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Les orgues de la région de Mulhouse
Mulhouse, église réformée St-Jean
Buffet classé Monument Historique, 18/12/1992.
L'orgue Kern de Mulhouse, St-Jean, dans son buffet de 1766
dû à Jean Etienne Malade et peut-être Anton II Ketterer.
(Voir l'attribution des .)
Toutes les photos de la page sont de Roland Lopes, 12/12/2009.L'orgue Kern de Mulhouse, St-Jean, dans son buffet de 1766
dû à Jean Etienne Malade et peut-être Anton II Ketterer.
(Voir l'attribution des buffets des orgues Silbermann.)
Toutes les photos de la page sont de Roland Lopes, 12/12/2009.

Cet orgue construit en 1972 par Alfred Kern est une réplique (à part la tirasse grand-orgue) d'un instrument construit par Jean-André Silbermann en 1766 pour l'église paroissiale St-Etienne de Mulhouse. L'histoire commence dans l'ancienne église (qui est aujourd'hui Ste-Marie-Auxiliatrice).

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L'orgue George Wegmann,
1835
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Historique

Un premier orgue avait été posé en 1788 par Johann Jacob Brosi dans la vieille église ("D'alte Kirch", ou encore l'ancienne église des Franciscains, dont le chœur a été le premier lieu de culte de l'église réformée de Mulhouse). Hans Jacob Brosius ou Prosi - l'orthographe est très variable - est est né en 1748. C'était le fils de Peter Friedrich Brosi (1700-1764), compagnon d'André Silbermann de 1730 à 1734 (il travailla à Colmar). Fort peu estimé par Jean-André, il travailla ensuite pour Rohrer, avant de s'établir à son compte à Bâle. Brosi fils s'installa après 1799 au Pays de Bade. En 1812, les catholiques devinrent propriétaires son orgue. L'édifice actuel, d'abord connu sous le nom d'église réformée française, a été construit entre 1831 et 1836. Il prit le nom d'église (réformée) St-Jean en 1934. En 1835, George Wegmann y plaça un orgue neuf, qui connut une genèse assez chaotique. [IHOA] [PMSWEG]

En effet, en avril 1835, le pasteur Pierre Tachard sollicita cinq facteurs d'orgues : la maison Stiehr, Joseph Callinet, Claude-Ignace Callinet, Valentin Rinkenbach et George Wegmann "rue Finkwiller, cul-de-sac St-Marc, n°6". Tout cela pour un petit orgue à un seul manuel... Wegmann fit parvenir son devis en premier (I/P 10j, avec une pédale "décorative" de 15 notes seulement) le 30/04/1835. Joseph Callinet ne répondit pas. Stiehr (I/0P 7j) et Claude-Ignace Callinet étaient plus chers que Rinkenbach (I/P 15j) et Wegmann. Valentin Rinkenbach produisit un second devis, pour un orgue plus petit (I/P 11j). [PMSSTIEHR] [PMSWEG]

Bien que ce fut une toute petite affaire, le pasteur Tachard, avec sa "Commission des orgues", usa d'une méthode assez originale pour faire la meilleure affaire possible (en fait, la moins coûteuse) : avec les devis détaillés qui lui avaient été remis, il élabora une composition en agrégeant les composants les moins chers des différentes propositions ! Il imposa la chose hybride à Wegmann, facteur que l'on devine "pragmatique" et qui savait probablement que les promesses intenables n'engagent que ceux qui y croient. Il y eut des retards, puis des surprises liées à la logistique. Une fois sur place, l'orgue ne fut pas près de servir : les travaux encore en cours (déplacement de bancs) avaient créé des nuages de poussière. "Quelques jours" de délai étaient à prévoir... qui devinrent rapidement plusieurs semaines. La "bonne affaire vite réglée pour un orgue pas cher" passa radicalement du frottage de mains au ratage complet. [PMSWEG]

