Ce petit orgue de Jean-Frédéric Verschneider est resté remarquablement authentique, puisqu'il n'a pas été modifié de façon significative depuis sa réception, qui date du 23/07/1885. Il nous rappelle la contribution fondamentale des manufactures de Rémering et Puttelange à l'orgue alsacien.
Historique
En 1856, François Antoine Berger installa à Bruebach un orgue François Ignace Hérisé provenant d'Aspach-le-Bas, St-Pierre. [IHOA]
C'est le maire Erhart de Bruebach (en son nom) qui avait acheté l'instrument ; il faisait partie de la succession de Hérisé. Les habitants de Bruebach se cotisèrent pour le lui racheter et payer le déménagement. Pour régulariser cette situation atypique et valider les prestations de Berger, on procéda à une réception officielle, le 25/01/1857, par Mathieu Ruesterholz (Aspach-le-Bas) et Gervais Biringer (Bruebach). [PMSRHW]
Notons que ce n'était pas vraiment un orgue d'occasion : il n'avait jamais servi, et était simplement entreposé à l'église d'Aspach-le-Bas. [PMSRHW]
En raison de son acquisition et son payement final par cotisations volontaires, l'instrument présentait la particularité de n'être la propriété ni de la paroisse, ni de la commune ! Ce qui ne manqua pas de poser problème, quand, dès 1863, il nécessita des "réparations urgentes". [PMSRHW]
Historique
En 1885, Jean-Frédéric II Verschneider, de Puttelange, construisit un orgue neuf. La réception eut lieu le 23/07/1885. [IHOA] [PMSRHW]
L'instrument était presque contemporain de l'ancien orgue d'Ammertzwiller : ce dernier devait être identique, mais muni d'une pédale indépendante. L'orgue Verschneider d'Ammertzwiller a été détruit lors de la Première Guerre mondiale.
Il est également fort probable que l'ancien orgue de Chalampe ressemblait aussi beaucoup à celui de Bruebach. (Son buffet était doté de deux tourelles, et de deux plates faces centrales.) L'orgue Verschneider de Chalampé (livré après la mort de Jean-Frédéric II) a été détruit pendant le second conflit mondial.
Les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités en 1917. [PMSRHW]
La façade a été remplacée en 1934 par Georges Schwenkedel. [SchwenkedelNB]
A cette occasion, Schwenkedel nota la composition, et le bon état de la tuyauterie : "Pfeifen alle gut".
Un relevage a été mené en 1987 par Christian Guerrier. (Et il y a peut-être aussi eu une intervention en 1976.) [IHOA] [PlaquetteBruebach]
Malheureusement, l'essentiel des travaux a consisté à remplacer (à nouveau) la façade, sous prétexte que celle Schwenkedel (1934) était en zinc. (Les survivantes sont de grande qualité, même celles en zinc : où est le problème, si elles sonnent bien ?) La façade d'origine de Verschneider était certes forcément en étain, mais celle de 1934 avait l'avantage de raconter une partie de l'histoire des orgues d'Alsace (la réquisition de 1917), et donc celle de Bruebach.
Le buffet
Le buffet est placé de façon un peu atypique au fond de la tribune. Il est donc difficilement visible depuis la nef. Il n'est en fait pas tout à fait au fond, car il y a l'escalier d'accès au clocher derrière.
La maison Verschneider était riche d'une forte tradition d'orgues de salon, et leurs buffets s'illustrent par un grand niveau de qualité. Le dessin général est simple : deux tourelles plates encadrent deux plates-faces (ou plutôt une centrale, double). A cause du manque de hauteur disponible, l'instrument est plutôt disposé horizontalement : 3m50 de large pour 3m de haut. L'ornementation, néo-classique, s'inspire des acanthes du style 18ème : il y a des claires-voies aux quatre éléments, et des rinceaux se rejoignant au centre.
A la ceinture du buffet, il manque la moulure d'angle, du côté gauche. Elle a pu être déposée lors de l'installation de la cloison empêchant l'accès au réservoir principal, qui est situé à l'arrière, du côté gauche.
Caractéristiques instrumentales
Console latérale, placée à droite, fermée par un couvercle basculant légèrement incliné, faisant office de pupitre quand il est ouvert. Tirants de jeux de section ronde à pommeaux tournés munis de porcelaines blanches, où le nom des jeux est écrit en noir. Il sont disposés horizontalement, en haut de l'espace fermé.
Clavier blanc. Plaque d'adresse elliptique, en métal argenté, placée au centre au-dessus du clavier, et disant :
Mécanique à balanciers.
Sommiers à gravures, diatoniques, en "M".
Réservoir à plis parallèles.
A l'exception de la façade, toute la tuyauterie d'origine a été conservée. Mais hélas - trois fois hélas - quelqu'un a altéré les principaux, comme on peut le voir sur la photo suivante. Le fait illustre une fois de plus que pendant une longue "période noire", des facteurs ignoraient et méprisaient totalement les orgues romantiques. Il est profondément regrettable que ces jeux aient été altérés, et il serait souhaitable qu'ils soient restaurés dans leur configuration d'origine, avec leurs entailles.
La tuyauterie métallique est poinçonnée, à la fois sur le corps (note et jeu, par exemple "S C#") et le pied (note). Pour la Fourniture, il n'y a pas de lettre l'identifiant, mais le numéro du rang, par exemple "2R". Biseaux à dents.
Sources et bibliographie :
Photos du 15/05/2022.
Cette curieuse plaquette propose un historique de l'orgue, mais de façon fort surprenante, elle date l'instrument J.F. Verschneider des années 1820-1830, et le présente comme "destiné à l'Eglise paroissiale de ASPACH-le-BAS", puis vendu en 1856 au maire de Bruebach. Avec ces dates (1820-1830), il ne pourrait s'agit que d'un orgue de Jean-Frédéric I (1771-1844), ce qui ne correspond absolument pas à la facture. Il semble y avoir eu confusion avec l'orgue Hérisé, totalement absent de cet historique, mais qui était bien l'objet de l'affaire entre Aspach et le maire de Bruebach.
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