L'église paroissiale St-Jean Baptiste de Saint-Jean-Saverne était une abbaye bénédictine avant la Révolution. L'abbaye, nommée "Saint-Jean-des-Choux" (rappelant le rôle fondamental qu'a joué cet illustre légume dans la survie de nos ancêtres), date du 12ème siècle. Plusieurs orgues se sont succédés dans cet édifice chargé d'histoire. Il abrite aujourd'hui un orgue construit par Richard Dott en 2009, très inspiré des petits instruments de Jean-André Silbermann dont il reprend un buffet.
L'édifice remonte, pour partie, au 12 ème siècle. On y trouve des ornements sculptés sur les corniches de la nef, ainsi que des peintures romanes datant de cette époque. Une Pietà, et une statue de Ste-Agathe, polychromes, sont attribuées à Hans Faber. Une croisée d'ogives est, paraît-il, la plus ancienne d'Alsace. Ce serait alors un témoin du travail des premiers concepteurs de l'architecture gothique. Il y a aussi des tapisseries inestimables, parmi lesquelles la "Chasse aux Hommes Sauvages" (15 ème siècle), la "Madone au Jardinet", le "Trône de grâce", la "Mise au tombeau", les "Lamentations du vieillard" (16 ème siècle).
Historique
L'aventure commence au tout début du 17 ème siècle, avec l'arrivée d'un premier orgue dont on ne sait presque rien du tout, si ce n'est qu'il existait en 1626 : l'instrument est cité par Martin Vogeleis, à l'occasion des funérailles de l'organiste du lieu : Anna Antonij (le 23 novembre). Elle aurait occupé ce poste depuis 1603. [Vogeleis] [Barth]
Historique
L'instrument de provenance inconnue fut remplacé en 1720 par Georg Friederich Merckel. [IHOA]
Historique
Le troisième orgue du lieu est le plus célèbre, puisque c'est celui qui fut construit en 1747 par Jean-André Silbermann. [IHOA] [ITOA] [Barth] [ArchSilb]
L'instrument fait partie d'une série de trois, les deux autres étant St-Quirin (1745) et Guémar (1746, aujourd'hui à Griesheim-sur-Souffel). L'orgue de St-Jean était donc le dernier des trois. L'accord date du 16/10/1746, et fut achevé en juillet 1747 (15 jeux / 18 registres : 11 au manuel, 5 à l'écho et 2 à la pédale). [Barth] [ArchSilb]
Dans ses archives, Silbermann décrit l'accord du Prestant, Bourdon, Flûte, Nasard, Doublette, Bourdon d'écho, Fourniture, Cymbale, Tierce, Prestant d'écho, Cornet, Cromorne, Trompette et basse de pédale, et atteste la présence d'un tremblant fort. Il est possible que le Cornet d'écho n'ait pas été séparable (un seul tirant, le nombre de 18 registres étant atteint par les deux tremblants). Jean-André rapporte aussi une petite excursion dans la montagne, le 11 juillet, avec Daniel et Gottfried, pour aller voir une cascade. [ArchSilb]
Contrairement à ceux de son père André, aucun orgue de Jean-André Silbermann n'est parvenu jusqu'à nous sans avoir été fortement modifié. Aussi l'histoire de celui de Saint-Jean-Saverne est-elle une longue liste de modifications.
L'orgue fut d'abord entretenu par Jean-André Silbermann lui-même (1760). [ITOA]
En 1836, il a été confié à Jean-Frédéric I Verschneider, de Puttelange, à la place de Xavery Mockers, tout d'abord contacté. Verschneider ajouta peut-être une Flûte traverse 8'. [ITOA] [PMSSTIEHR]
En 1851, la maison Stiehr-Mockers procéda aux premières modifications d'envergure. [ITOA] [PMSSTIEHR]
Il s'agissait d'ajouter un Bourdon 16', une Montre de 8' et un Salicional. Il fallait donc agrandir le buffet, qui n'était pas prévu pour accueillir des jeux aussi volumineux. Les basses de la Montre 8', beaucoup trop grandes pour le buffet, avaient pris place dans des tourelles supplémentaires. Les plates-faces centrales, incurvées à l'origine (car faisant partie de l'élément central tri-lobé), sont devenues plates.
