Siewiller possède deux églises : l'historique (actuelle église protestante) est située près de la source de Sainte-Dorothée, qui a longtemps été un lieu de pèlerinage. L'église catholique est la plus récente (1849). Depuis 1961, elle est dotée d'un clocher / campanile indépendant. L'histoire des orgues est particulièrement enthousiasmante. Elle commence en 1868.
Historique
En 1868 fut posé à Siewiller un orgue dont la provenance reste mystérieuse. [IHOA]
La construction de l'édifice avait mobilisé de nombreuses bonnes volontés pour fournir les matériaux et la main d'oeuvre. On "fit des miracles" pour y arriver : il en fallait, car c'est une communauté de 320 personnes qui a mené cet ouvrage à bien. Dans ce contexte, on comprend qu'un orgue neuf était hors de portée, et là aussi, on fit preuve d'imagination pour se procurer un instrument d'occasion. Bien sûr, les traces laissées dans les archives sont, du coup, plutôt maigres. On sait juste que l'instrument fut acheté d'occasion, par la paroisse, en 1868, mais pas d'où il venait. [Caecilia]
En décembre 1917, les tuyaux de façade de l'instrument furent réquisitionnés par les autorités. [IHOA]
En 1928, les frères Mürkens reconstruisirent l'instrument. [IHOA]
Ce sont donc les malchanceux frères Mürkens qui reconstruisirent l'orgue de Siewiller en 1928, soit 1 an avant l'évènement qui causa leur perte. C'était leur 8ème orgue. Le buffet de l'orgue précédent fut réutilisé, ainsi que pas mal de tuyaux anciens. L'orgue était évidemment à transmission pneumatique, muni de sommiers à cônes et d'une console indépendante.
Les tuyaux du 18ème peuvent avoir différentes provenances. Rien qu'en considérant le périmètre alsacien des activités de la maison Verschneider, celle-ci avait disposé d'un orgue de Martin Bergäntzel en 1863 à Sigolsheim, d'un Nicolas Boulay la même année à Hombourg, d'un Jean-Pierre Toussaint en 1865 à Boersch, et d'un Weinbert Bussy en 1866 à Traubach-le-Haut...
En 1933, Georges Schwenkedel répara l'instrument. Il revint l'entretenir en 1947 et 1952. [IHOA]
Mais lors de l'inventaire de 1986, l'orgue était injouable car la console avait été démontée pour laisser la place à un machin électronique. La console avait été conservée, et la fonction "Annulateur anches" (sur un orgue dépourvu d'anches) avait motivé le commentaire "on peut toujours rêver...". Quelque part, on peut dire que c'était la seule chose qui marchait.
Ce fut la période noire. Le choix de l'électronique ayant été fait, il apporta comme partout ailleurs son lot de frustration et de dégradations. En 2006, l'orgue, inutilisé depuis les années 80, était dans un état épouvantable. Tout espoir semblait vain. Il est vrai qu'en de nombreux autres endroits, la "catastrophe électronique" est irréversible.
Mais à Siewiller, on avait déjà prouvé qu'on savait faire des miracles. Il y en eut un nouveau !
Historique
En 2009, Yves Koenig reconstruisit l'instrument. Les travaux ont été effectués sous la maîtrise d'oeuvre de Marc Baumann. L'orgue a été reçu le 19/09/2009. [MBaumann]
Le projet d'orgue neuf fut élaboré de façon à intégrer les éléments existants, et donc à perpétuer une tradition locale qui remonte quand même à 1868. Si le premier instrument n'avait probablement qu'un seul manuel, celui des frères Mürkens en avait deux. L'orgue neuf devait bénéficier lui aussi de la souplesse que permettent les instruments - même petits - à deux manuels. On décida évidemment de conserver l'élégant buffet, mais de le rendre un peu plus profond pour lui permettre d'abriter les deux claviers. Pour l'esthétique sonore, en parfait accord avec ce buffet, il fut décidé de construire une partie instrumentale d'esthétique alsacienne du milieu du 19ème, tels qu'ils étaient conçus par Joseph Stiehr ou Martin Wetzel (il y en a un à l'église protestante). Cela avait aussi l'avantage - outre celui d'être adapté à son environnement culturel - de pouvoir harmonieusement mettre en valeur le matériel ancien. La console devait alors retrouver sa disposition originelle (frontale), la plus adaptée à un tel orgue, où l'organiste s'exprime bien mieux avec une mécanique suspendue directe.
