Accueil
Candide
Jeux
Architecture
Esthetiques
Facteurs
Avant18
Bergantzel
Callinet
Dubois
Herbute
Moeller
Rinckenbach
Silbermann
Stiehr
Waltrin
Repertoire
Bas-Rhin
  Strasbourg
Haut-Rhin
Credits
An2000
An2001
Photo
~ Les orgues de la région de Strasbourg ~

Strasbourg, St Paul
Eberhard-Friedrich WALCKER, 1897

Partie instrumentale classée Monument Historique le 14/04/1987
Buffet classé Monument Historique le 14/04/1987


Avant... WALCKER Après...

Composition, 2004
Grand-orgue
56 notes
Positif
56 notes
Récit expressif
56 notes
Pédale
30 notes
Montre 16' Quintaton 16' Bourdon 16' Principal basse 32'
Flûte majeure 16' Salicional 16' Diapason 8' Principal 16'
Montre 8' Montre 8' Cor de nuit 8' Soubasse 16'
Bourdon 8' Flûte harmonique 8' Flûte harmonique 8' Contrebasse 16'
Flûte ouverte 8' Quintaton 8' Viole de gambe 8' Bourdon 16'
Flûte harmonique 8' Salicional 8' Voix céleste 8' Grande quinte 10'2/3
Gemshorn 8' Unda maris 8' Aéoline 8' Octave 8'
Violoncelle 8' Fugara 4' Principal 4' Bourdon 8'
Grosse Sesquialtera 5'1/3+3'1/5 Flûte 4' Flûte octaviante 4' Violoncelle 8'
Prestant 4' Gemshorn 4' Nasard 2'2/3 Grosse quinte 5'1/3
Flûte à cheminée 4' Nasard 2'2/3 Flageolet 2' Prestant 4'
Quinte 2'2/3 Doublette 2' Tierce 1'3/5 Bombarde 16'
Doublette 2' Tierce 1'3/5 Piccolo 1' Trompette 8'
Tierce 1'3/5 + Septième 1'1/7 Larigot 1'1/3 Cornet 2-5 rgs Clairon 4'
Cornet 5 rgs Cornet 3 rgs Plein-jeu 3 rgs I/P (8', 4')
Grande Fourniture 2-3 rgs Fourniture 2 rgs Bombarde 16' II/P (8', 4')
Fourniture 4 rgs Plein-jeu 4-5 rgs Trompette 8' III/P (8', 4')
Cymbale 3 rgs Trompette 8' Clairon 4'  
Bombarde 16' Basson 8' Basson/Hautbois 8'  
Trompette 8' Cromorne 8' Voix humaine 8'  
Clairon 4' III/II (16', 8', 4') Trémolo  
I/I (16', 4')      
II/I (16', 8', 4')      
III/I (16', 8', 4')      

     L'église St-Paul date de 1897 : elle était destinée à abriter les cultes pour la garnison allemande. La réalisation de l'orgue a fort logiquement été confiée au facteur allemand le plus célèbre de l'époque : Eberhard-Friedrich WALCKER (Opus 777). L'instrument fut achevé en même temps que l'édifice : 1897. Il était évidemment, à l'origine, d'esthétique "romantique allemande" pur sucre. Son destin se trouve souvent résumé en une incroyable liste de Compositions notées à des dates diverses (et souvent contradictoires et/ ou mal datées). C'est, de façon ici très exacerbée, l'histoire caractéristique des orgues "de ville", très en vue, pour lesquels chaque titulaire, chaque expert, a eu une idée géniale qu'il a cru bon de devoir mettre en pratique. Si certains ont voulu y voir un témoin de l'évolution de la facture d'orgues alsacienne, voire franco-allemande - voire européenne - il est à l'évidence plus juste de le considérer comme une exception, un terrain d'expérimentation et d'affrontement entre "experts", et, on le verra, comme un cauchemar de facteur d'orgues.

L'orgue Walcker de St-Paul, le 20/05/2004.

