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Les orgues de la région d'Ensisheim
Niederhergheim, Ste-Lucie
1917 degr > Dégâts
Orgue authentique (sauf la façade).
Niederhergheim, l'orgue Martin Rinckenbach, le 03/08/2019.Niederhergheim, l'orgue Martin Rinckenbach, le 03/08/2019.

Cet orgue de Martin Rinckenbach a été reçu en 1890. Suite au succès rencontré après la construction de l'instrument le plus célèbre de la maison d'Ammerschwihr, celui de la Collégiale de Thann (1888), Martin Rinckenbach a obtenu de nombreuses commandes. Il construisit alors plusieurs instruments par an, et ceux qui ont été préservés comptent parmi les plus beaux orgues d'Alsace. C'est le cas de celui de Niederhergheim : malgré une histoire marquée par les dégâts dûs aux deux conflits mondiaux, il nous est parvenu dans un état très proche de l'origine.

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L'orgue de facteur inconnu (1717)
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Historique

Un premier instrument "vieux et usé" est attesté à Niederhergheim en 1717. [IHOA] [PMSBERGANTZEL]

C'est Nicolas Boulay qui le démonta, puis le remonta dans la nouvelle église en 1751. Il y eut des réparations, par Christian Langes, entre 1764 et 1779. [IHOA] [PMSBERGANTZEL]

En 1790, "die alte Orgel ist gar zu schlecht" ("le vieil orgue est vraiment trop mauvais"). [PMSBERGANTZEL]

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Historique

En 1792, Martin Bergäntzel fournit un orgue neuf. [IHOA] [PMSBERGANTZEL]

La date ne doit pas surprendre : en Alsace, plusieurs orgues ont été construits entre 1789 et 1792. Après cela, les événements prirent un tour beaucoup plus dramatique : rappelons que Joseph Bergäntzel, fils de Martin, dut fuir les persécutions, et alla se réfugier en Suisse.

On connaît le nom de l'organiste de Niederhergheim en 1825 : Antoine Jelsperger. [PMSBERGANTZEL]

En 1871, l'église fut un nouvelle fois agrandie, et l'instrument prit place dans le nouvel édifice. En 1888, cet orgue nécessitait une réparation d'une telle ampleur que l'on considéra l'achat d'un instrument neuf. [IHOA] [PMSBERGANTZEL]

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Historique

C'est le 17/03/1890 que Niederhergheim reçut l'opus 24 de Martin Rinckenbach. [LR1907] [ITOA] [IHOA] [PMSBERGANTZEL]

Rinckenbach avait proposé de reprendre l'ancien instrument pour le prix du nouveau buffet. Le devis date du 05/03/1888, et c'est Friedrich Wilhelm Sering qui intervint comme expert. Par rapport à un avant-projet, il proposa de remplacer la Trompette 8' de pédale ("Trombonne") par une Gambe 16' ("Violonbass"), pour ne garder qu'une anche de 16' (celle de 8' du grand-orgue pouvant toujours être prise en tirasse). Ce sera une pratique commune par la suite. Ici, Martin Rinckenbach refusa toutefois la suggestion, et préféra garder l'anche de 8' à la pédale. C'est d'ailleurs dans ce contexte qu'il semble avoir proposé la grande Quinte 5'1/3. [PMSBERGANTZEL]

Une première version de devis prévoit, au grand-orgue, un Dolce 8' et une Quintfloete 2'2/3. Le Dolce fut ensuite rayé et remplacé par un Cornet. Mais finalement, à la réalisation, le Dolce fut conservé, et le Cornet prit la place de la Quintfloete 2'2/3. [PMSBERGANTZEL] [ITOA]

L'orgue fut monté dès le 02/12/1889, et reçu le 17/03/1890 par Henri Wiltberger, J. Gerber (curé à Kaysersberg), et deux organistes : Bachmann (Obernai, qui a aussi reçu l'orgue d'Epfig en 1892) et Ruher (Ribeauvillé).

