Cet orgue a été installé à Harskirchen en 1896. Son buffet provient de l'ancienne église St-André (église du cimetière) d'Andlau, et avant d'arriver à Harskirchen, il est pasé par Eichhoffen. L'instrument doit être attribué à la maison Stiehr de Seltz, qui en construisit la tuyauterie vers 1858.
Historique
En juillet 1896, Aloïse Lorentz installa à l'église St-Nicolas de Harskirchen un orgue Stiehr-Mockers, 1858, venant d'Eichhoffen, St-André. [IHOA] [PMSDBO1971] [ITOA]
Il s'agissait d'un petit orgue qui avait été construit sur la base de celui de St-André (église du cimetière) d'Andlau. C'est donc là-bas que son histoire commence : [IHOA]
Selon Jean-André Silbermann (qui tenait l'information de Rieffel), "Ludwig" Besançon de Kaysersberg construisit en 1768 un orgue pour l'ancienne église "hors les murs" d'Andlau (l'église dite du cimetière, consacrée à Saint-André). Il eut cette information en 1780, l'année où l'édifice fut reconstruit. C'est Jean Nicolas Toussaint, de Westhoffen, qui remonta l'orgue Jacque Besançon dans le nouvel édifice. L'instrument était un 4-pieds, avec les "registres habituels". [PMSAEA83] [PMSDBO1971] [ITOA]
En 1854, il fut projeté de détruire l'église du cimetière d'Andlau et d'en récupérer les matériaux pour construire une église neuve à Eichhoffen. En fait, après une épique bataille juridique avec Andlau, Eichhoffen ne retira pas grand-chose de l'église St-André : seulement l'orgue. L'instrument partit donc pour Eichhoffen en 1866. C'est peut-être à cette occasion que la maison Stiehr-Mockers remplaça toute la tuyauterie de l'instrument. La date de 1858 est retenue, car elle figure sur le buffet. [PMSDBO1971] [ITOA]
En 1896, Eichhoffen se fit construire un orgue Martin Rinckenbach (l'actuel, mais qui a malheureusement été privé de certains de ses plus beaux jeux). Le curé Nicolas Lesslé d'Eichoffen chercha donc à ventre l'orgue Besançon/Stiehr. Il le proposa d'abord à Thal-Drulingen, mais le curé Schneider avait trouvé une solution dès 1894. Il savait cependant que Harskirchen cherchait à acquérir un orgue. Lesslé écrivit donc au curé Kleinclaus de Harskirchen. [PMSDBO1971]
On peut dire que Nicolas Lesslé était "bon vendeur" : "J'ai appris [...] que vous cherchez [un orgue] Je vous offre celui d'Eichhoffen. Mon prédécesseur, M. Hamm, rédacteur de la Cécilia, a fait des quêtes pour un nouvel orgue parmi ses abonnés et amis ; il a réussi ; mais s'il n'avait pas réussi, le malheur n'aurait pas été bien grand, car l'ancien orgue, avec quelques réparations vaudra le nouveau." (Autrement dit : "On s'en débarrasse, mais il est génial.") Parmi les "quelques réparations", il fallait quand même refaire le soufflet... Plus loin, le curé Lesslé précise son expression "Je vous offre" : "Le conseil de fabrique est disposé à le céder pour 400 Mk". Il fallait donc entendre "offre" au sens commercial, et pas "je vous le donne". Offre d'ailleurs, qui se transforme en "package" tout-compris : "L'artiste de Souffelweyersheim, Lorenz, vous l'arrangerait, je crois, à un prix assez modéré." Puisque tout était en promo, il n'y avait plus qu'à signer. [PMSDBO1971]
Louis Kleinclaus (25/02/1839 à Steinbourg - 24/03/1912) avait été nommé curé de Harskirchen le 08/11/1876. [PMSSTIEHR]
On demanda donc à Aloïse Lorentz, horloger et facteur d'orgues à Souffelweyersheim, promu au rang d'artiste, de procéder au déménagement. L'instrument avait alors la composition actuelle, mais la chape de la Cymbale était libre. Lorentz y plaça une Gambe, qui avait le mérite d'élargir considérablement les possibilités musicales. [PMSDBO1971]
Mais après deux déménagements, et comme il avait encore la mécanique de Besançon (1768 ; dont on connaît le côté "approximatif"), on ne s'étonnera pas qu'il connut des problèmes de fiabilité :
Une fois à Harskirchen, l'orgue dut être réparé à de nombreuses reprises. En 1904 par Adrian Spamann, mais aussi en 1909. [ITOA]
Les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités en 1917. [PMSDBO1971]