     L'instrument avait à l'origine 54 ou 58 Jeux, servis par une traction pneumatique, les Sommiers étant à Pistons (Cônes) (Kegellade). Son titulaire, entre 1897 et 1939 est très célèbre, puisqu'il s'agit d'Emile RUPP, le principal instigateur de la Réforme alsacienne de l'Orgue.

Ce n'est pas Rupp, mais Ernst MÜNCH (Strasbourg, St-Guillaume) et Wilhelm SERING (professeur de musique à l'Ecole Normale de Strasbourg) qui conçurent l'instrument. L'orgue fut inauguré en même temps que l'église, le 09/05/1897.

Voici la Composition en 1897 :

Composition, 1897
Grand-orgue
56 notes
Positif
56 notes
Récit expressif
56 notes
Pédale
27 notes
Principal 16' Salicional 16' Bourdon 16' Principal 32'
Flûte majeure 16' Principal 8' Principal 8' Principal 16'
Principal 8' Quintaton 8' Bourdon 8' Soubasse 16'
Bourdon 8' Bourdon double 8' Flûte pointue 8' Basse majeure 16'
Flûte double (ouverte) 8' Flûte de concert 8' Fugara 8' Bourdon doux 16'
Salicional 8' Viole d'amour 8' Aéoline 8' Violoncelle 16'
Viole de Gambe 8' Dolce 8' Voix céleste 8' Stentorbass 16' (hp)
Gemshorn 8' Stentorfloete 8' (hp) Prestant 4' Octavebasse 8'
Stentorgamba 8' (hp) Prestant 4' Flûte douce 4' Flûte 8'
Prestant 4' Flûte traverse 4' Fugara 4' Violoncelle 8'
Flûte à cheminée 4' Voix angélique 4' Harmonia aethera 3 rgs Prestant 4'
Gemshorn 4' Piccolo 2 rgs (2') Trompette harmonique 8' Posaune 16'
Quinte 2'2/3 Cornet 4-5 rgs (D) Hautbois 8' Trompette 8'
Doublette 2' Trompette 8'    
Mixture 6 rgs (4') Clarinette 8'    
Basson 16'      
Posaune 8'      
La Composition originale n'est pas certaine, car déjà celles d'Oskar Walcker et de Rupp diffèrent. D'ailleurs, le nombre de Compositions différentes publiées pour cet orgue à différentes époques (souvent contradictoires) est absolument étonnant.

     Il y avait, comme à St-Maurice, l'église catholique de garnison, trois Jeux à Haute Pression (250 mm) : la Stentorgamba du Grand-orgue, la Stentorfloete du Positif et la Stentorbass de la Pédale. L'édifice était en effet consacré à l' "édification" régulière de 3000 militaires... Les Jeux "normaux" étaient quand même "poussés" à 130 mm.

     Le jeune Rupp (il avait 25 ans quand il fut nommé titulaire, en Juillet 1897) a étudié auprès de Joseph REINBERGER à Munich, et de Charles-Marie WIDOR à Paris. Autant dire que l'esthétique du "Walcker" originel ne devait guère lui plaire, lui qui ne rêvait au fond que de CAVAILLE-COLL. Pour les facteurs "historiques", il n'existait à peu près qu'une référence : SILBERMANN.

Mais Rupp avait sous les doigts un instrument conçu... pour l'armée impériale.

Pour Rupp, il fallait un instrument "de 80 à 100 jeux au moins". A 58, il a été paradoxalement peu servi... Et Rupp avait horreur des Jeux à haute pression, une horreur qui alla jusqu'à lui faire un article ("Hochdrück", 1899, dans "Zeitchrift für Instrumentenbau") pourfendant ce genre d'esthétique. L'instrument était globalement "trop gambé" (les tailles étaient trop étroites, les Jeux pas assez flûtés) et les Jeux d'Anches ne lui donnaient à l'évidence pas satisfaction, ni en nombre, ni en esthétique.

