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Les orgues de la région de Haguenau
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Haguenau, St-Georges, le buffet Walcker contenant l'orgue Kern actuel.
Photos du 09/08/2020.Haguenau, St-Georges, le buffet Walcker contenant l'orgue Kern actuel.
Photos du 09/08/2020.

Dans le majestueux buffet en deux corps qui entoure les vitraux ouest de l'église St-Georges, se trouvait jadis un des orgues les plus remarquables d'Alsace : un instrument romantique de la maison Walcker. L'histoire des orgues de St-Georges commence au 15ème siècle, et, espérons-le, elle n'est pas finie.

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L'orgue Friedrich Krebs,
1493
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Historique

En 1493, le premier orgue de St-Georges a été construit par Friedrich Krebs et Michel Dürr. [IHOA] [Barth]

Au cours de la dernière année de son existence, Friedrich Krebs construisit ici un orgue en nid d'hirondelle. Le devis a été retrouvé : il date du 19/06/1491. On y lit qu'en cas de décès (la précaution fut effectivement utile) l'instrument sera achevé par Michel Dürr, neveu du facteur.

L'instrument, sûrement un 12 pieds en Montre, a été achevé en 1493. Il avait été conçu "à l'image" (mais en réduction) de celui de la cathédrale de Strasbourg, et c'était - fait remarquable - un orgue à registres (les instruments habituels à cette époque étaient des "Blockwerks" sans possibilité de registration).

La composition était probablement la suivante : un clavier principal de 3 octaves, commençant au Fa, et sans Fa# Grave (donc 36 notes), un Positif de dos de deux octaves (sans octave grave), et une pédale d'une octave et demie (du Fa au Sib, sans Fa# grave, soit 17 notes) :

- Positif de dos, 25 notes : Principal et Fourniture (ou Prestant).

- Grand-orgue, 36 notes : Montre 6' (3 rgs), Fourniture (? rgs), Cymbale (? rgs), I/II.

- Pédale, 17 notes : Montre 12', Flûte 6' et Cymbale.

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L'orgue Hans Dinckel,
1520
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Historique

L'orgue a été reconstruit en 1520 par Hans Dinckel. [IHOA]

Hans Süss, qui lui avait pourtant été préféré, était indisponible. On ne sait pas grand-chose de cet orgue, mais le tuyau de façade le plus grave était aussi un Fa : la tradition voulait que l'on gratifie le facteur d'une quantité de vin égale à la contenance de ce tuyau. Or, le volume correspond à un Fa de 12 pieds et 26 cm de diamètre. L'orgue fut de nombreuses fois réparé (en 1666 par Hans Jacob Baldner).

En 1677, Haguenau fut pratiquement totalement détruite suite à un double incendie. Les deux orgues (il y avait également un orgue de chœur) n'étaient pas totalement détruits, et une tentative pour vendre le petit à Strasbourg afin de réparer le grand se solda par un échec. [Barth] [IHOA]

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L'orgue Johann Georg Rohrer,
1716
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Historique

Au cours du 18ème, l'histoire des orgues de Haguenau est marquée par les activités du facteur Johann Georg Rohrer, à la production plus que douteuse, mais à qui, décidément, on a "laissé sa chance", et plusieurs fois. Jean-André Silbermann le qualifiait de "Pfüscher" (bricoleur, au sens péjoratif du terme, i.e. auteur d'un travail bâclé). Rohrer, assurément tenace, a fourni pas moins de trois orgues à l'église St-Georges, si bien qu'il est un peu difficile de s'y retrouver. Le premier datait de 1713-1716. [IHOA] [Barth]

Il était probablement encore en nid d'hirondelle, car en 1728, des maçons rebouchèrent la baie d'accès, suite au déplacement de l'instrument sur la tribune ouest. [Palissy]

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L'orgue Johann Georg Rohrer,
1742
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Historique

Le deuxième orgue de Johann Georg Rohrer datait de 1742. Il avait été construit pour le chapitre de Surbourg, et, finalement, on avait décidé de l'héberger à St-Georges. [IHOA]

En 1749, cet instrument a été déménagé à St-Maurice de Mutzig. [IHOA]

Après de nombreuses tentatives de réparation, il y a finalement été remplacé par Michel Stiehr en 1815.

