Cet orgue des frères Wetzel fut construit en 1870, soit deux ans après le début de la construction de l'édifice ; resté pratiquement authentique (à part un jeu, la façade et le complément de pédale), c'est un remarquable témoin des prestations offertes par les facteurs alsaciens à la fin du deuxième tiers du 19ème siècle..
Historique
Dans l'ancienne église "mixte" de Gerstheim, il y avait déjà un orgue, dont la présence est attestée en 1825 : il était joué par Nicolas Burckel. [IHOA]
On ignore la provenance de cet instrument, ce qui laisse penser qu'il s'agit d'un instrument issu de la grande spoliation des orgues des congrégations religieuses effectuée pendant la révolution. En effet, de nombreux instrument sont déclarés "disparus" entre 1791 et 1820, alors que, dans les trois premières décennies du 19ème, de nombreux orgues "de provenance inconnue" apparaissent. Leur présence est attestée par le payement de réparations, de l'organiste et/ou du souffleur (ce dernier levant l'ambiguïté orgue/harmonium car il n'est nécessaire que pour un orgue) ; l'acquisition elle-même ne laissait souvent aucune trace.
L'instrument a été réparé en 1838 par Antoine Herbuté. [IHOA]
De nombreux orgues issus de ce trafic n'ont pas donné satisfaction : inadaptés ou fragilisés par un démontage / remontage approximatif, ils ont souvent été remplacés ou fortement modifiés assez rapidement. Celui de Gerstheim semble avoir fait exception : il a été conservé au cours des deux tiers du 19ème siècle. Il fut finalement repris en 1870 par les frères Wetzel, lors de la reconstruction de l'édifice. [IHOA]
Historique
La construction de la nouvelle église protestante commença en 1863. C'est le 30/06/1870 que fut reçu l'orgue construit par les frères Wetzel. Il manquait alors encore 4 jeux, qui furent posés dès 1871. [IHOA] [ITOA]
Aucune anche manuelle, aucune mutation, pas de Cornet : l'instrument s'est réellement écarté de l'orgue classique, et même de l'orgue "de transition", comme le concevaient Stiehr et Martin Wetzel. Les frères Wetzel font, du coup, la part belle aux Flûtes, qui, décidément, étaient leurs jeux de prédilection. Il y a une Flûte 4' à chaque plan sonore.
Avec ses claviers noirs, sa console en fenêtre et sa pédale limitée à 18 notes, l'instrument témoigne de façon criante du conservatisme qui affectait la facture alsacienne avant 1870. Les accouplements sont limités au strict indispensable : II/I et une tirasse. Ce sont d'ailleurs les seuls éléments "dynamiques" (pas d'expression, pas de pédale de combinaison). L'absence totale de commande à pied est révélatrice d'une faible influence de l'orgue romantique français - à l'époque - sur la maison Wetzel (cela changera avec Edgard). Pas étonnant que de nombreuses communes se soient tournées, à l'époque, vers Walcker (Mulhouse, Haguenau) ou Merklin (Wintzenheim, Willer-sur-Thur, Dambach-la-Ville). Cinq ans plus tard (1875), Charles et Emile Wetzel mettront fin à leur association, sûrement parce que Charles avait compris qu'il était impossible de continuer comme cela. Le fils de Charles, Edgard, alla se former chez Cavaillé-Coll.
En 1917, les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités. [IHOA]
La façade a été remplacé en 1926 par la maison Edmond-Alexandre Roethinger. C'est sûrement à ce moment que l'étendue de pédale fut complétée de 18 à 27 notes. [ITOA]
C 'est en 1931 que l'instrument subit la seule transformation portant à conséquence : la Gambe (du grand-orgue) a été transformée en quinte, par Georges Schwenkedel. [ITOA]
Le buffet
Le buffet, en chêne, est résolument néo-gothique, même si son ornementation est plutôt modeste. Les couronnements sont les seuls éléments particulièrement élaborés, avec les pinacles à crochets. Pour le reste, les claires-voies sont en tri-lobes, et les panneaux moulurés. Pas de jouées. La disposition en triangle était très appréciée par l'orgue romantique.
Caractéristiques instrumentales
Console en fenêtre frontale. Tirants de jeux de section ronde, à pommeaux noirs tournés munis d'un point blanc central (caractéristiques des Wetzel) placés en deux fois deux colonnes de part et d'autre des claviers. Les étiquettes sont blanches pour le grand-orgue et orange pour le positif. Le nom des jeux apparaît en fonte gothique (Textur), le mot "Pieds" étant calligraphié en italiques latines. Claviers noirs (1870 !).
Il n'y a aucune commande à pied (le second clavier ne peut être expressif car ses jeux sont disposés sur des chapes intercalées sur les sommiers du grand-orgue).
Plaque d'adresse noire, encadrée, placée en position centrale au-dessus du second clavier, disant :
Mécanique suspendue. (Tellement bruyante qu'il n'est pas du tout étonnant qu'un passage à la pneumatique ait été envisagé en 1931...)
Sources et bibliographie :
Photos du 26/10/2023
Photos du 14/05/2017
Localisation :