Le Cornet n'est pas qu'anecdotique, mais significatif de l'esthétique ici adoptée : on a voulu ici un orgue fidèle aux traditions romantiques (presque pré-romantiques), et du coup moins "symphonique". On est loin du "spätromantik", et à coup sûr plus proche de Mendelssohn que de Vierne. Rappelons que Martin Rinckenbach a placé un Cornet à Geispolsheim (1888). Il le refera à quelques reprises plus tard : Sélestat (1896), Ensisheim (1897) et probablement Houssen (1897). Mais ces orgues sont déjà conçus dans un esprit fort différent.

On trouvera sur la page consacrée aux compositions des orgues Martin Rinckenbach de 1874 à 1898 plus de détails sur ces évolutions.

Il y eut une réparation, par Joseph Antoine Berger, en 1902. [ITOA]

Les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités en 1917, car la façade inventoriée en 1986 était en zinc. On ne sait pas qui l'a posée. [ITOA]

Il y eut des dégâts lors de la seconde guerre mondiale, qui ont été réparés en 1946 par Georges Schwenkedel. [ITOA]

En 1975, Alfred Kern fit un relevage. [ITOA]

La composition actuelle est donc totalement d'origine : il n'y a jamais eu de modification.

Le buffet

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Le buffet, néo-roman (mais plutôt éclectique), est de Théophile Klem. Il est assez comparable à ceux de Werentzhouse (1889) et de St-Louis-Bourgfelden (1899, soit 10 ans plus tard, c'était donc une tendance "durable"), mais avec deux différences remarquables : les tourelles latérales sont prismatiques (base de demi hexagone) et non plates, et les plates faces sont également doublées dans l'axe vertical, avec pour chacune deux petits arcs de tuyaux en haut.

C'est donc une évolution éclectique et dotée de tourelles en volume du dessin de Buethwiller : trois tourelles séparées par des plates-faces doubles. Il y a une galerie inférieure pour les places-faces, et les couronnements sont très évolués. Les tourelles latérales sont surmontées de clochetons, et les gâbles couronnant les plates face sont d'une incroyable virtuosité. C'est l'un des plus beaux buffets d'Alsace.

Ce visage de gargouille, ornant le culot de la tourelle droite,
est célèbre dans le monde de l'orgue alsacien, car sa photo figure dans l'inventaire de 1986.
Elle a l'air très préoccupée, et regarde de côté, vers les vitraux,
comme pour trouver un chemin pour s'échapper.
Quelqu'un a-t-il posé la Tablature de Weimar sur le porte-partitions ?Ce visage de gargouille, ornant le culot de la tourelle droite,
est célèbre dans le monde de l'orgue alsacien, car sa photo figure dans l'inventaire de 1986.
Elle a l'air très préoccupée, et regarde de côté, vers les vitraux,
comme pour trouver un chemin pour s'échapper.
Quelqu'un a-t-il posé la Tablature de Weimar sur le porte-partitions ?
Voici la gargouille de gauche, à qui il convient aussi de donner une part de notoriété.
Celle-ci a le regard baissé et a l'air vraiment très concentrée.
Un Choral de Franck ?Voici la gargouille de gauche, à qui il convient aussi de donner une part de notoriété.
Celle-ci a le regard baissé et a l'air vraiment très concentrée.
Un Choral de Franck ?