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L'orgue Johann Georg Rohrer,
1753
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Historique

Le troisième orgue Johann Georg Rohrer pour St-Georges est daté de 1753. [IHOA] [PMSSTIEHR] [Barth]

Le buffet de cet instrument a longtemps été attribué à Wenzeslas Boehm, de Haguenau. (A tel point que pour désigner l'orgue Rohrer de 1753, on parlait de l'instrument "Rohrer/Boehm".) Mais Boehm n'a en fait réalisé que les jouées et la balustrade jouxtant le positif de dos. [Palissy]

La transmission était mécanique (évidemment) et l'histoire de l'orgue est une longue succession d'ennuis :

Une première campagne d'entretien fut nécessaire dès 1761 (et jusqu'en 1790), assurée par Georg Hladky [IHOA]

Une première réparation fut menée par Michel Stiehr en 1802. [IHOA] [PMSSTIEHR]

Puis une seconde, toujours par la maison Stiehr en 1820. [IHOA]

En 1841, après avoir envisagé un remplacement complet (y-compris le buffet), il fallut pratiquement tout reconstruire, opération qui fut confiée à George Wegmann. [IHOA] [PMSSTIEHR]

En 1866, on parvint à vendre le tout à à Notre-Dame de Monswiller. [IHOA] [Barth]

...où on peut encore le voir aujourd'hui. C'est un instrument assez... édifiant, passionnant du point de vue de la facture l'orgues. Heureusement, comme il n'y avait plus de rosace à dégager, Martin Rinckenbach a pu utiliser l'espace pour le doter en 1895 d'un somptueux récit, si bien qu'on peut en sortir de bien belles choses. Le reste est un palimpseste de différentes interventions. Tous les orgues du 18ème n'étaient pas des chef d'œuvres, loin s'en faut.

Photo-montage donnant l'aspect de l'orgue Rohrer (1753) à Haguenau.
D'après un dessin de Jean-André Silbermann.Photo-montage donnant l'aspect de l'orgue Rohrer (1753) à Haguenau.
D'après un dessin de Jean-André Silbermann.

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Historique

C'est en 1867 que l'église St-Georges reçut son orgue Eberhard Friedrich Walcker. C'était l'opus 227 (d'après l'Opus Buch, 226 dans la liste Walcker) de la célèbre maison de Ludwigsburg. [IHOA] [WOB]

La plaque Walcker à l'église catholique de Husseren-Wesserling (1856).La plaque Walcker à l'église catholique de Husseren-Wesserling (1856).

Ce devait être un instrument exceptionnel, si l'on en juge par les qualités de ses contemporains et ses caractéristiques connues. C'était le troisième Walcker, et aussi le troisième orgue romantique d'Alsace (si l'on omet l'orgue de choeur placé par la maison Walcker l'année précédente dans le cadre du même projet). Il suivait de peu celui de l'église réformée St-Etienne de Mulhouse (1866, 61 jeux, 2ème Walcker d'Alsace) : il était clair que l'arrivée de ce type de facture en Alsace était un événement fascinant. Et sûrement très préoccupant par les facteurs alsaciens "historiques", qui, après des décennies de facilité dues à une intense demande, étaient affectés d'un grave retard technique.

En voici sa composition (sans les accouplements et accessoires ; l'expression et l'étendue des claviers est déduite de l'état en 1986 et des pratiques de Walcker à l'époque; le projet initial ne comportait pas de Voix humaine) :

Composition, 1867
I. Man, 54 n. (C-f''')
C c c' c'' c'''
4' 4' 4' 8' 8'
2'2/3 2'2/3 4' 4' 4'
2' 2' 2'2/3 4' 4'
1'3/5 2' 2' 2'2/3 2'2/3
1' 1'3/5 1'1/3 2' 2'
1/2' 1' 1' 1'3/5 1'3/5
II. Manual expressif ?, 54 n. (C-f''')
A priori intégrant une une Gambe
bois
(g-f''')
g c'
8' 8'
4' 4'
- 2'2/3
- 2'
- 1'3/5
Explcitement noté 'Crescendo et Descrescendo'
Echowerk expressif, 54 n. (C-f''')
(c-f''')
Anches libres
Anches libres
Tremblant
Pedal, 27 n. (C-d')
[WOB] [SiteWalcker] [ITOA]

Quintaton 8' avec Clarinette expressive : cela fait irrésistiblement penser à "Gargouilles et chimères"... (une pièce évidemment non encore publiée en 1867, il faudra attendre encore 60 ans). Décidément, l'alchimie qui associe l'influence des orgues sur leur répertoire et la réciproque est passionnante !

