François Callinet posa ce petit instrument à Munwiller entre 1815 et 1820. (Dans les années suivant les troubles révolutionnaires les archives n'étaient pas toujours irréprochables, et on le comprend...) Son fils cadet Claude-Ignace y fit probablement des travaux d'une importance considérable : une quasi reconstruction. Malgré les zones d'ombre, cet orgue présente un grand intérêt historique, même si ses possibilités musicales restent très limitées.
Historique
C'est vers 1820 que François Callinet construisit un petit orgue pour Munwiller. [IHOA]
Si l'orgue a été construit après le 21/05/1820, date de la mort de François Callinet, ce serait sûrement le premier orgue de Joseph, son fils aîné.
Voici la probable composition d'origine :
L'analyse de la facture a montré que vers 1868, Claude-Ignace Callinet a pratiquement reconstruit l'instrument. Il est toutefois établi qu'il a conservé les anciens sommiers. [ITOA]
Ce n'est pas la première fois que l'historique factuel des instruments laisse émettre de sérieux doutes sur la qualité de la facture de François Callinet. C'était jusqu'ici un tabou, car malheureusement, leur histoire a été écrite sur le mode de l'hagiographie, de façon totalement partisane : l'ouvrage sur les Callinet de Rouffach de Pie Meyer-Siat décrète qu'ils sont des génies absolus, alors que, au moins dans les années qui suivirent la Révolution, ils ne se démarquaient pas beaucoup de la facture d'orgues française, qui était objectivement "à la ramasse". Si Joseph a su remonter la pente et assurer au moins une bonne qualité de ses instruments, c'est au prix d'un coté rustique et d'un conservatisme forcené, consistant à capitaliser sur quelques compétences sauvegardées, et en ne tentant surtout rien en dehors de sa "zone de confort". Claude-Ignace Ignace, lui, plus ouvert sur le monde, essaya de faire évoluer sa facture, mais du temps de son association avec son frère, il fut totalement bridé, ce qui conduisit inévitablement au clash. Quand enfin Claude-Ignace obtint sa liberté, c'était... bien trop tard. La facture de Rouffach faisait pâle figure face au reste de la production européenne, et cela commençait à se voir même localement. L'ère du "Pour faire construire un orgue, on s'adresse au facteur desservant sa zone géographique, et on ne se pose pas de question" était définitivement révolue.
Reste que l'authenticité de l'orgue de Munwiller n'est pas du tout avérée, et sa provenance pas claire. Outre les dates précédées de "vers", on ne sait même pas bien s'il s'agit d'un orgue des années 1820 ou 1860. Or, il y a 40 ans d'écart ! Le fait même qu'il y ait doute est tout à fait révélateur de la torpeur qui avait atteint la facture alsacienne entre 1820 et 1860. Mais on ne doit absolument pas penser que cet instrument est un témoin de la facture de François Callinet.
Et vers 1900, l'orgue a de nouveau eu besoin d'une réparation, menée par Joseph Antoine Berger. [ITOA]
C'est peut-être lui qui posa un Salicional et une Voix céleste. Le Salicional occupe la chape (coupée en basse + dessus) du Clairon.
Ce qui était une excellente idée, car une Voix céleste et son Salicional sont assurément bien plus utiles sur un orgue de cette taille qu'un tonitruant Clairon, qui ne peut servir que pour de pompeuses fanfares.
Les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités le 01/04/1917. [IHOA]
En 1929, Edmond-Alexandre Roethinger remplaça les tuyaux de façade. [IHOA] [Mathias] [Barth]
En 1971, l'instrument a été réparé par Pierre Huguin [ITOA]
L'inventaire technique de 1986 affirme même : "1971 : l'orgue est "bricolé" par Huguin (Vosges)"
En 1994, il y eut un relevage, mené par Richard Dott. [IHOA]
Le buffet
Le buffet, typique de l'esthétique de François Callinet, est constitué de trois tourelles, la petite au milieu, et deux plates-faces remontantes qui présentent déjà l'arrondi suivi de la petite droite horizontale caractéristique des Callinet. Les frises de marguerites qui forment les claires-voies font référence à Marguerite Rabiny, épouse de François Callinet). Les culots des tourelles sont ornés de feuilles d'acanthe. Ils ne portent pas encore les célèbres angelots (ceux-ci n'apparaissent qu'en 1834 - les angelots actuels en couronnement n'étant évidemment pas d'origine - ils ont probablement été récupérés sur un maître-autel).
Caractéristiques de son époque, et marquants pour la suite de l'évolution esthétique des buffets d'orgue au 19ème, sont :
- les largeurs égales du soubassement et de la superstructure (l'orgue classique présente un soubassement toujours plus étroit).
- Le fait de remplir l'espace en haut des plates-faces entre les tourelles latérales. On a déjà vu cette tendance sur les derniers orgues de Jean-André Silbermann (Gries, 1781).
Caractéristiques instrumentales
Console en fenêtre frontale. Tirants de jeux de section carrée à pommeaux tournés repérés par des étiquettes en papier, et disposés en deux fois deux colonnes de part et d'autre du clavier. Clavier blanc. (Donc à coup sûr pas d'avant 1840.) Ce clavier a 54 notes, alors qu'il n'y en a que 51 aux sommiers.
Mécanique suspendue.
Deux sommiers à gravures de François Callinet. Soupapes supplémentaire pour la tirasse.
Sources et bibliographie :
Photos du 26/10/2020.
Photos du 25/08/2011.
71. Munwiller Callinet, rest. p. Berger, rép. Roethinger 1929, 14 Jeux, 2 Clav, Péd., sommier à soufflets, traction Barker, soufflerie électr.
MUNWEILER, Kt. Ensisheim. - O. von Joseph Callinet, kurz nach 1820. MEYER-SIAT 114. - Rep. von Berger, rep. von Roethinger 1929, 14 Reg., 2 Clav., Ped. MATHIAS 60. - Abb. des Gehäuses in : MEYER-SIAT pl. 26.
im68001895
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