Caractéristiques instrumentales

Composition, 2019
Grand-orgue, 54 n. (C-f''')
C-h en bois, puis aplatissages en ogives ; oreilles
gis'-f''' sur le vent ; entailles droites ; écussons rapportés
C-H en bois, puis aplatissages en ogives ; oreilles
1 octave en bois ; c''-f''' harmoniques ; fis''-f''' sans oreilles ; bouches arquées ; aplatissages en ogives ; au ton
D'origine ; conique ; c'-f''' sans oreilles ; aplatissages en ogives ; au ton ; C-H conduits dans le B8
Etain ; écussons rapportés ; freins à barbe sauf fis''-f''' ; entailles en trou de serrure
Etain ; entailles droites sauf c''-f'''' au ton ; écussons rapportés ; G-f''' sur vent
Etain ; c'-f''' harmoniques ; c''-f''' sans oreilles ; bouches arquées ; aplatissages en ogives ; au ton
Etain ; coupé au ton ; c-cis'' harmoniques ; aplatissages en ogives ; c’-f’’’ sans oreilles
(c'-f''')
Aplatissages en ogives
Aplatissages en ogives
C c
2'2/3 4'
2' 2'2/3
1'3/5 2'
Etain ; c''-f''' harmoniques
Récit expressif, 54 n. (C-f''')
C-H en bois ; entailles en trous de serrure, oreilles
C-H bois, puis cheminées ; oreilles ; aplatissages en ogives
Freins bavettes sauf c''-f''' ; fis''-f''' sans oreilles ; aplatissages en ogives ; c-h à entailles droites, puis au ton ; C-H conduits dans la Rohrfloete
(c-f''')
Freins à barbe sauf fis''-f''' ; entailles en trous de serrure
Etain ; entailles en trou de serrure, sauf fis''-f''' au ton et sans oreilles
c'-f''' harmoniques ; c''-f''' sans oreilles ; aplatissages en ogives ; au ton
Etain ; coupure entre h et c'
Pédale, 27 n. (C-d')
Sapin
Sapin ; ouverte
Etain ; entailles en trous de serrure
En bois ; bouchée
Bois ; douce : rigoles en bois, anches peaussées
Etain
I/P
Transitive
[Visite] [MFoisset] [ITOA] [PMSBERGANTZEL]
Console:

Console indépendante face à la nef, fermée par un couvercle basculant. Tirants de jeux de section ronde à pommeaux tournés et porcelaines, disposés en deux gradins de part et d'autre des claviers. Les jeux du grand-orgue sont repérés par des caractères noirs, ceux du récit sont en rouge, et bleus pour la pédale. Comme souvent chez Martin Rinckenbach, on trouve le grand-orgue en bas, la pédale en haut à gauche, et le récit en haut à droite. Il y a aussi un tirant "Pédale", immobilisé (en haut à gauche), probablement prévu pour un jeu de pédale supplémentaire. Claviers blanc, les deux à frontons droits.

Commande de l'accouplement et de la tirasse par pédales-cuillers à accrocher, repérées par des porcelaines rectangulaires : à gauche I/P ("Koppel I. u Pedale"), à droite II/I ("Koppel II u. I."). La boîte expressive est commandée par une pédale basculante, placée au centre ("Expression"), constituée de deux parties formant un angle. Il est difficile de savoir si elle est d'origine.

Plaque d'adresse du type "Ammerschwihr ondulant" (entre les deux lignes), caractères incrustés en laiton. Ici, le fond est clair (on retrouve ce modèle de plaque sur plusieurs orgues de Martin Rinckenbach, mais avec un fond foncé). Il n'y a qu'un "s" à "Elsas." :

Martin Rinckenbach
Orgelbauer in
Ammerschweier.
Ober-Elsas.
La plaque Rinckenbach à Niederhergheim.La plaque Rinckenbach à Niederhergheim.
Un modillon de la console.Un modillon de la console.

Les modillons ornant l'angle droit formé par le bas de la table et le montant de la console, lorsqu'il existent (c'est réservé aux consoles "haut de gamme"), constituent une façon supplémentaire de personnaliser l'instrument. Ici, ce sont des "vaguelettes". On retrouve le même dessin à Mulhouse, St-Joseph. A Ribeauvillé, ce sont des anges (très élaborés). A Hoenheim, c'est une volute ajourée. A Ste-Marie-aux-Mines, une grande volute en feuille d'acanthe. A Sélestat, c'est une nervure néo-gothique avec un crochet.

Transmission:

Mécanique à équerres.

Sommiers:

A gravures, d'origine. Le nom des jeux est écrit au crayon sur les faux-sommiers.