Puis, en 1929, Eberhardt et Henri Vondrasek (de Diemeringen) firent des modifications (essentiellement pour rendre la Fourniture plus grave), et placèrent aussi certainement une Voix céleste (à la place du Nasard ; le "Nasard" actuel est de Stiehr, mais il s'agit probablement du rang de quinte de l'ancienne Fourniture - sauf C-H). C'est aussi probablement à ce moment que le rang de Tierce du Cornet a été retiré. [IHOA]
Ce devait alors être un très joli petit orgue, bien adapté et plutôt attrayant, malgré sa pédale de fait inutilisable car limitée à 13 notes. L'orgue de Harskirchen n'a sûrement jamais été plus beau qu'en 1930. La tuyauterie était de Stiehr et Lorentz, la soufflerie et la mécanique refaites, et la composition, ci-dessous restituée, était très "alsacienne". Son chœur de Gambes était idéalement adapté à un environnement doté d'une réverbération courte :
En 1965, Georges Mayer fit une transformation conséquente. [IHOA] [ITOA]
Essentiellement, l'orgue a été "baroquisé" : nouveau Plein-jeu (avec une Cymbale remplaçant malheureusement la Gambe de 1896), un "Nasard" (en fait un rang de 2'2/3 de la Fourniture) remplaçant la Voix céleste, et ré-aménagement de la Fourniture pour la faire sonner beaucoup plus haut (en 1'). Ces transformations n'allaient pas dans le sens de l'esthétique de l'orgue Stiehr. La mécanique fut refaite, le clavier remplacé, la Tierce du Cornet remplacée, ainsi que la façade. Les trois jeux de pédale ont été refaits à neuf. [ITOA]
Il est fort dommage que cette opération se soit faite "dans le mauvais sens". Probablement, d'ailleurs, suite à une confusion d'attribution. "Romantiser" l'orgue Stiehr, comme cela a été fait en 1896 et 1929, allait dans le sens de l'évolution et de l'adéquation avec l'usage. Mais le "baroquiser", comme en 1965, était un non-sens historique. Bien sûr, dans les années 1960, le contexte et le goût étaient différents. Mais 5 rangs de Mixtures (plus la Doublette), sur une Montre en 4' seulement, c'est objectivement complètement déséquilibré.
En 1992, il y eut un relevage, mené par Freddy Bauer, de Sarralbe. [IHOA]
Le buffet
C'est un buffet très classique parisien, avec des tourelles rondes et des entablements. Il date de 1768. Il y a 3 tourelles, la plus petite au centre (portant un couronnement floral), et deux plates-faces.
Pie Meyer-Siat, dans son article consacré à Jacque Besançon, estime que "l'actuel buffet de Harskirchen n'a pas l'élégance et l'équilibre des autres buffets de Besançon". A son avis, "les deux plates-faces ont été élargies, ce qui a nécessité le remplacement de leurs sculptures (en bien plus pauvre, hélas !)." [PMSAEA83]
Il était tentant d'effectuer une simulation, pour juger de l'aspect de ce buffet avec 11 tuyaux aux plates-faces (comme à Bergholtz). (Mais, avant de comparer avec Bergholtz, il faut se souvenir que les plates-faces de Harskirchen ne sont pas cintrées ; ce qui est probablement d'origine.) La ligne des bouches actuelle (depuis 1965), inclinée mais rectiligne, parait assez peu pertinente.
Le buffet porte une inscription, grossièrement gravée, disant "18KJ58". La date 1858 est sûrement celle du remplacement complet de la tuyauterie par la maison Stiehr, mais "KJ" est plus difficile à identifier.
Caractéristiques instrumentales
C | c | f | f' | f'' |
1' | 1'1/3 | 2' | 4' | 8' |
2/3' | 1' | 1'1/3 | 2'2/3 | 5'1/3 |
1/2' | 2/3' | 1' | 2' | 4' |
C | c | f | f' | c'' |
1/2' | 2/3' | 1' | 2' | 2'2/3 |
1/3' | 1/2' | 2/3' | 1' | 2' |
Console en fenêtre. Clavier de 1965.
Mécanique de 1965. Suspendue pour le manuel, et à double balanciers pour la pédale.
Les sommiers, à gravures, remontent à l'orgue Besançon, 1768, du cimetière d'Andlau. Les chapes sont vissées.
Sources et bibliographie :
278. Harskirchen (église cath.) rép. par Lorentz, Souffelweyersheim, 1896, 11 Jeux, Clav. Péd.
HARSKIRCHEN, Kt. Sarre-Union. - Kathol. Kirche. 1840, Liste, ohne O. - O. rep. durch Alois Lorenz von Suffelweyersheim, O. mit 15 Reg. Vfr. 40 (1897), 285 (Nr. 5. IX. 97). - Nach MATHIAS 71, rep. von Lorenz, 1896 (sie), 11 Reg. 1 Clav., Ped.
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