Avec une telle proportion d'anches (9 pour 41 jeux - 22% ; 8/61 à Mulhouse ; 4/34 à Ludwigshafen), sa batterie complète à la pédale avec Bombarde et non Posaune, sa Voix céleste, son Basson/Hautbois (qui n'était clairement pas un "Oboe" germanique), sa Flûte traversière 4' et son Cornet, ce Walcker était bien "français".

Mais d'un autre côté, la Clarinette et la Voix humaine étaient à anches libres.

Le deuxième et le troisième clavier ne sont pas vraiment un positif et un récit : la Clarinette fait plutôt de l'"Echowerk" (III) un positif, et sa Voix céleste un récit. Et le Basson/Hautbois est au deuxième clavier. Mais on sait que la hiérarchie des claviers, dans l'orgue romantique allemand, est bien différente de celle de Cavaillé-Coll ou de Merklin. D'ailleurs, le projet Walcker par le "I. Man" et "II. Manual" (deuxième manuel : c'est un grand-orgue-moins-fort). Le rôle de l'"Echowerk" semble alors de compléter soit le premier, soit le deuxième manuel, pour les doter de couleurs spécifiques.

On sait que les sommiers étaient à cônes. Solution qui était retenue parce que, tout simplement, c'est ce qui se fait de mieux dans le domaine. Le procès verbal de réception évoque des "moteurs pneumatiques", ce qui semble indiquer que la traction était munie d'une machine Barker. On peut en déduire que les accouplements devaient être au complet (au minimum II/I, III/I et les trois tirasses ; III/II est moins sûr). Notons qu'en 1917, l'orgue était noté à 42 "registres", cela correspond aux 40 du projet initial, plus la Voix humaine et son tremblant. (Ce dernier ne comptant pas pour un "jeu" - "kligende Stimme" - mais pour un registre.)

Un orgue de prestige ?

L'organologie alsacienne de la fin du 10ème siècle, évidemment, en se pinçant le nez face à un orgue "allemand", a commencé par tenter de faire passer l'acquisition de cet instrument pour une opération de "prestige". En postulant que Walcker, leader européen, était "deux ou trois fois plus cher que les orgues du cru". Et en postulant que les commanditaires "jetaient l'argent par les fenêtres". [PMSSHAH1983]

Or, cette affirmation a été avancée alors que, de l'aveu même de l'auteur "nous n'avons retrouvé ni le devis Walcker, ni les devis de ses concurrents, ni même les noms de ces concurrents." Et un témoignage direct, donc une source primaire (délibéré du conseil municipal de Haguenau, 29/12/1865), dément totalement cette affirmation : "[...] notre Commission est d'avis d'accorder la somme de 42000 francs payable en 3 annuités pour l'acquisition d'un orgue neuf. Ce chiffre est basé sur un devis fourni par la maison Walcker de Stuttgard qui l'emporte sur tous ses concurrents par la modicité de ses prix, tout en offrant les mêmes garanties de bonne et solide facture." Par la suite, il semble que le montant de la dépense a été fort mal interprété, le prix annoncé correspondant à la somme de ceux de l'orgue de tribune et de l'orgue de chœur ! [Barth] [PMSSHAH1983]

Un orgue populaire

Les faits sont pourtant là : pendant que l'on construisait le grand instrument, on pouvait déjà, à Haguenau, apprécier la facture de Walcker, puisque l'orgue de chœur avait été posé derrière le maître-autel. L'acquisition d'un orgue neuf était à l'époque, un grand événement culturel, très élaboré (orgue de chœur, puis inauguration) et conçu à destination du public. C'était en fait tout le contraire d'un instrument "élitiste". En aucune façon une acquisition de prestige : c'était un projet populaire, issu d'une vraie dynamique, avec le soutien des élus. L'orgue Walcker d'Haguenau était un des premiers orgues "symphoniques" au sens "totalement consacrés à leur public et à faire connaître et apprécier la musique".

