Historique

En 1824, Michel Stiehr et Xavery Mockers construisirent un orgue neuf pour Rittershoffen. [IHOA] [PMSSTIEHR]

Le devis est daté du 25/06/1822, pour un orgue post-classique de 27 jeux, avec une pédale (de 6 jeux) limitée à 15 notes :

L'orgue Stiehr nécessita déjà une réparation d'envergure (près de 5% du prix initial de l'orgue) dès 1837. [PMSSTIEHR]

Une nouvelle réparation du même ordre fut nécessaire en 1843. [PMSSTIEHR]

Et encore une réparation, très coûteuse, en 1863. [PMSSTIEHR]

Le 02/02/1913, un incendie détruisit l'église de Rittershoffen. [IHOA] [Horning]

Le bâtiment put être sauvé, mais pas le mobilier. Lors de la reconstruction de l'édifice, on décida de construire une nouvelle église catholique, pour mettre fin au "simultaneum".

Historique

L'orgue Eberhard Friedrich Walcker de Rittershoffen eut un destin assez extraordinaire : construit lors du premier conflit mondial, installé en 1916, il fut anéanti lors du second. Mais il n'y a que son destin qui soit remarquable : [IHOA]

Cet orgue Walcker était le 29ème (et avant-dernier) opus alsacien. Et plutôt imposant : 26 jeux / 29 registres. Les listes Walcker le datent effectivement de 1916, et lui donnent le numéro d'opus 1877. Le projet fut soumis à l'approbation d'Ernest Münch et François-Xavier Mathias le 12 avril 1915, mais l'accord avait déjà été conclu le 16/07/1914. L'instrument est très bien documenté, et il est très post-romantique. Presque déjà néo-classique par certains côtés : (l'ordre des jeux est celui des notes Walcker, les informations ont été complétées avec le relevé de Georges Schwenkedel fait en 1936) [WOB] [IHOA]

Chaque nom de jeu est accompagné d'une description du caractère de l'harmonisation. Par exemple, pour le Bourdon 16' "heller füllender Gedackton". Le récit est doté de 68 notes, pour que l'accouplement à l'octave aiguë (II/I 4') soit complet. Il faut noter le "Bourdon doux" libellé en Français. Le premier 4' du récit est bien sûr une Fugara (et surtout pas un Principal), et, pour le second, il est noté Gemshorn 4' ou Flauto traverse 4'. La Clarinette est à anches libres, selon une habitude bien établie chez Walcker. Et la Trompette harmonique au récit vient, avec la Voix céleste et le "Bourdon doux", renforcer le côté "export" de l'instrument. La Cornet-mixtur, progressive, est notée 3-5 rangs, et de 244 tuyaux, donc a priori C-H à 3 rangs, c-h à 4, et 5 à partir de c'.

Les deux 2', dans un instrument certes imposant mais pas monumental, sont l'expression du néo-classicisme naissant. Evidemment, ils viennent couronner une solide dotation en Fonds : on les met parce qu'on a déjà toutes les couleurs nécessaires. 5 ou 6 jeux étaient d'ailleurs prévus pour une seconde tranche, selon l'accord du 16/07/1914. Tous les jeux semblent avoir été finalement posés, comme le confirme les relevés ultérieurs (1926 et 1936 ; 26 jeux et 3 transmissions, soit 29 registres). Il faut aussi noter les jeux du récit transmis à la pédale, rendant celle-ci en partie expressive, qui est est une solution très élégante. [Mathias]

Avec une composition pareille, la transmission était évidemment pneumatique. Et la console bien sûr indépendante. Celle-ci fut d'ailleurs très appréciée de Georges Schwenkedel, puis qu'il note "Spieltisch Rittershoffen shönes Modell", et en relève les cotes et le profil des moulures. [SchwenkedelNB]

Le buffet devait être construit à partir du dessin fourni par l'architecte strasbourgeois Gustave Oberthür. [WOB] [EAdam]

Le 09/08/1926, Georges Schwenkedel visita l'orgue, nota l'orgue à 29 registres et rédigea un devis pour un simple nettoyage. En 1936, Georges Schwenkedel vint faire quelques réparations. Il nota que le grand-orgue avait 11 chapes, et proposa de garnir celle qui était vide avec une Quinte 2'2/3. Il était aussi question de déplacer les sommiers, pour sortir ceux qui étaient dans la tour. [SchwenkedelNB]

En janvier 1945, lors de l'épouvantable opération "Nordwind", une bataille de chars ne laissa de Rittershoffen et Hatten que des ruines. L'église de 1787 et son orgue Walcker furent totalement détruits par faits de guerre. C'est une perte terrible pour l'orgue alsacien, car cet instrument avait une importance historique considérable. Il était clairement issu de la Réforme alsacienne de l'Orgue. [IHOA]

Historique

En 1961, Curt Schwenkedel construisit un orgue neuf. [IHOA]

Comme souvent après les conflits, on a voulu, pour la reconstruction "tout à fait autre chose". Ce phénomène culturel est assez répandu : il s'agit de faire table-rase, comme si tout les constituant du passé avaient une part de responsabilité dans ce qui s'est passé.

On ne s'étonne donc pas de trouver "Ein Kind seiner Zeit", doté des caractéristiques de la mode "nordique" de l'époque. Au moins, ce "néo-baroque"-là n'a pas le sacrifice de son prédécesseur sur la conscience, puisque là, ce sont les obus des chars qui l'ont détruit. Appliqué avec franchise et intégrité, sans concession, ce style a ici produit un orgue très réussi. Il faut dire que Curt Schwenkedel le pratiquait avec zèle et conviction. Son modèle, d'ailleurs, ne semble pas tant être Schnitger que Marcussen. En tous cas, il échappe ici au "simili-parisien du 18ème siècle" qui envahissait les tribunes alsaciennes. L'instrument est bien sûr entièrement dévolu à un type bien particulier de répertoire, allant du 17ème au 18ème, plus un peu de "contemporain". (Comprendre par là "le répertoire d'orgue contemporain de sa conception".)

Les traits caractéristiques sont :

- Un caractère très fortement principalisant.

- La Sesquialtera (et pas le Jeu de Tierce), jeu "signature" de l'esthétique "nordique".

- Une dotation en Mutations presque inexistante. (Le Larigot est plutôt une petite Cymbale.)

- Une dotation en anches réduite au minimum.

- Un double petit plein jeu au positif (Larigot et/ou Cymbale), avec effacement des fondamentales : le tout fondé sur un Principal de 2' seulement (8' et 4' sont des Bourdons).

- Une Mixture de pédale.

- Le Principal 1'. (Qu'on commentera toujours en affirmant qu'il est issu de la révélation de Jean-André Silbermann quand il fit son Chemin de Damas en Saxe.)

- Les Principaux sont volontiers "italiens". (Il ne s'agit donc pas d'un simple pastiche d'un orgue "nordique" fantasmé. D'ailleurs, on utilise volontiers du cuivre pour la tuyauterie.)

- Aucune Gambe, aucune Flûte ouverte.

- Pas d'expression. Buffet conforme au "Werkprincip", i.e. dont la disposition expose la configuration interne. Sommiers à gravures et mécanique suspendue.

Et une exécution conforme aux canons du style. On peut dire que Curt Schwenkedel, quand il faisait du neuf, le faisait très bien. A l'époque, ces orgues sur-aigus, harmonisés "à plein vent" avec des pressions à dessein insuffisantes, ne surprenaient pas. Et aujourd'hui, ils continuent d'exceller dans leur répertoire.

Caractéristiques instrumentales