Dans l'Inventaire historique des orgues d'Alsace de 1987, sous Orschwiller, on peut lire "4 septembre 1985: incendie de l'église: orgue détruit". Mais l'orgue Stiehr de 1852 a bel et bien survécu. restauré par la manufacture Muhleisen en 1988 dans son état de 1852, et il est aujourd'hui classé Monument historique.
Historique
Le premier orgue d'Orschwiller a été construit juste après la Révolution, en 1810, par Joseph Bergäntzel, lorsqu'il revint d'exil. [IHOA] [ITOA] [HOIE] [PMSBERGANTZEL]
Dans la chronique d'Orschwiller de 1934, on apprend que cet orgue (acquis neuf) avait été construit par le "célèbre facteurs d'orgues" ("berühmter Orgelmacher") Birgentzlé. En 1840, l'orgue est rapporté en très mauvais état. [Barth]
La maison Stiehr reprit cet instrument en 1851, et on ne sait pas ce qu'il est devenu. [IHOA] [HOIE] [PMSSTIEHR]
On a vu qu'en 1840, l'état général était mauvais, et on songeait déjà à remplacer l'orgue entier en 1847. Le meilleur, chez Bergäntzel, c'était sûrement les buffets ; il est fort dommage que celui-ci ait été perdu.
Historique
C'est en 1852 que Joseph Stiehr posa un orgue tout à fait conforme à la tradition de la maison de Setz (avec un positif de dos), et logé dans un buffet plutôt original, particulièrement réussi. La composition d'origine était la même que l'actuelle, et conforme au devis - sauf que ce dernier ne prévoyait pas de Clairon de pédale et que les Flûtes 4' et 8' étaient prévues bouchées. [IHOA] [ITOA] [HOIE]
L'accord avait été conclu le 13/11/1847 pour un orgue que l'on voulait analogue à celui de Rossfeld (1845). Mais il y eut des difficultés administratives. Le traité a été révisé le 04/03/1849, et l'orgue fut joué pour la première fois lors de la fête patronale (St-Maurice) le 22/09/1852. [Barth] [PMSSTIEHR]
A Rossfeld, l'orgue Stiehr de 32 registres, avec positif de dos, n'existe plus. Mais le plan de la façade a été établi en 1917 par le curé Martin Blumstein. [IHOA]
L'orgue a été réparé en 1876 par Martin Rinckenbach. [ITOA] [HOIE] [Barth]
Le positif a été transformé en récit en 1899 par Martin et Joseph Rinckenbach. Le petit buffet est resté en place (évidement postiche), tandis que le sommier et la tuyauterie du positif ont été installés dans une boîte expressive, à l'arrière de l'instrument. Il ne semble pas qu'il y ait eu de modifications importantes à la tuyauterie (la seule adjonction évidente portant sur le Principal 8' du récit (d-cis'), les tuyaux de montre du positif ne pouvant être déplacés). Les travaux concernèrent aussi la console (réparations ou ajustements suite au déplacement du positif en récit), ce qui fut un moment pris à tort pour un changement de console. [ITOA] [Caecilia] [Barth] [PMSSTIEHR]
Les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités en 1917. [ITOA] [Caecilia]
L'orgue a été réparé en 1924 par Franz Kriess. Il plaça une façade neuve, ainsi qu'un ventilateur électrique, et remplaça l'anche de 16' de pédale par une Contrebasse 16'. [ITOA] [HOIE] [Barth] [GWalther]
Ce sont des tuyaux de cette Contrebasse (coudés à l'horizontale) que l'on voit dépasser au-dessus du buffet sur les anciennes photos.