La réception eut lieu le 17/10/1867, par J.B. Benz (Spire, cathédrale, choisi par le conseil de fabrique) et J.A. Seitz (Reutlingen, choisi par le facteur d'orgues). Eberhard Friedrich Walcker fit partie des signataires, comme le curé de Haguenau, Victor Guerber. [PMSSHAH1983] [Barth]

Un orgue alsacien

Si le premier Walcker d'Alsace, à Husseren-Wesserling était un instrument typiquement romantique allemand (ce qui était voulu), la maison Walcker a construit pour Haguenau un orgue résolument "sur mesure". Le projet reçut la caution officielle d'Eberhard Friedrich, F. Walcker (a priori Johann Friedrich, 1829-1895) et Heinrich Spaich (qui était en train de s'associer à Johann Nepomuk Kuhn pour une sorte de "joint venture" suisse qui connut le succès que l'on connaît.)

Avec le recul, on ne peut s'empêcher de penser que cet instrument (avec son petit compagnon dans le chœur) était l'orgue idéal pour l'église St-Georges. C'était de plus, exactement le genre d'orgue qui manquent actuellement dans le paysage alsacien. Ces trois premiers Walcker (Husseren-Wesserling, Mulhouse et Haguenau), avec les Joseph Merklin de Blotzheim et Ranspach ont une importance cruciale dans l'histoire de l'orgue alsacien. Leur étude, débarrassée des clichés et des contre-vérités serinées par l'organologie de la fin du 20ème éclaire d'un jour nouveau tout ce qui s'est passé par la suite. En particulier la "Réforme alsacienne de l'orgue" (qui ne fut pas qu'alsacienne, loin s'en faut), que l'on avait jusqu'ici interprétée comme une "réaction" à l'orgue romantique allemand (car l'Histoire est friande de polémiques), mais que l'on peut voir beaucoup plus positivement : comme les évolutions de ce style Walcker "export", infléchi pour correspondre à ses clients Français (ou Russes).

Les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités en juillet 1917. [PMSSHAH1983]

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Historique

En 1926, Edmond-Alexandre Roethinger reconstruisit l'instrument. [IHOA] [Barth] [PMSSHAH1983]

Pour ce projet, Roethinger avait été mis en concurrence avec Joseph Rinckenbach et Franz Xaver Kriess. Il était considérablement moins cher que les autres, mais ce n'était peut être pas pour les mêmes travaux envisagés. De toutes façons, avec Martin Mathias (Strasbourg, cathédrale, le VRP de Roethinger à l'évêché depuis 1921 ; à ne pas confondre avec François-Xavier Mathias) en conseiller, Rinckenbach et Kriess ne devaient pas se faire beaucoup d'illusions. [PMSSHAH1983]

Le centre du papier à entête Roethinger en 1923.Le centre du papier à entête Roethinger en 1923.

Il s'agissait, pour commencer, de remplacer la façade réquisitionnée en 1917. Et puis de placer une console neuve (entre les deux buffets, et face à la nef). Et de refaire la transmission en pneumatique.

Pour commander des sommiers à cônes, ce n'était pas une mauvaise idée, sur le moment. Cela s'avéra catastrophique en 1988, car, après avoir été électrifiée (1952) cela permit de justifier la reconstruction totale de l'instrument avec des sommiers à gravures (l'erreur à ne pas commettre...). Car, en 1988, comme le raconte le plus alsacien de nos organistes parisiens, "l'électro-pneumatique, c'était le Diaaable !" En l'occurrence, plus localement, le dragon à terrasser.

Les changements de composition, à l'époque, étaient inévitables. On a pu lire que la composition a été changée "dans l'optique de la réforme alsacienne de l'orgue selon Rupp". L'affirmation, longtemps admise comme un dogme, est quand même à reconsidérer. Quoi qu'il en soit, voici la composition en 1926 :

L'orgue est noté avec 25 appels et accouplements. Le mot "Octavin" ne semble pas avoir sa signification habituelle (Flûte harmonique) mais désigne un Principal "octave" (4' ou 2'), en traduction littérale de "Octav 4'".