Dès 1899 (premier record pour cet instrument : il resta authentique moins de 2 ans) Rupp obtint que la Maison Walcker procède aux travaux visiblement "indispensables". C'était d'ailleurs une condition qu'il avait requise pour accepter le poste :

  • Ajout de trois Clairons (au Grand-orgue, au Récit et à la Pédale) et d'un Basson 8' (au Positif).
    Les trois Jeux à haute pression ne survécurent pas longtemps à la nomination de Rupp : ils firent les frais de l'installation ces Anches. Le Clairon du Récit fut ajouté sans retrait d'un autre Jeu.
  • Transfert au Grand-Orgue du Dessus de Cornet (posté) du Positif. Au Positif, il fut remplacé par une Mixture de 5 rangs.
  • Ajout d'un Plein-jeu de 6 rangs au Grand-orgue (la Mixture originale étant très grave, puisque fondée sur 4 pieds).
  • Ajout d'un Piccolo au Récit.

Voici l'orgue en 1899, avec 61 Jeux :

Composition, 1899
Grand-orgue
56 notes
Positif
56 notes
Récit expressif
56 notes
Pédale
27 notes
Principal 16' Salicional 16' Bourdon 16' Principal 32'
Flûte majeure 16' Principal 8' Principal 8' Principal 16'
Principal 8' Quintaton 8' Bourdon 8' Soubasse 16'
Bourdon 8' Bourdon double 8' Flûte pointue 8' Basse majeure 16'
Flûte double (ouverte) 8' Flûte de concert 8' Fugara 8' Bourdon doux 16'
Salicional 8' Viole d'amour 8' Aéoline 8' Violoncelle 16'
Viole de Gambe 8' Dolce 8' Voix céleste 8' Octavebasse 8'
Gemshorn 8' Prestant 4' Prestant 4' Flûte 8'
Prestant 4' Flûte traverse 4' Flûte douce 4' Violoncelle 8'
Flûte à cheminée 4' Voix angélique 4' Fugara 4' Prestant 4'
Gemshorn 4' Piccolo 2 rgs (2') Piccolo 1' Posaune 16'
Quinte 2'2/3 Cornet 4-5 rgs (D) Harmonia aethera 3 rgs Trompette 8'
Doublette 2' Trompette 8' Trompette harmonique 8' Clairon 4'
Mixture 6 rgs (4') Basson 8' Hautbois 8'  
Plein-jeu 6 rgs Clarinette 8' Clairon 4'  
Basson 16'      
Posaune 8'      
Clairon 4'      

     La Console était placée contre le Buffet, c'est-à-dire dans la partie supérieure de la Tribune, qui est double à St-Paul (il y a deux rembardes).

     En 1907, l'instrument a été électrifié (par Walcker ou DALSTEIN-HAERPFER, selon les sources). Une Console électro-pneumatique (supplémentaire?) a été ajoutée, située dans la partie inférieure de la Tribune. C'était une "Ruppsche Normalspieltisch", pathétique tentative de normalisation des Consoles. La pression a été fortement abaissée (entre 90 et 120 mm), et la Soufflerie électrifiée.

En 1912, la Maison Walcker, associée à Charles MUTIN et Dalstein-Haerpfer, porta l'orgue à 65 Jeux, avec des Pressions différenciées.
Charles Mutin était le successeur de Cavaillé-Coll, vers qui allait toute l'admiration de Rupp. (Bien que l'essentiel de son argumentation reposait sur des considérations "Silbermanninennes"...) Bien sûr, Aristide Cavaillé-Coll étant décédé il y a déjà 13 ans, la Maison Mutin-Cavaillé-Coll construisait des orgues fortement éloignés de la grande époque. Mais les matériaux, comme ceux du Walcker d'origine, étaient de qualité.
Autre fait symptomatique : les noms des Jeux furent traduit en Français.

C'est donc ici la deuxième étape d'une évolution souhaitée par Rupp. Il recherchait une "synthèse" (c'était son propre terme) entre les "orgues-mutations" classiques et les instruments romantiques dont les Anches lui paraissaient idéales. Mais bien entedu, ce n'était pas une chose facile, surtout en partant sur la base d'un orgue romantique allemand, et cela en fait une approche bien spécifique de ce qu'on a appelé - plus-tard - le Néo-clacissisme.