En 1848, on appela Bernhard Merklin de Mannheim pour réparer (en fait, probablement, pour achever) le petit orgue Wegmann. L'organiste Ch. Th. Wenning demanda à nouveau des transformations dès 1853, parce qu'évidemment, malgré le remplacement du "Laricot" par un Salicional, l'instrument ne donnait pas du tout satisfaction. [PMSWEG]

L'ancienne église protestante St-Etienne de Mulhouse a été démolie en 1858. Et pendant les travaux de construction du nouvel édifice (1858-1866), l'orgue Silbermann a été entreposé ici, dans les combles de l'église réformée française. Une fois la nouvelle église réformée St-Etienne achevée, il était absolument hors de question d'y remettre le vieil instrument : on avait le projet d'acquérir un grand orgue Walcker neuf. L'instrument entreposé dans les combles était inutile, vu qu'on disposait toujours du petit orgue Wegmann...

L'aubaine se présenta en 1867 : on déménagea l'instrument de Wegmann à St-Laurent de Sausheim, où, une fois l'église achevée, il n'y avait plus de sous pour l'orgue... [PMSWEG]

L'orgue Wegmann y fut détruit par faits de guerre le 27/01/1945. [PMSWEG]

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Historique

Une fois débarrassé de l'instrument de Wegmann, on put enfin entériner l'acquisition, en 1867, de l'orgue Jean-André Silbermann, 1766, de Mulhouse, église réformée St-Etienne. Le remontage fut assuré par un certain Froelich. [IHOA]

Notons que l'instrument avait déjà été profondément modifié quand il était à St-Etienne : dès 1811, l'organiste Jacques Kohler avait demandé des réparations. Le son du Cromorne, à l'époque, était tellement choquant que Kohler pensa qu'il était abîmé, car il demanda qu on lui "redonne le ton du basson". [MulhouseStEti1966]

Joseph Henry, de Thann, est intervenu en 1822. Puis Théodore Sauer proposa des transformations en 1830. En particulier, la Cymbale était déjà devenue insupportable : "...die Cimpal zu suprimiren, welches ein gellendes Register ist". ("Supprimer la Cymbale, ce jeu strident".) [MulhouseStEti1966]

Malgré ces modifications (qui ne furent peut-être pas réalisées), lors du remontage de l'orgue, de sérieux doutes commencèrent à surgir sur la pertinence de l'opération : "Die Orgel ist nach dem alten Styl, also eng mensurirt, und enthielt meistens nichts als kleine 1 une 2 füssige Register, nebst einer Menge Mixturen." ("L'orgue est de style ancien, avec des tailles étroites, et ne contient pratiquement que des petits jeux de 1' ou 2', avec une quantité de Mixtures.") Il était clair que dans le contexte de l'époque, cet instrument allait être totalement inadapté. [MulhouseStEti1966]

Et il n'était pas seulement inadapté musicalement, mais aussi par les dimensions de son buffet, élancé et conçu pour un volume de grande hauteur. Pour le remonter, il a fallu supprimer le fleuron, et réduire la hauteur du soubassement. Et bien sûr refaire la transmission et la soufflerie. [MulhouseStEti1966]

Il y aurait eu des travaux conséquents de la maison Walcker dès 1877. Mais les archives Walcker ne conservent aucun numéro d'opus pour Mulhouse en 1877. [IHOA] [MulhouseStEti1966]

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Historique

En 1886, l'orgue a été reconstruit par la maison Dalstein-Haerpfer. [IHOA] [MulhouseStEti1966]

A nouveau, assez peu de détails sont disponibles sur ces travaux.

A priori (vu la date) l'orgue est resté mécanique. Dans les publicités de la maison Haerpfer, il est indiqué "Mulhouse, E[glise] P[rotestante], Haut-Rhin, 28 registres". Cela correspond bien à la disposition à deux claviers connue comme "disposition 1910". [OSchmitt]

S'il est clair qu'en 1910, toute la partie instrumentale avait été totalement remplacée, il est bien difficile de dire en quoi ont consisté les travaux de 1877, 1886 et 1910. On peut imaginer qu'on commença par changer des jeux. Il est possible que l'orgue ait été muni d'une console indépendante mécanique. Mais beaucoup de zones d'ombres subsistent. Si on comprend qu'on soit aller chercher Walcker en 1877 (suite au succès de leur orgue de 1866 à l'église réformée St-Etienne), et qu'on redemanda à la maison de Ludwigsburg de reconstruire l'instrument avec des techniques plus modernes en 1910, il est curieux de constater qu'on lui a préféré la maison Dalstein-Haerpfer entre les deux.