Réforme alsacienne de l'orgue ?

Une composition tout à fait logique dans la continuité de l'esprit symphonique. L'idée directrice est claire : ré-équilibrer les plans sonores, car on considérait le grand-orgue comme trop fourni par rapport aux autres. Il s'agissait donc de construire un vrai grand récit de 17 jeux. A ce niveau, on se demande juste pourquoi on n'a pas opté pour un 4ème manuel. Le Basson 16' et le Clairon y ont été transférés afin de bénéficier de l'expression, et de pouvoir être joués depuis tous les claviers. Tout aussi logiquement, le deuxième clavier devient un vrai positif (expressif), et on y transféra le Bourdon 16' du grand-orgue. Il fut doté du second ondulant traditionnel : l'Unda-maris. Avec la Clarinette, le plan était on ne peut plus lisible, et l'orgue devait être aisé à registrer. La pédale était aussi très traditionnelle, et très française : finalement pas très fournie, mais avec les deux anches coniques en 16' et 8'.

Finalement, la seule "marotte" identifiable, étaient les deux (!) Carillons.

Pas de Mutations (alors qu'il y en a à Saint-Bernard ou à Marlenheim), pas de 32', ni de Quinte 10'2/3 (Erstein). Si c'est cela, "l'optique de la Réforme alsacienne de l'orgue", on se demande pourquoi on en aurait fait toute une affaire... On peut même se dire que si on avait demandé à la maison Walcker une "nouvelle version" de l'orgue en 1925, le résultat n'aurait pas été fort différent.

Reste que, évidemment, on avait perdu les spécificités et la fraîcheur de la configuration de 1867 (Bifra, anches libres). Cette dernière était moins "logique", mais plus innovante. L'esprit "Second Empire" n'était plus là, et ces "années folles" manquaient singulièrement de folie. Et... il n'y avait plus de Quintaton 8' pour grimacer avec la Clarinette, alors que cette version de l'orgue est parfaitement contemporaine des "Pièces de fantaisie" ! Quel rendez-vous raté...

D'où une question un peu provocatrice, mais qui s'impose avec force : n'était-ce pas le Walcker de 1867 qui était dans l'esprit "Réforme alsacienne de l'orgue" ? N'en serait-ce pas le ferment ? Le problème avec la réforme alsacienne de l'orgue, en Alsace, c'est qu'on croit toujours qu'elle est alsacienne...

L'orgue Walcker/Roethinger fut reçu le 17/10/1926 par Paul Münck (Haguenau, qui tenait l'orgue depuis 1908), Joseph Ringeissen (Strasbourg, St-Maurice), Joseph Kuntz (Rosheim), Andlauer (Sélestat), Victor Dusch (Erstein, qui tenait le plus grand des Roethinger), et bien sûr Martin Mathias. [PMSSHAH1983]

L'instrument a été endommagé en 1945. [PMSSHAH1983]

En 1950, la maison Roethinger fut appelée pour faire des réparations, mais, évidemment, comme il s'agit d'un orgue de ville, il fallut aussi procéder à ces changements de composition, et à une électrification de la traction. [PMSSHAH1983]

Le grand-orgue fut inchangé, mais le positif perdit son Bourdon 16', et aussi, malheureusement, son Unda maris (de 1926). Pour être affublé d'une Quinte conique et d'une "Quarte de Nasard" (qui était l'expression historisante, donc valorisante, de désigner une simple Flûte 2'). Le récit perdit son Eolienne (de 1926) et sa Voix humaine, au profit des inévitables Mutations : Quinte et Tierce. Le petit plein-jeu du récit (Carillon ?) semble être resté en place jusqu'en 1958, quand il fut remplacé par une Fourniture 5 rangs. La pédale gagna un Bourdon 16' (celui du positif ?), mais perdit son Violoncelle 8', car il fallait bien une chape pour le poser. [ITOA]

Notons que c'est au cours de la même opération de la maison Roethinger démonta et emporta l'orgue de chœur Walcker. Malheureusement, cet instrument a également disparu. [PMSSHAH1983]

L'instrument était très bien équilibré acoustiquement, avec le grand-orgue dans le buffet gauche, sur deux étages, tandis que le récit et le positif étaient idéalement placés dans la partie droite. La pédale était séparée diatoniquement, et une moitié était logée dans chaque buffet. C'est l'un des grands avantages des transmissions pneumatiques (ou électriques) de pouvoir disposer les sommiers avec une grande liberté, donc une grande efficacité acoustique.

