L'édifice, dû à l'architecte Maximilien Metzentin, est assez remarquable. Il date de 1883, et décline le style néo-gothique d'une façon particulière, plus humaine et plus chaleureuse qu'à l'habitude. Les lucarnes au toit semblent sorties d'un conte de Grimm. L'architecture intérieure, qui joue avec les boiseries et la lumière, est particulièrement attachante. En fait, on est pas chez Grimm, mais plutôt dans le monde d'Erckmann et Chatrian. Perché dans ses hauteurs, sur une petite tribune établie sur deux frêles arbres pétrifiés, se trouve un instrument mystérieux, comme il sied à l'orgue de la fin du 19ème. Il date de 1883, et fut construit par Heinrich Koulen, dont il faut rappeler qu'il fit si bien école que la quali-totalité des facteurs alsaciens du 20ème siècle lui doivent leur héritage.
Historique
L'orgue construit en 1883 par Heinrich Koulen est donc strictement contemporain de l'édifice. Il est idéalement adapté à celui-ci et en fait partie intégrante. Il fut reçu le 16/12/1883. A temps pour Noël. [IHOA] [Barth]
L'orgue est pratiquement contemporain de celui de Matzenheim (qui n'est pas non plus éloigné géographiquement) et du bel instrument d'Andlau (qui dort malheureusement dans la poussière, victime d'une chose électronique). Il ne reste plus que cinq orgues Koulen de la période mécanique (avant 1885) : les trois déjà cités, et deux plus anciens, à Neuf-Brisach et Melsheim.
Les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités en 1917 (sans aucune conséquence instrumentale puisqu'ils étaient muets). En 1926, un menuisier du nom de Maurer posa des rondins peints à la place. [ITOA]
En 1921, Edgard Wetzel fit des travaux à la soufflerie. [IHOA]
Malheureusement, la composition fut modifiée vers 1975 par Paul Adam [IHOA]
Trois jeux romantiques au moins firent les frais de cette opération, et furent remplacés par des neufs, de mauvaise qualité. Au récit, la Voix céleste disparut au profit d'un Nasard, et la Gambe fut remplacée par une Doublette. Au grand-orgue, la grande Flûte ouverte ("majeure"), pilier de l'édifice sonore, fut supprimée et remplacée, curieusement, par un Salicional. (Est-ce la Gambe du récit d'origine ?) Enfin, la Fourniture a été complètement chamboulée, pour devenir progressive (2-4 rangs) ; elle commence une octave trop haut (1'1/3).
C'est probablement à cette époque que l'expression du récit a été modifiée, pour être commandée par une pédale basculante.
L'instrument ne semble pas avoir bénéficié d'un entretien depuis les années 70 ! La pédale II/I 4' est cassée depuis au moins 1986 (l'inventaire l'a déjà signalé). Et pourtant, ce vaillant et attachant petit orgue joue toujours (et remarquablement bien, pour certains jeux).
Le buffet
Le buffet fait un peu moins de 3m de large pour 5m de haut. Il est néo-gothique (contemporain de l'édifice) et constitué de 5 plates-faces inscrites dans une structure pyramidale (très appréciée de l'orgue romantique). En fait, il s'agit d'une simple façade placée devant une grande boîte expressive enfermant toute la tuyauterie. Il y a 7 pinacles, et le haut des plates-faces dessine des ogives triples. Les tuyaux de façade n'en sont pas : ce sont des cylindres de bois, peints.
Caractéristiques instrumentales
Console indépendante face à la nef, fermée par un couvercle basculant. Tirants de jeux de section ronde à pommeaux tournés, placés en deux gradins de part et d'autre des claviers. Porcelaines d'origine recouvertes de pastilles en plastique, très laides (1975 ?). A gauche la pédale et le récit : en haut : "Flûte 4" (II), "Octavbasse 8" (P), "Soubasse 16" (P), en bas : "Bourdon 8", "Doublette 2", "Nazard 2 2/3". A droite les jeux du grand-orgue : en haut : "Bourdon 16", "Prestant 4", "Mixtur 1 1/3", en bas : "Salicional 8", "Principal 4", "Octave 2".
Un système mécanique appelle l'Octave 2' (grand-orgue) quand on tire la Mixture, et renvoie cette dernière quand on repousse l'Octave. La Mixture ne peut donc être jouée sans son 2'.
Claviers blancs, récit biseauté. Commande des accouplements par pédales-cuillers à accrocher, en fer : de gauche à droite : I/P (repéré par une porcelaine ronde "Pedal Coppel", écrite en gothique et placée à gauche, au-dessus du second clavier), puis II/I ("Manual Coppel") et II/I 4' ("Octav Coppel").
Plaque d'adresse ovale à fond noir et lettres dorées (laiton incrusté dans le bois de la console), située au centre, au-dessus du second clavier :
Les sommiers sont chromatiques, placés orthogonalement à la façade, basses à l'arrière. Ceux des manuels sont à gravures, tandis que la pédale est munie de sommiers à cônes. (Selon un pratique très courante à l'époque : c'est la même disposition qu'à Neuf-Brisach, Melsheim, Andlau, et on la retrouvera à Fessenheim-le-Bas, Ingenheim et Lampertheim.)
La grande boîte expressive possède des jalousies sur trois côtés.
Ordre des chapes de gauche à droite : grand-orgue : Mixture, Octave 2, Prestant, Principal 8', Bourdon 16', Salicional. Puis récit : Nasard, Doublette, Flûte harmonique 4', Bourdon 8'. La pédale est plus au fond, répartie sur les deux côtés.
Un réservoir dans le clocher (la prise d'air se fait probablement en dehors de l'église). A l'origine, le souffleur se plaçait derrière l'orgue (pompes à pied) dans un réduit tout de même muni d'une fenêtre. Un peu isolé du culte, il était prévenu de la nécessité de pomper par une clochette fixée sur un ressort-serpentin (qui existe toujours).
La tuyauterie d'origine est de belle facture. La Fourniture chamboulée vers 1975 fait peine à voir, et mériterait au moins d'être remise dans l'ordre. Sa chape se trouve en avant du côté accessible et donne donc une première impression fort négative. Heureusement, le reste (à part les deux "petits jeux" du récit) est resté plutôt authentique.
C'est vraiment un très bel instrument, malgré les mutilations de 1975 et le manque d'entretien.
Lors de la visite (2014), l'orgue souffrait d'un cornement au récit et d'un ré au grand-orgue paresseux à la remontée. La mécanique est déréglée et les fuites ont l'air importantes. Mais les jeux d'origine font toujours preuve du charme de leur harmonie. Outre d'évidents travaux de soufflerie et un relevage des sommiers et de la transmission, il ne manque à cet orgue qu'un nettoyage... et la restauration des jeux mutilés en 1975. Cela redonnerait à ce précieux témoin de la facture romantique "mécanique" en Alsace la place qu'il mérite. En 2009, l'orgue Koulen de Lampertheim a été restauré, et le monde de l'orgue re-découvrit la qualité des orgues Koulen. Sa partie instrumentale a été classée Monument Historique le 15/09/2003 ; on comparera sa composition avec celle de l'orgue Koulen d'Erstein (l'originale, évidemment). En ce moment même (2014), celui de Buhl et en cours de restauration.
Sources et bibliographie :
Remerciements à Julie Fischbach.
Dossier photographique, réalisé en 1998.
Rapport de la visite du 19/04/2001
im67000373
Localisation :