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Historique

En 1910, le temple St-Jean reçut un orgue d'exception : l'opus 1540 d'Eberhard Friedrich Walcker. [SiteWalcker]

L'orgue de l'église réformée française de Mulhouse vers 1910.
Image restituée à partir d'une photo, don de la famille Mieg,
figurant dans l'album Risler II, et conservée aujourd'hui au musée historique.
Le résultat est plutôt harmonieux : le buffet est même plus joli sans son prétentieux fleuron,
et, même s'il n'a plus les "délicieuses proportions traçables uniquement au compas et empreintes de symbolisme"
(comme ont seriné les hagiographes de Silbermann en parlant des dessins de ses buffets)
il n'y a vraiment rien de choquant, et cette installation - qui était un sérieux défi -
était très réussie, contrairement à ce qu'on a essayé de nous faire croire par la suite.L'orgue de l'église réformée française de Mulhouse vers 1910.
Image restituée à partir d'une photo, don de la famille Mieg,
figurant dans l'album Risler II, et conservée aujourd'hui au musée historique.
Le résultat est plutôt harmonieux : le buffet est même plus joli sans son prétentieux fleuron,
et, même s'il n'a plus les "délicieuses proportions traçables uniquement au compas et empreintes de symbolisme"
(comme ont seriné les hagiographes de Silbermann en parlant des dessins de ses buffets)
il n'y a vraiment rien de choquant, et cette installation - qui était un sérieux défi -
était très réussie, contrairement à ce qu'on a essayé de nous faire croire par la suite.

Malheureusement, les données sur l'instrument figurent dans le volume 23 des "Opus Bücher" de la maison Walcker... le seul qui ne soit pas disponible. [SiteWalcker]

Une fois de plus, c'est Georges Schwenkedel qui vient au secours de ceux qui tentent de retracer l'histoire des orgues en Alsace. Un rapport de visite à la "franz. Kirche Mulhausen", datant de la fin 1941 donne la composition de l'orgue Dalstein Haerpfer / Walcker. D'autres détails viennent de notes prises le 18/03/1944 pour préparer un devis. (L'édifice est cette fois appelé "St. Johann Mulhausen".) Il y a également des notes datées du 29/04/1948 : [SchwenkedelNB]

La composition relevée par Schwenkedel indique également une "Basskoppel" (qui n'est pas une tirasse, celles-ci étant décrites explicitement). Cela peut signifier un appel/annulateur de la pédale (P/P) ou une pédale piano automatique.

Il est bien difficile de dire ce qui a été conservé de Dalstein-Haerpfer. D'ailleurs, à la lecture de la seule composition, on ne peut pas se douter qu'il s'agissait d'une reconstruction.

En 1941, 1944 et 1948, avec la montée du "néo-classique", plusieurs projets pour modifier et agrandir l'orgue ont été envisagés, comme en attestent les notes de Georges Schwenkedel. [SchwenkedelNB]

- En mars 1944, le plus urgent était... de remplacer le Cor anglais par un Cromorne. (Vu la date, peut-être juste parce qu'il était anglais. Ou plus sérieusement parce que les jeux à anches libres faisaient trop "harmonium" pour le goût de l'époque.) Mais aussi la Gambe du grand-orgue par un Nasard, et d'ajouter une Tierce et un Larigot au récit pour commencer sa transition en "positif"... Il était aussi prévu de re-plaquer le pédalier, et ça, c'est intéressant, car cela démontre que l'orgue avait été très utilisé. Or, il faut souligner qu'à part une réparation aux commandes des accouplements à l'octave, il y n'y avait AUCUN problème de transmission : la pneumatique marchait très bien et donnait toute satisfaction. Une preuve de plus que sa prétendue fragilité est clairement de la désinformation. [SchwenkedelNB]

