L'histoire des orgues à Brunstatt est riche et déjà ancienne. Il y avait probablement un orgue à St-Georges dès la première moitié du 17 ème siècle. L'instrument actuel est un Joseph Rinckenbach, de 1926, qui a malheureusement été transformé en 1955.
Historique
L'hypothèse de l'existence d'un orgue dès 1624 repose sur la nomination d'un instituteur ("ludimoderator"). Or, les fonctions d'enseignement et d'accompagnement des célébrations dominicales étaient très liées. [IHOA]
Historique
Un orgue neuf fut fourni par Joseph Rabiny en 1793. [IHOA] [Barth]
Donc en pleine Révolution... Et l'instrument devait être utilisé, puisque l'instituteur était payé pour ses fonctions de sacristain et d'organiste. [Barth]
Historique
Joseph Callinet posa ici un grand instrument de 28 jeux (3 manuels). Le devis est daté du 19/05/1825, et l'instrument fut reçu le 08/04/1826 par Joseph Britschgi (Altkirch) et Wagner, l'architecte d'arrondissement. [IHOA] [Barth] [PMSCALL]
On a donc remplacé un orgue Rabiny qui n'avait qu'un peu plus de 30 ans. Les faits contredisent souvent les préjugés laissés par l'organologie de la fin du 20ème siècle, qui voulait faire de tous les orgues du 18ème des chefs d'oeuvre, et de tous leurs facteurs des génies.
L'orgue Callinet était un instrument pré-Mollau (où Joseph Callinet affirma son style, en 1833). Il présentait pour l'essentiel les caractéristiques d'un orgue du 18ème, à qui on a enlevé les Tierces. Positif de dos, Cornets, Trompettes : il s'agit bien d'un orgue classique français. La pédale était limitée à 18 notes seulement (cela restera le grand défaut affectant l'orgue alsacien pendant les deux premiers tiers du 19ème). La seule concession au 19ème siècle (déjà bien commencé dans le reste de l'Europe mais alors tout juste naissant en France, qui avait accumulé en facture d'orgues un retard conséquent) se trouve dans le Hautbois de l'écho. L'originalité de la composition se trouve dans les trois dessus de Flûte traverse 8' (une à chaque manuel). Ce (demi-)jeu est complété par deux octaves graves en 4' au grand-orgue et au positif, donc à chaque fois que possible. Toutes les anches du grand-orgue et du positif étaient coupées en basse+dessus.
Le devis reprenait la même composition que celle du devis pour Hirsingue (1825).
Il y eut des travaux, d'envergure ("Umbau") en 1893, incluant un changement de composition. [Barth]
L'orgue Callinet fut détruit le 27/12/1916 lors d'un incendie accidentel. [IHOA]
Historique
C'est en 1926 que Joseph Rinckenbach construisit un orgue neuf pour Brunstatt, l'opus 179 de la maison d'Ammerschwihr (selon la plaque d'adresse). L'instrument est signé "J.Rinckenbach & Cie". Ce fut l'un des premiers (sinon le premier) à voir le retour d'une Tierce 1'3/5 indépendante. [IHOA] [ITOA]
Cet orgue est caractéristique des instruments de cet après-guerre où ont émergé les couleurs néo-classiques, à commencer par une Doublette et un Nasard au grand-orgue. Cette Doublette, très principalisante, est souvent accompagnée d'un dessus de Cornet, mais ce n'est pas le cas ici : il y avait une Tierce indépendante au grand-orgue ! On la retrouvera à Cernay (1928), Le Bonhomme (1928), Wattwiller (1929), Vieux-Thann (1929), Aspach-le-Bas (1929), Uffholtz (1930). C'est le récit qui porte la Fourniture, et une impressionnante dotation en anches (16', 8', 4', Voix humaine et Hautbois), ainsi que les Flûte octaviantes renforçant les aigus démontrent une influence du romantisme français encore plus forte que durant la période 1870-1914. Il est fort dommage que cette Voix humaine ait été perdue !
