Cet orgue, dans son buffet aux tourelles plates, bien dans le style de la maison Stiehr-Mockers, a été placé au printemps 1843. C'est le fameux architecte Louis Martin Zégowitz qui s'attribua le dessin de ce buffet, mais, on va le voir, l'histoire est un peu plus complexe que cela. Et l'histoire des orgues de Romanswiller commence au milieu du 18ème siècle : cet édifice fut en effet l'église "mixte" (catholique et protestante) de Romanswiller jusqu'en septembre 1897, date à laquelle elle fut entièrement consacrée au culte protestant.
Historique
En 1747 (donc du temps où l'église était utilisée par les deux confessions), Georg Friederich Merckel construisit un petit orgue neuf pour les communautés protestantes de Romanswiller et Cosswiller. [Gottenhouse2000]
Ce n'est *pas* l'orgue Joseph Waltrin, 1735, qui était venu de Wasselonne, et n'était utilisé que par la communauté catholique de Romanswiller. Marc Schaefer a tiré au clair l'histoire des orgues de Romanswiller et de Gottenhouse lors de la restauration de cet instrument en 2000. [Gottenhouse2000]
En 1823, l'orgue Merckel (I/P 8j) fut relevé par Joseph Stiehr, et muni de trois soufflets cunéiformes Silbermann récupérés à Wasselonne. [Gottenhouse2000] [PMSSTIEHR]
On est sûr que les travaux Stiehr ont bien porté sur l'orgue Merckel, car l'instituteur de Romanswiller a laissé une inscription dans l'orgue : "August instituteur à Romanswiller le 20 8bre 1823". Cette inscription a été découverte en 2000, lors du démontage de l'orgue à Gottenhouse. [Gottenhouse2000]
En 1842, l'instrument fut déménagé à Notre-Dame de Monswiller par la maison Stiehr-Mockers qui l'avait racheté. De Monswiller, l'instrument partit pour Gottenhouse en 1867. On peut le voir là-bas, où c'est l'orgue actuel. Il a été rénové en 2000. [Gottenhouse2000]
Historique
Des travaux d'agrandissement de l'édifice avaient eu lieu en 1840, et les 8 jeux de l'orgue Merckel n'auraient plus été suffisants. En 1843, la maison Stiehr-Mockers fournit un instrument neuf. [Barth] [PMSSTIEHR]
De toutes façons, l'orgue de 1747 était dans un état tellement vétuste que "toute réparation était exclue". Dans les comptes-rendus de l'époque (de Zégowitz), il est fait référence à l'orgue précédent sans qu'il ne soit précisé s'il s'agissait de l'orgue protestant (le Merckel) ou de l'orgue catholique (le Waltrin). Mais comme on apprend qu'il était doté de 8 registres, et on peut en déduire qu'il s'agissait bien du Merckel. [PMSSTIEHR]
Le 20/09/1840, Zégovitz soumit un projet et un dessin de buffet à l'approbation de G. Klotz (alors architecte du département). L'instrument fut achevé au printemps 1843, et reçu le 30/05/1843. Zégovitz signa le même jour son mémoire d'honoraires, incluant deux voyages de "5,40 myriamètres de parcours pour aller et venir" et facturant le dessin et le projet... qui avaient été fournis par la maison Stiehr. Or, la municipalité le savait ! Une fois la confiance perdue, on indiqua aussi n'avoir jamais vu Zégowitz à Romanswiller, jetant ainsi un doute sur la véracité des "myriamètres". [PMSSTIEHR]
L'orgue Stiehr a ensuite été régulièrement réparé et entretenu : dès le printemps 1870, les frères Wetzel nettoyèrent l'instrument. [IHOA] [PMS_RHW] [PMSSTIEHR]
En 1888, l'orgue a été transformé par Franz Xaver Kriess. Il avait alors 24 jeux (II/P 24 j). La réception des travaux fut effectuée par Friedrich Wilhelm Sering, directeur de la musique à Strasbourg. [Barth] [IHOA] [ITOA]
