Jacques HENN ne passera malheureusement pas à la postérité en tant que "grand" facteur d'orgues. Mais son orgue de l'église protestante de Keskastel reste très intéressant.

     L'orgue de l'église luthérienne de Keskastel est moins célèbre que l'instrument de Georges et Nicolas VERSCHNEIDER, 1861, ornant l'église St-Nicolas. Les Buffets peuvent paraître très voisins, si l'on fait abstraction de l'ornementation, abondante à l'église catholique, et presque absente sur celui de l'église protestante.

Le Buffet de St-Nicolas, avec ses culots cylindriques et les Claires-voies des Plates-faces "en palmier" est caractéristique de la facture des Verschneider. D'en bas, les orgues sont disposés de la même façon, avec un grand corps de Buffet à trois Tourelles à entablements classiques (la grande au milieu) et un Positif à deux Tourelles et deux Plates-faces. Mais à l'église protestante, il n'y a pas de Positif de dos. Il est disposé "en trompe l'oeil", mais n'est pas postiche. La façade, aux Tourelles places correspond à un Positif frontal placé dans le soubassement. L'orgue est situé à fleur de tribune, avec une Console latérale.

     L'édifice fut construit en 1833, et la construction de l'orgue confiée à Jacques Henn (Sarralbe, 1796 - Hochfelden, 1867). L'inauguration eut lieu le jour de Pâques de 1834. Voici la probable Composition d'origine :

Avant d'avoir achevé cet instrument, Henn traita (Janvier 1834) avec Folschwiller (57, près de St-Avold). Cependant, cela se passa très mal. Il s'agissait du démontage/remontage d'un instrument ancien, mais l'affaire se finit le 08/11/1837 par un jugement du tribunal de Sarreguemines, qui permettait à la fabrique de "traiter avec un facteur d'orgues aux frais et dépends du sieur Henn domicilié à Sarralbe".

Longtemps installé à Nancy, Henn était donc domicilié à Sarralbe en 1837. On ne sait pas si son travail à Folschwiller fut réellement catastrophique ou s'il avait mal compris les directives (et s'était engagé dans une transformation, voir une reconstruction non souhaitée), mais force est de constater que c'est Jean-Frédéric II Verschneider qui acheva le travail.

On retrouve le malheureux facteur d'orgues "accordeur à Nancy" en 1853 à Saint-Mihiel : il proposa ses services, mais sa mauvaise réputation l'ayant devancé, il fut éconduit.

     On peut lire que l'orgue Henn de Keskastel fut "reconstruit entièrement" quelques années après sa construction. En fait, il s'agit de réparations, confiées à Martin WETZEL, en 1861. D'après la provenance du matériel (tous les Jeux sont de Henn, à part les deux Anches qui ont disparu) on peut quand même se dire qu'il n'y avait pas tant à reconstruire que cela.

     L'orgue a été Relevé par Christian GUERRIER en 1993. C'est à présent l'un des seuls témoins du travail d'un facteur de 19 ème, utilisant des techniques très proches des Verschneider, et qui fut certainement fort sévèrement jugé suite à l'affaire de Folschwiller.

Mécanique : Suspendue au G.O. (bien que la Console soit latérale), à Balanciers pour le Positif. Console d'origine (sauf le étiquettes).

(1) Composition de la Fourniture :

• Christian LUTZ et François MENISSIER, Inventaire des Orgues de Lorraine