Tuyauterie:
Une vue sur la tuyauterie du grand-orgue.
A droite, le revers de la façade.
En haut, on distingue les petits tuyaux muets qui ornent la galerie supérieure du buffet.
Les sommiers étant diatoniques, on voit une moitié de la tuyauterie
(le "côté C", où se trouvent les do naturels), plus, en bas à droite,
une partie du Cornet du "coté C#".
De gauche (passerelle) à droite (façade) :
la Trompette, la Mixture à 3 rangs, le Cornet posté en hauteur,
le Piccolo, la Gambe, la Flûte harmonique 8', la Flûte octaviante 4',
le Dolce (conique), le Bourdon 8', le Bourdon 16',
le Prestant et la Montre 8'.Une vue sur la tuyauterie du grand-orgue.
A droite, le revers de la façade.
En haut, on distingue les petits tuyaux muets qui ornent la galerie supérieure du buffet.
Les sommiers étant diatoniques, on voit une moitié de la tuyauterie
(le "côté C", où se trouvent les do naturels), plus, en bas à droite,
une partie du Cornet du "coté C#".
De gauche (passerelle) à droite (façade) :
la Trompette, la Mixture à 3 rangs, le Cornet posté en hauteur,
le Piccolo, la Gambe, la Flûte harmonique 8', la Flûte octaviante 4',
le Dolce (conique), le Bourdon 8', le Bourdon 16',
le Prestant et la Montre 8'.
Une autre vue sur la tuyauterie du grand-orgue.
Cette fois depuis la passerelle centrale séparant les deux sommiers,
donc vers le fond de l'orgue. On voit donc la face "avant" des tuyaux du "coté C#".
On distingue les aplatissages en ogive du Bourdon (rang de 8') du Cornet,
et les calottes mobiles. Derrière lui, quelques sommets du rang de 4'.
Devant le Cornet, la Gambe présente le entailles en trous de serrure
caractéristiques de la facture de Martin Rinckenbach.Une autre vue sur la tuyauterie du grand-orgue.
Cette fois depuis la passerelle centrale séparant les deux sommiers,
donc vers le fond de l'orgue. On voit donc la face "avant" des tuyaux du "coté C#".
On distingue les aplatissages en ogive du Bourdon (rang de 8') du Cornet,
et les calottes mobiles. Derrière lui, quelques sommets du rang de 4'.
Devant le Cornet, la Gambe présente le entailles en trous de serrure
caractéristiques de la facture de Martin Rinckenbach.
Une vue sur la tuyauterie du récit.
Il y a également deux sommiers diatoniques,
mais ici ils sont jointifs pour gagner de la place.
Les aigus sont au centre.
De gauche (jalousies et avant de l'orgue) à droite (fond et accès) :
le Geigenprincipal, l'Octave 4', la Flûte à cheminée 8', le Salicional,
la Voix céleste, la Flûte harmonique 4', le Hautbois.Une vue sur la tuyauterie du récit.
Il y a également deux sommiers diatoniques,
mais ici ils sont jointifs pour gagner de la place.
Les aigus sont au centre.
De gauche (jalousies et avant de l'orgue) à droite (fond et accès) :
le Geigenprincipal, l'Octave 4', la Flûte à cheminée 8', le Salicional,
la Voix céleste, la Flûte harmonique 4', le Hautbois.

En arrivant à la tribune, la plaque d'adresse de Martin Rinckenbach, mais aussi les tirants "Bombarde 16'", "Flûte harmonique 8'" (les deux octaviantes !) constituent une promesse qui place très haut le niveau des attentes de quiconque aime et connaît les instruments symphoniques. L'orgue de Niederhergheim a déjà fourni 130 ans de bons et loyaux services, les 45 dernières sans nécessiter d'intervention majeure. C'est déjà une évaluation factuelle de sa qualité technique. Le fait qu'il ait été conservé authentique en fait un témoin inestimable de la richesse de la facture alsacienne à la fin du 19ème.

Aujourd'hui (2019), l'instrument est très empoussiéré, et a besoin d'une bonne révision, ce qui est parfaitement normal. Mais les promesses de sa plaque d'adresse sont déjà totalement tenues : l'harmonie est préservée, et la "magie" propre aux orgues de cette classe opère d'autant mieux que le contexte (fresques, mobilier) s'y prête idéalement. Vu ses prestations actuelles, on ne peut qu'être enthousiasmé à l'idée d'entendre cet orgue après un bon nettoyage.

Références Sources et bibliographie :

Carte Localisation :

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Immatriculation de l'orgue actuel : F680235001P03
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