Il y eut deux interventions de Curt Schwenkedel, en 1950 et 1955. Les impacts sur la composition ont été les suivants : la Gambe du grand-orgue a été éliminée au profit d'une Fourniture, et la Tierce (élément marquant de la composition de 1926) envoyée au récit pour constituer une Sesquialtera, et remplacée par une Cymbale (ces deux jeux étant totalement étrangers à l'esthétique de l'instrument). Le Plein-jeu (romantique) du récit a été éliminé au profit de cette Sesquialtera, constituée avec la Tierce d'origine et une Quinte ajoutée. Toujours au récit, une nouvelle Fourniture a remplacé la Voix humaine, constituant la perte la plus lourde de cette altération. A la pédale, c'est probablement une Gambe qui fit les frais de la pose d'une "Basse 4'". [IHOA] [ITOA] [SBraillon]
En plus de ces changements de composition fort dommageables, bon nombre de jeux d'origine ont subi une réharmonisation. [Visite]
En 1991, il y eut un relevage, par Christian Guerrier. [IHOA]
Aujourd'hui (2015), l'instrument fait preuve de nombreuses qualités, mais mériterait vraiment une réharmonisation globale dans son style original. [Visite]
Caractéristiques instrumentales
Console indépendante face à la nef, fermée par un rideau coulissant. Tirage des jeux par taquets basculants (du même type qu'à Schweighouse-près-Thann) disposés en ligne au-dessus du second clavier. Claviers blancs à joues droites. Commande double des accouplements : manuellement par languettes basculantes, disposées des deux côtés des claviers : à gauche les "unissons" : "II/PED.", "I/PED.", "II/PED." et à droite les accouplements à l'octave : "II/I 16'", "II/I 4'", "I/4'", "T". Commande dupliquée au pied, par pédales-cuillers à accrocher, en fer forgé, repérées par des porcelaines rondes : de gauche à droite : "IIg.-I" (II/I 16'), "IIa.-I" (II/I 4'), "II/PED. 4'", "I/4'", "I-P.", "II-P.", "II-I" (les deux porcelaines "4'" sont d'un type différent des autres, plus récent). Vient ensuite la pédale basculante du crescendo ("Crescendo"), celle de l'expression du récit ("Expression"), appel du grand-orgue ("G.O."), l'appel des anches ("Anches") et des mixtures ("Mixtures"). Les deux dernières ont l'air écrites à la main. La pédale commandant le trémolo ("Tremolo") est complètement à gauche (sic, dans une position peu commune) et paraît avoir été intercalée entre le montant et "IIg.-I" (elles n'ont pas le même écartement que les autres). La cuiller du trémolo est aussi d'un type différent des autres.
Commande des aides à la registration par poussoirs blancs disposés sous le premier clavier : "COMB.I" (combinaison libre, programmée par des languettes disposés au-dessus de chaque taquet de commande des jeux), "0" (annulateur/retour à la registration manuelle), puis les combinaisons fixes : "P.", "MF.", "F.", "TT.". Voltmètre, placé à gauche des taquets de jeu.
Plaque d'adresse de Rinckenbach placée verticalement, à droite du premier clavier, lettres en laiton incrusté :
La maison Schwenkedel, suite aux importants travaux de 1955, a apposé une plaque de l'autre côté de la console, à gauche du premier clavier. Elle est en plastique noir à lettres blanches :
Evidemment, le terme "restauration" n'avait pas du tout la même signification qu'aujourd'hui (i.e. retour à une configuration antérieure, datée, avec mise en retrait du restaurateur par rapport au travail originel). Notons que des maisons moins scrupuleuses que Schwenkedel remplaçaient parfois purement et simplement les plaques, ou, au contraire, ne signaient pas leurs "baroquisations". Bien que la modification de 1955 se soit révélée avec le recul particulièrement regrettable, celle-ci a été honnêtement assumée. L'instrument paraît avoir gardé tout son potentiel, et pourrait probablement, aux mains d'une équipe compétente, retrouver toutes ses qualités originales.
Sources et bibliographie :
Données techniques.
im68001550
Localisation :