Dans les années 60, l'orgue avait une grande Quinte 5'1/3 à la place de la Gambe de grand-orgue, et une pédale limitée à 5 jeux, sans anche (Soubasse, Flûtes 8' et 4', Contrebasse 16' et Violoncelle 8'). [PMSSTIEHR]
En 1966, Ernest Muhleisen procéda à un relevage. [HOIE] [Caecilia]
En 1976, il y eut une réparation, par Alfred Kern. La Gambe du grand-orgue a été restituée, comme sa Fourniture, dont il manquait le 4ème rang. Enfin, un plafond en bois a été posé. [ITOA] [Caecilia] [GWalther]
Dans la nuit du 03 au 04/09/1985, l'église d'Orschwiller eut à souffrir d'un grave incendie. L'orgue fut très endommagé. La toiture de la nef fut pratiquement entièrement consumée. La chaire de l'ancien couvent des Franciscains de Sélestat, achetée en 1802, disparut entièrement dans les flammes. Heureusement, le clocher et la belle façade baroque (1779-1781) restèrent debout. Le buffet du positif de dos a été consumé, tout comme l'aurait été sa partie instrumentale, si celle-ci n'avait pas été placée en récit, en 1899. Mais la tuyauterie et les sommiers du second clavier étaient à l'abri, à l'arrière de l'instrument, et furent sauvés. L'orgue a été démonté en novembre ; les dégâts ont surtout été causés par l'humidité, les tuyaux fondus se comptant surtout dans la façade (de 1924) et le Cornet posté (mais en nombre limité). Tous les tuyaux en bois ont tout pu reprendre du service (au pire, ils étaient décollés par l'eau). [ITOA] [Panneau]
La manufacture Muhleisen fut chargée de la reconstruction de l'orgue, en l'état de 1852 (avec positif de dos). Les travaux furent achevés le 04/12/1988. [IHOA]
Il a fallu reconstruire un buffet pour le positif de dos sur la base de photographies et des rares éléments restants. La pédale a été restaurée dans son état de 1852 (mais avec une Flûte 8' ouverte). Les dégâts de l'eau ont été réparés après séchage, et les quelques tuyaux fondus reconstruits. Le tempérament ancien de Stiehr (ou ce qu'il en restait) a été soigneusement reconstitué à partir des paramètres d'harmonisation - pieds - lumière - biseaux, sans recouper les tuyaux lors de l'accord. Il en est ressorti un tempérament légèrement inégal (i.e. de -2 à +4 cents par rapport au tempérament égal). [GWalther]
L'instrument reconstruit a été inauguré le 04/12/1988 par Bernard Chalté (Ebersmunster). [Caecilia]
Le buffet
C'est un grand buffet (plus de 5m de large), dont le grand corps a été restauré, et le positif reconstruit, sur le modèle original (1852) en 1988. Certains ornements du grand buffet (claires-voies, corniches, vases...) avaient souffert et ont été restaurés.
Le dessin est dû à Antoine Ringeisen, le célèbre "architecte d'arrondissement" de Saverne. [PMSSTIEHR]
Le dessin du buffet fut repris, sans positif de dos à Boofzheim. La maison Stiehr le trouvait assurément très réussi, puisqu'il figura en emblème sur son papier à entête à partir de 1854.
Caractéristiques instrumentales
C | c | c' | c'' |
1'1/3 | 2' | 4' | 8' |
1' | 1'1/3 | 2'2/3 | 5'1/3 |
2/3' | 1' | 2' | 4' |
1/2' | 2/3' | 1'1/3 | 2'2/3 |
Console en fenêtre frontale. Tirants de jeux de section carrée à pommeaux tournés munis d'un disque blanc (ressemblant à ceux de pédale de l'orgue de Barr), disposés en deux fois deux colonnes de part et d'autre des claviers. Claviers blancs. Etiquettes manuscrites de 1988, l'une, disposée en haut à gauche, servant de "plaque d'adresse" :
Ordre des tirants à la console :
mécanique d'origine pour le grand-orgue et la pédale.
Sommiers à gravures, tous d'origine (y-compris au positif), restaurés en 1988.
Deux sommiers diatoniques pour le grand-orgue :
Le positif est également diatonique :
La pédale est logée sur deux sommiers diatoniques, orthogonalement au grand axe, le long de l'arrière de flancs du buffet.
Les Principaux sont en étain à 75%, les Flûtes métalliques en étain à 35%. Les basses sont généralement en bois. Les Bourdons sont à calottes soudées. Les jeux d'anches ont (comme à l'origine) des résonateurs en étain, sauf l'Ophicléide, en sapin, qui a été reconstruit sur le modèle de Bischoffsheim (1848).
La tuyauterie est de grande qualité (on a l'habitude, avec Stiehr), et... le reste aussi. La reconstruction par la maison Muhleisen en 1988 a donné à cet instrument un "poli" qui fait souvent défaut aux orgues Stiehr (qu'on aime bien, mais dont il faut bien avouer qu'ils sont parfois un peu "rustiques" et tiennent quand même plus du sabot que de l'escarpin). Le phénix revient de loin. Son sauvetage, en 1985-88, tient du miracle. Cet orgue Stiehr a toujours eu très bonne presse ; de fait, il a une forte personnalité, il est très attachant, et sonne fort bien. Tellement bien qu'on enrage à chaque fois qu'on pose le regard sur le petit pédalier de 18 notes, dont l'absence d'extension prive cet instrument d'une grande partie du répertoire. Joliment réglé et entretenu comme il l'est aujourd'hui, il permet de s'imaginer comment était un Stiehr... quand il était neuf. On ne s'étonne plus, du coup, des centaines de commandes reçues par la maison de Seltz durant sa longue période d'activité. [Visite]
Sources et bibliographie :
Remerciements à Jean Eblin
Rapport des travaux de restauration, par la Manufactures Muhleisen (15/02/1989 et 15/02/1999)
Compléments historiques et techniques
L'article a été écrit avant l'incendie.
Panneau affiché à la tribune, retraçant l'historique de l'église.
67006763 ; avec une photo de l'inventaire Erfurth montrant l'orgue avant l'incendie, avec ses tuyaux de contrebasse jouant à Atlas sous le plafond.
Pour mémoire ; 1 ligne en tout, renvoyant à 'Stiehr' p. 410
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