Il faut souligner qu'à ce moment, l'orgue avait encore ses sommiers Walcker, et une part importante de la tuyauterie d'origine, à notre connaissance, jamais estimée par les experts. Et pourtant, un simple pointage des compositions est assez édifiant : 29 jeux complets, plus deux partiellement (Bourdon 16' I, Montre 8') étaient encore là. Soit environ la moitié de la tuyauterie. Dire qu'à la même époque on "restaurait" à grand frais des orgues "du 18ème" dont il ne restait qu'un seul tuyau !

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L'orgue Alfred Kern,
1988 (instrument actuel)
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Historique

En 1988, Alfred Kern logea un orgue neuf dans les buffets Walcker. [IHOA]

Le 18/04/1983, le Conseil de fabrique condamna à mort l'orgue Walcker, pour le remplacer par un orgue neuf, avec un positif simili-Silbermann, à fournir par la maison Alfred Kern. Malgré les 4 ans de délai annoncés à l'époque. [PMSSHAH1983]

Un délai de grâce, qui, malheureusement, n'a pas sauvé l'orgue Walcker. Le couperet tomba effectivement en 1987, emportant une page fabuleuse de l'histoire de l'orgue alsacien.

L'instrument a été inauguré le 15/05/1988 par Maurice Moerlen, avec un programme commençant, on s'en doute, par Jehan Titelouze et finissant par Messiaen. Sans aucun romantique allemand. [Haguenau1988]

Le buffet

Le buffet est entièrement d'origine (1867) : il a été conservé, et les quelques éléments qui avaient été déposés ont été replacés ou restitués.

Vu depuis la nef, l'orgue présente un côté un peu sévère, sombre, presque inquiétant, noyé dans les jeux d'ombre et de lumière. Après-tout, il est l'exact contemporain de celui du capitaine Nemo ! Evidemment dans une version "vaisseau céleste", pas sous-marine.

Mais, exactement comme les chimères de Viollet-le-Duc, ce buffet présente un autre visage de près, depuis la tribune. Là, c'est le chatoiement de couleurs de la grande baie centrale qui anime l'ensemble. Cette tribune est un espace intime, isolé du reste de l'édifice, et baigné de lumière. Encadré par les deux buffets de l'orgue, c'est un espace spécial pour la musique, à l'ambiance unique.

Evidemment, la console de ce vaisseau musical était placée en vedette, au centre de cet espace, sa place logique et incontournable. Sa position depuis 1988 (en fenêtre dans le buffet droit) est une conséquence regrettable de la rigidité des structures imposées par les tractions mécaniques.

Il y a deux façades orientées vers l'intérieur, et munies d'ornements qui ne sont pratiquement visibles que depuis la tribune. L'architecture (originelle) de l'ensemble est un véritable hommage aux musiciens d'église.

Caractéristiques instrumentales

Console:
La console en fenêtre de la partie droite.
Les claviers sont... noirs. Si on avait voulu renier l'histoire de cet instrument,
pour "effacer" la belle époque Walcker, on n'aurait pas procédé autrement...La console en fenêtre de la partie droite.
Les claviers sont... noirs. Si on avait voulu renier l'histoire de cet instrument,
pour "effacer" la belle époque Walcker, on n'aurait pas procédé autrement...
Sommiers:

A gravures, de 1988. Ils sont plutôt petits (si bien que la tuyauterie est très serrée). En fait, du point de vue de l'architecture, il s'agit d'un 2-claviers avec "pédale de dos". La console est en fenêtre dans le buffet de gauche, et on y trouve le grand-orgue/positif (les chapes sont intercalées), et, en haut, le récit. La pédale est logée dans le buffet droit.

Sites Webographie :

Références Sources et bibliographie :

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Immatriculation de l'orgue actuel : F670180001P08
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