Ensuite, c'est la maison Wetzel qui proposa une rénovation, qui aurait inclus la fourniture d'un buffet neuf.
En 1879, un clavier de 4 octaves seulement était devenu inconcevable. On demanda à Félix Mockers d'ajouter 5 notes aux manuels (pour aller jusqu'au Fa (f''')). Pour ce faire, il procéda sûrement au remplacement des sommiers. L'orgue fut en outre mis au diapason moderne, et le second clavier fut peut-être complété. Louis Mockers fit encore une réparation en 1900. [ITOA]
En 1900, l'orgue a été réparé par Louis Mockers. [ITOA]
Historique
En 1904, Edmond-Alexandre Roethinger reconstruisit l'instrument, qui fut fini en juin de cette année. [ITOA] [PMSSTIEHR] [Barth]
L'opus 40 de Roethinger
Roethinger plaça son opus 40 dans ce qui restait du buffet de l'orgue Silbermann. Le dit buffet fut encore modifié à cette occasion, puisqu'un accès à la tribune a été ménagé à la place habituelle de la console en fenêtre. Une inesthétique palissade en sapin (parallèle à la façade) a été placée pour cacher les tuyaux de pédale. En 1969, le buffet de cet orgue fut tout de même classé Monument Historique. Il restait alors de Silbermann :
La période noire (1980-2007)
L'orgue Roethinger étant en mauvais état, il fut décidé d'installer un "orgue" électronique dans ce haut lieu culturel et cultuel !
Voici la composition telle que la note l'inventaire de 1986 :
Le Bourdon double avait deux bouches par tuyau, une de chaque côté.
La
tuyauterie, déposée, était soigneusement conservée dans un local communal. Et
l'arrière du buffet offrait un spectacle de désolation totale.
Caractéristiques instrumentales
Historique
En 2009, Richard Dott reconstruisit l'instrument. La maîtrise d'ouvrage de l'opération a été assurée par Marc Baumann. [MBaumann]
Le projet débuta dès 2001 par une expertise. Il a d'abord fallu décider entre une restauration dans l'un des états antérieurs, et une reconstruction d'un orgue cohérent sur la base du matériel existant. C'est la deuxième solution qui a été retenue, surtout lorsque la priorité fut donnée à la fiabilité du futur instrument.
Après la sélection du facteur, le démontage a eu lieu en janvier 2008. Les premiers éléments du buffet on été placés fin février 2009. Beaucoup de tuyaux de Jean André Silbermann et de Stiehr ont retrouvé leur place, rejoints par ceux reconstruits par Richard Dott. L'écho est complet (51 notes), conçu comme un Cornet d'écho (Bourdon 8', Flûte 4', Nasard 2'2/3, Quarte 2', Tierce 1'3/5). Le rang de 2 pieds est ici séparable, laissant une Sesquialtera (2'2/3 et 1'3/5) indépendante. A Pâques 2009 eut lieu le premier office accompagné par le nouvel orgue. [SBauer] [MBaumann]
Les anciennes tourelles (de Stiehr) ont été placées contre le mur ouest de la
tribune de part et d'autre de la porte d'entrée. Les corniches des tourelles,
très profondes ont été réduites en longueur.
Il faut aussi noter le grand
intérêt des panneaux sculptés ornant la tribune. Ils figurent des instruments de
musique et un livre de chant. Cet ensemble a été restauré par l'atelier "Le
Chevalet" de Mundolsheim. [MBaumann]
L'orgue a été inauguré le 25/10/2009 par Marc Baumann.
Le buffet
En chêne, fortement modifié en 1851 et 1904, restauré en 2009 dans son état de 1747. Il est bien sûr très voisin de ceux des deux autres instruments de la série : St-Quirin (1745) et Guémar (1746, aujourd'hui à Griesheim-sur-Souffel.
Caractéristiques instrumentales
Console en fenêtre (2009). Tirants de jeux de section carrée à pommeaux tournés noirs, disposés en deux colonnes, de part et d'autre de la fenêtre. Claviers noirs.
Sources et bibliographie :
Photos de mai 2009.
Photos d'avril 2009.
Photos de 2004.
im67007592
Localisation :