orgue de la Belle époque dans une configuration totalement d'origine. Et il est impressionnant de constater tout ce que l'ont peut faire avec 13 jeux "seulement".
La Montre 8' est magnifique. Elle est en zinc pour sa partie en façade. Cela démontre une fois de plus qu'il vaux mieux commencer par écouter un jeu plutôt que de le juger sur le matériaux employé... Quand on pense qu'en moyenne-Alsace, en 1998, une belle façade de Joseph Rinckenbach a été remplacée par des tuyaux en étain quelconques... juste parce qu'elle était en zinc ! (Pour un résultat tout fait décevant, et un coût conséquent.)
On peut aller à Zimmerbach, rien que pour entendre à quel point le zinc peut bien sonner : c'est après tout comme ça que progresse la connaissance, pas en répétant ce qu'on a lu dans les vieilles revues ! En plus, cet instrument prouve de façon éclatante que le "baroquisations" des années 60-70 ne sont pas une fatalité : elles sont réversibles pour peu que l'on s'adresse à des gens compétents. Mais il faut surtout y aller pour apprécier ce magnifique petit instrument, qui décidément, est un orgue qui fait aimer les orgues.
Sources et bibliographie :
Remerciements à Mr Hess.
Photos du 11/07/2020 et données techniques.
Photos du 11/07/2020.
L'inventaire, lapidaire, passe sous silence la transformation des années 60, et ne relève rien sur la Doublette et le "Nasard". Il y a un problème de date, puisque le 20/10/1900 est indiqué comme la date de l'inauguration.
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