Les sommiers, la transmission et la console sont neufs. Pour la tuyauterie, les éléments anciens ont été conservés, et complétés par des éléments neufs. Le soufflet aussi a pu être restauré. [MBaumann]
Le buffet
Le buffet, en sapin, provient donc de l'orgue de provenance inconnue, placé à Siewiller en 1868. Contrairement à ce qu'on avait longtemps pensé, il n'a pas été construit par la maison Stiehr. Pie Meyer-Siat avait fait le rapprochement avec le buffet d'Eckbolsheim (posé par Michel Stiehr à Mutzig en 1815). Mais l'étude du buffet, et le fait qu'il ne soit pas en chêne, a écarté cette hypothèse. Malgré la présence de tuyaux Verschneider dans l'instrument, il ne semble pas non plus être issu des ateliers de Puttelange ou Rémering. Ce qui est probable, c'est que la maison Verschneider a récupéré le buffet lors d'un des nombreux renouvellements qui avaient lieu à l'époque. Il pourrait par exemple s'agir du buffet de l'ancien orgue de Flaxlanden (repris par Verschneider en 1863). Mais ce pourrait aussi être tout simplement un buffet de Wegmann, qu'il aurait réalisé en "imitation" du style Stiehr. Trop d'hypothèses peuvent être formulées. L'origine du buffet reste donc pour le moment un mystère. Avant la reconstruction, le buffet (très peu profond) était prolongé par un enclos en lambris.
Une fois restructuré et décapé, le buffet est à nouveau conforme aux pratiques de la facture d'orgues de la première moitié du 19ème. La disposition générale, la présence de tourelles plates, ainsi que celle des ornements sculptés (claires-voies, rinceaux très développés et ajourés, jouées) sont fortement apparentées au style Stiehr.
Caractéristiques instrumentales
Console frontale neuve (2010), claviers saillants. Tirants de jeux de section carrée à pommeaux tournés noirs, placés en colonnes de part et d'autre des claviers. Claviers noirs. Banc restauré.
Tempérament égal. Diapason moderne : La 440 Hz.
Les frères Mürkens
En février 1929, deux individus pénétrèrent par effraction dans le presbytère de Hochwald, en Moselle. L'affaire tourna fort mal lorsque les cambrioleurs furent surpris : ils tuèrent le beau-frère du Curé, et assommèrent ce dernier d'un coup de matraque. Durant l'enquête, le Curé agressé désigna comme suspect un facteur d'orgue auquel il avait, quelques mois auparavant, refusé un devis au profit de Frédéric Haerpfer. Ce facteur, nommé Joseph Mürkens, s'était établit avec son frère Guillaume à Montigny-lès-Metz dans les années 1925. Bien qu'innocentés par la Justice (car dotés d'un alibi solide), les frères Mürkens furent victimes des mauvaises langues ; essentiellement germanophones et installés depuis 4 ans seulement, le clergé leur refusa ensuite toute affaire : ils firent faillite et disparurent en 1930.
Pour retrouver trace de la facture des Mürkens, qui avaient probablement été formés par Klais à Bonn (D), inutile d'aller à Plappeville (57) : comme pour leur orgue contemporain de Siewiller (1928), il ne reste rien. On ne retrouve rien, non plus, à Eincheville (57), où leur orgue neuf (encore 1928) fut totalement détruit en 1949. Celui qu'ils posèrent à Pagny-sur-Moselle (54) (toujours en 1928) était un instrument d'occasion. Siewiller fut leur opus 8, tandis que leur opus 9 est la reconstruction en pneumatique de l'orgue Martin Wetzel de Langatte (57). Au moment de leur faillite, les frères Mürkens avaient probablement en atelier l'orgue de Guessling-Hémering (57) et celui de Notre-Dame de Folschwiller (57). [IOLMO]
Webographie :
Activités culturelles :
Sources et bibliographie :
Données historiques et techniques, photos de 2010.
Avec les photos de 2006.
(Mais il est à présent établi que l'orgue de 1868 n'était pas un Stiehr.)
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