- En mars 1948, il était envisagé de ré-harmoniser les Principaux, de remplacer la Gambe du grand-orgue par un 2'2/3 et la Voix céleste par un 1'3/5, le Cornet par une Mixture, de renouveler la Mixture du récit (sûrement placer une Cymbale à la place), et d'ajouter un Larigot et un Clairon.

- En avril : il sera construit un petit sommier supplémentaire de 2 jeux, mais cette fois pour... une Régale 4' (et pas un Clairon) et un Larigot. Il est confirmé que la Mixture du récit devait être une Cymbale. [SchwenkedelNB]

Apparemment, aucune de ces altérations n'a été réalisée. Même si cet orgue post-romantique est aujourd'hui perdu (sacrifié sur l'autel du néo-baroque sous les applaudissements des hagiographes de Silbermann se réjouissant de voir démolir un orgue de valeur "de l'autre camp"), on peut se consoler en pensant qu'il n'a jamais été mutilé : c'est intègre et entier qu'il a été envoyé à la chaudière et a rejoint le paradis des orgues. Là où il n'y a pas de clés pour accéder aux tribunes, et où les vrais amateurs d'orgues pourront le jouer avec passion, quand l'heure sera venue.

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L'orgue Alfred Kern,
1972 (instrument actuel)
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Historique

En 1972, Alfred Kern construisit un orgue néo-baroque neuf, toujours dans le buffet ancien, avec la même composition que le Silbermann de 1766. [IHOA]

Et voilà : on a inventé la tribune par terre. Sans même la proposer au concours Lépine.
Il fut une époque où on avait des orgues en fa. Aujourd'hui on les a au sol, et ils ont l'air assis.
Evidemment, une partie du public est TRÈS près du positif.
Or, les orgues, c'est comme les tableaux impressionnistes : c'est beaucoup mieux avec du recul.
Les auditeurs perturbés par un son de l'orgue complètement déformé peuvent se consoler
en se disant que pour l'organiste, coincé entre la console et le positif, c'est encore pire...Et voilà : on a inventé la tribune par terre. Sans même la proposer au concours Lépine.
Il fut une époque où on avait des orgues en fa. Aujourd'hui on les a au sol, et ils ont l'air assis.
Evidemment, une partie du public est TRÈS près du positif.
Or, les orgues, c'est comme les tableaux impressionnistes : c'est beaucoup mieux avec du recul.
Les auditeurs perturbés par un son de l'orgue complètement déformé peuvent se consoler
en se disant que pour l'organiste, coincé entre la console et le positif, c'est encore pire...
L'arrière de l'instrument, avec la clôture de pédale.
A noter, les tirants de registres du positif,
situés dans le dos de l'organiste,
pour qu'il ne puisse pas les attraper.L'arrière de l'instrument, avec la clôture de pédale.
A noter, les tirants de registres du positif,
situés dans le dos de l'organiste,
pour qu'il ne puisse pas les attraper.

L'orgue a été inauguré le 04/05/1972 par Marc Schaefer (Strasbourg, conservatoire) et Maurice Moerlen (Colmar, conservatoire) : présentation de Marc Schaefer ; œuvres de Sweelinck, Lambert Chaumont, (Jean-Adam) Guilain, Muffat et J.S. Bach. [Programme1972]

Caractéristiques instrumentales

Transmission:

Mécanique suspendue et à balanciers, de 1972.

Sommiers:

Sommiers à gravures, de 1972.

Tuyauterie:

De Kern, 1972. L'orgue est accordé 3/4 de ton en dessous du diapason normal.

Sites Webographie :

Références Sources et bibliographie :

Carte Localisation :

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Immatriculation de l'orgue actuel : F680224002P05
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