Ces travaux - apparaissant sur la liste Kriess - sont attestés également par une plaque à la console, disant "Renovatum est anno Domini 1888 F. Kriess Molsheim". Le 16' manuel actuel est de Kriess, et c'est probablement lui qui remplaça des jeux du positif, et compléta la pédale à 27 notes (elle n'en n'avait que 18 à l'origine). De plus, les claviers ont été inversés (pour avoir le grand-orgue en-bas, alors qu'il est d'usage, lorsqu'il y a un positif de dos, que le clavier principal soit au-dessus. Il faut croire que l'organiste de l'époque souhaitait avoir la disposition d'un orgue avec récit (car il avait probablement été formé sur ce type d'instrument). La transmission resta mécanique, mais le grand-orgue, au lieu de disposer d'une mécanique suspendue directe, nécessitait un système à base de double balanciers. [ITOA]
Les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités en 1917. [ITOA]
En août 1920, c'est à Robert Weibel que fut confié l'instrument et le remplacement de la façade. [IHOA] [ITOA]
Cette fois, c'est une marque à la craie, dans la laye du grand-orgue, qui relate l'intervention : "l'orgue a été réparé et régulé. Les tuyaux de façade ont été posés à la même époque par le facteur d'orgues Robert Weibel à Odratzheim, le 2. 8. au 13. 8. 1920" [ITOA]
Le pasteur Ernest Muller initia un projet de rénovation de l'instrument, qui fut concrétisé en 1966 par la maison Muhleisen. Ces travaux ont été désignés par "transformation néo-baroque" par l'inventaire technique. [IHOA] [VWeller] [ITOA]
Pie Meyer-Siat, lors de sa visite en 1967, fut bien sévère avec l'instrument (dans l'inventaire historique) : "plusieurs fois "amélioré" et sans grand intérêt".
Un relevage, à nouveau par la maison Muhleisen, a été réalisé en 1977. [IHOA]
En 2000, ce fut au tour de Gaston Kern d'assurer un entretien. [IHOA]
Caractéristiques instrumentales
Console en fenêtre frontale, fermée par des portes en chêne. Tirants de jeux de section carrée munis de pommeaux tournés à porcelaines (donc pas d'origine). Certains jeux étant écrits en gothique, on peut dater les pommeaux, ainsi que ces porcelaines "germaniques", de 1888 (Kriess). D'autres porcelaines, plus tardives, présentent une fonte latine. Elles datent probablement de 1966. Les porcelaines sont blanches pour le grand-orgue, roses pour le positif, et vertes pour la pédale. Claviers blancs ; le premier clavier a des frontons droits, mais le second (qui est, de façon surprenante, le positif) a des frontons biseautés, comme s'il s'agissait d'un récit. Pédalier récent. De part et d'autre du pupitre se trouvent 2 bougeoirs en laiton qui pourraient êtres d’origine. Commande des accouplements par pédales-cuillers à accrocher (en laiton ; Weibel ?), très écartées (une au centre, et les deux autres presque au-dessus des extrémités du pédalier). Elles sont repérées par des porcelaines placées au-dessus du second clavier. Dans l'ordre : I/P ("Pedal coppel"), "II/P", II/I ("Manual coppel"). [VWeller]
à gravures, d'origine (Stiehr) sauf pour le compléments de pédale (fis-d', à cônes, de Kriess, dans le soubassement, à droite).
L'orgue a certes été pas mal modifié, mais la partie de la tuyauterie Stiehr qui est restée en place se trouve dans un excellent état d'authenticité : les biseaux n'ont aucune dent. Les anches sont à becs avec noyaux en olive.
De plus, Romanswiller est un haut lieu de l'hymnologie pour les organistes protestants d'Alsace. En effet, le 1er dimanche de l'Avent 1963, fut solennellement inauguré ici le Recueil Alsacien de l'église Luthérienne (plus connu sous le nom de "Livre d'orgue de L'ECAAL"). Il reste encore aujourd'hui une référence pour un bon nombre d'organistes. [VWeller]
Webographie :
Sources et bibliographie :
Photos du 16/06/2016
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