L'église néo-romane de Niederbronn date de 1886, et fut construite par l'architecte Defosset pour mettre fin au 'simultaneum' dans l'ancienne église St-Jean (édifice aujourd'hui consacré au culte protestant). Après 7 ans d'usage d'un harmonium, il restait à doter cet édifice d'une voix adaptée, incarnée par un orgue romantique de la meilleure lignée.
Historique
L'instrument, fut construit en 1894 par Martin Rinckenbach, dont c'est l'opus 44. [IHOA] [ITOA] [Barth]
Il s'agit d'un instrument particulièrement en harmonie avec son environnement, précurseur de ceux d'Ensisheim ou de Selestat, St-Georges. C'est l'un des premiers instruments de la maison d'Ammerschwihr à disposer de claviers de 56 notes (llant jusqu'au 5ème Sol ; ses claviers s'arrêtaient auparavant au Fa). Un orgue conçu pour le grand répertoire symphonique, donc.
Les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités allemandes en juillet 1917. Ils ont été remplacés par des tuyaux de zinc. [IHOA]
En 1971, Willy Meurer procéda malheureusement à une légère "néo-classicisation" de la composition. [IHOA]
Avec 20 ans de retard sur cette mode désastreuse, il plaça au grand-orgue une Quarte 2' (en recoupant le Piccolo harmonique (Octavin) de Rinckenbach) et une Sesquialtera (qui n'a rien à voir avec l'esthétique de l'instrument, et prenant la place de l'indispensable Flûte 4'), et, au récit, une Waldfloete 2' avec un Sifflet 1' (ce dernier à la place du Quintaton 16' !). La "Waldfoete" occupe probablement la place d'une Gambe 8' ou d'une Fugara 4'. [ITOA]
Entre août et décembre 2006, l'orgue Rinckenbach a été restauré dans son état de 1894 (à l'exception de deux jeux de 2 pieds) par la maison Muhleisen. [Caecilia] [MBaumann] [Muhleisen]
En effet, dans les années 2000, l'orgue nécessitait un important relevage. Il était de plus affublé de 4 jeux étrangers à son esthétique (ainsi qu'à celle de l'édifice). Une association, présidée par Anne Guillier, a été crée dans le but de le restaurer. Le projet a été mené sous la maîtrise d'ouvrage de la ville de Niederbronn-les-Bains et la maîtrise d'oeuvre de Marc Baumann : [Caecilia]
Pour le buffet :
- Nettoyage et traitement général.
- Certains panneaux ont été rendus amovibles.
- Remise en place et restauration du décor (moulures).
Pour la console et la mécanique :
- Nettoyage et réparation des claviers (certaines touches ont été replaquées ; remplacement de feutres de butée).
- Les porcelaines des tirants de registres manquantes ont été refaites (calligraphie et teintes) sur le modèle de l’orgue Rinckenbach de l’église St-Joseph à Mulhouse.
- Controle et remise en état complet transmission. Réarmement des bras, équerres et balanciers, remise en était des écrous et des ressorts.
Pour les sommiers et l'alimentation :
- Relevage général et réenchappage.
- Les postages ont dû être refaits (ils avaient été collés avec une colle très forte, lors d'une intervention précédente).
- Relevage de la soufflerie.
Pour la tuyauterie:
- Reconstruction du Principal 8' du grand-orgue (en partie en Montre), sur le modèle de la Montre préservée de Mulhouse, St-Joseph (1887).
- Reconstruction d'une façade en étain pour le positif postiche.
- Restauration de la Flûte 4' du grand-orgue, ainsi que du Quintaton 16' du récit, sur le modèle de Selestat, St-Georges.
- Restauration des tuyaux de certains jeux romantiques qui avaient été mutilés (entailles et sommet déformés) par de précédents accords. Réharminisqtion de la Gambe (qui avait été affaiblie) et restauration de la Fourniture ainsi que des languettes des anches.
- Nettoyage, relevage général de la tuyauterie.
La Quarte 2' et la Waldfloete 2' sont restées (probablement pour des questions financières). Les tuyaux non réutilisés ont été mis à la disposition de l'association des Amis de l’orgue (donc, a priori, la façade en zinc, la Sesquialtera et le Sifflet de 1971). [Muhleisen]
L'orgue restauré a été inauguré le 20/05/2007 par Marc Baumann. [Caecilia] [MBaumann]
Niederbronn dispose donc d'un instrument exceptionnel, témoin d'une des époques les plus fécondes de la facture d'orgues. Une époque où Martin Rinckenbach, encore fidèle à la transmission mécanique, l'assortissait - comme Cavaillé-Coll, son maître - à une machine Barker. Une époque où Rinckenbach, héritier d'une traidition de facture alsacienne déjà plus que séculaire (par Valentin Rinkenbach puis Martin Bergäntzel, jusqu'à Joseph Waltrin), était en concurrence avec Koulen, Weigle, Walcker ou Merklin, obligeant ses équipes à l'excellence pour chaque instrument.
Le buffet
Le buffet est de style néo-roman. Trois tourelles en encorbellement, la plus grande au centre, sur base de demi-hexagones et surmontées de clochetons ajourés, sont séparées de plates faces triples, la partie centrale surmontée d'un chevron à tympan. Positif de dos postiche, à deux tourelles encadrant une plate-face double. Crénaux et pinacles complètent le décor.
On ne sait pas qui a construit le buffet (bien que Klem vienne forcément à l'esprit), comme c'est le cas pour le reste du mobilier de l'église (autels, tabernacle, statues, chaire, stalles). Les tableaux des retables ont été exécutés par Carola Sorg en 1886 et 1889. [Palissy]
Caractéristiques instrumentales
Fondé sur un 16 pieds ouvert (évidemment complété par son Bourdon), le grand-orgue se voit doté d'une palette de quatre fonds de 8 pieds. Les deux 4 pieds complètent cet ensemble de Fonds, étayé par un Octavin (2 pieds harmonique) (à l'origine). La Trompette, qu'on aurait pu attendre au récit, est bien au grand-orgue, et le tout se couronnera dans le crescendo (une fois emmené le récit grâce la l'accouplement renforcé d'une machine Barker) par une Fourniture, grave et progressive (5 à 6 rangs).
L'âme du récit est constituée du Basson/Hautbois et du couple Gambe/Voix céleste. Comme le grand-orgue est fondé sur un Principal 16', le récit doit être fondé sur un 16 pieds bouché, riche en harmoniques : ce rôle est tenu par le Quintaton 16', qui a heureusement été restitué en 2007. Le récit porte les deux Flûtes harmoniques. Il n'y a qu'une anche (l'école romantique française en aurait mis plus). La seule Mutation (une Quinte, évidemment, puisqu'elle est toute seule) apparaît aussi au récit. A noter ici le Salicional 4' (logique en Alsace où les orgues pré-romantiques de Stiehr et Callinet en étaient souvent pourvus : ils l'appellaient souvent "Jeu céleste").
La pédale, plutôt fournie, évidemment fondée sur un gros principal 16 pieds et une Bombarde, ne propose qu'une Gambe (8 pieds), mais a sa propre Trompette. En Alsace, il ne saurait être question des habituels emprunts au grand-orgue.
Console indépendante face à la nef, fermée par un couvercle incliné. Blocs-claviers noirs. Tirants de section ronde à pommeaux tournés avec porcelaines, placés en trois gradins. Porte-partitions amovible se glissant dans le revers du couvercle. [Palissy]
Comme à Dietwiller (1891) et plus tard à Dessenheim (1901) le tirant de la Voix céleste est surmonté s'une petite plaque indiquant "Nicht mit dem vollen Werk ziehen" (comme c'est un jeu ondulant, c'est évident... mais ce qui va sans dire va encore mieux en le disant...)
Plaque d'adresse située au-dessus du récit et au centre, disant:
Le mot "Ammerschweier" serpente sur deux lignes. C'est le modèle avec un point après "Ammerschwihr".
mécanique à équerres. Machine pneumatique Barken pour l'accouplement des claviers.
Webographie :
Sources et bibliographie :
Rapport établi par Hervé Benoit
Remerciements à Marc Baumann
Localisation :