En 1917, les tuyaux de façade furent réquisitionnés par les autorités allemandes. Dès 1918, l'orgue reçut une façade "provisoire" en zinc.
En 1919, l'église devint "église réformée Saint-Paul".

Il y eut encore des adjonctions en 1928, et en 1931, le moteur prit feu.

     Dans ce tout début des années 30, l'instrument avait donc besoin de réparations, et l'on souhaitait poursuivre les évolutions dessinées en 1899 et 1912. Rupp était toujours titulaire (il le resta jusqu'à 1947). C'est cette fois à la Maison CAVAILLE-COLL-PLEYEL que l'on confia les travaux (après Mutin, il y eut Lapresté, et Beuchet en était alors directeur ; ensuite, ce fut Convers et finalement Pleyel).
Les Sommiers Walcker furent conservés, mais la tuyauterie ré-harmonisée (élargissement des tailles, par décalage, parfois de 2 tons entiers). Les tuyaux de zinc ont été remplacés par des tuyaux en étain, et la Pédale portée à 30 notes. Les travaux furent achevés en 1934 par une harmonisation complète, menée par HURBAIN (9 mois de travail). Le 11/03/1934 l'orgue a été inauguré par Alexandre CELLIER. Il avait 74 Jeux.

Il manque malheureusement une Plate-face : les tuyaux ont été volés en 2003 pendant des travaux à l'édifice.

     Voici le procès-verbal de réception, tel qu'il fut publié dans "Le lien de l'église St-Paul", n°137, du 01/05/1934 :

Procès-verbal de l'expertise de l'orgue de l'Eglise Saint-Paul à Strasbourg.

Les soussignés, Joseph Erb, professeur au Conservatoire de Strasbourg et organiste de l'Eglise Saint-Jean, Fritz Munch, directeur du Conservatoire, Charles,Muller, professeur au Conservatoire, organiste de l'Eglise Réformée, Emile Rupp, organiste titulaire de l'Eglise Saint-Paul et Alexandre Cellier, oganiste de l'Eglise Réformée de l'Etoile, à Paris, ont examiné avec le plus grand soin l'instrument restauré par la maison Cavaillé-Coll, de Paris.
Après avoir passé en revue tous les jeux de l'orgue, l'un après l'autre et en avoir étudié le rendement dans les différents mélanges d'ensemble et de détail, les experts ont constaté unanimement que, non seulement les clauses et obligations du devis ont été remplies, mais dépassées afin d'atteindre un plus haut degré de perfection artistique. En rendant un hommage particulier aux efforts de la maison Cavaillé-Coll, les experts ont tout spécialement remarqué :
1°- Les profondes modifications apportées dans le caractère des jeux de fonds, dont la dureté et l'aigreur primitives ont fait place à des sonorités à la fois puissantes et moelleuses, d'une variété et d'un caractère en accord avec les meilleures traditions de la facture ancienne et moderne.
2°- L'amélioration et l'harmonisation des mixtures, présentement très claires, se mélangeant parfaitement aux fonds, notamment pour l'exécution des oeuvres classiques.
3°- La belle qualité de l'ensemble des jeux d'anches, soit dans les jeux améliorés, soit dans les jeux neufs.
Le mécanisme de l'ancien orgue, qui fonctionnait de façon très satisfaisante, a été nettoyé et a bénéficié de quelques modifications de détail, concourant, avec la bonne harmonisation des tuyaux, à une attaque d'une précision extrême.
En foi de quoi, les experts peuvent certifier à la paroisse de l'Eglise Staint-Paul qu'elle possède un instrument d'une valeur artistique des plus rares, et adressent, tant à Monsieur Beuchet, directeur de la maison Cavaillé-Coll, qu'à l'harmoniste Monsieur Hurbain, qui a travaillé à l'orgue neuf mois entiers, leurs félicitations les plus chaleureuses.
Strasbourg, le 12 mars 1934.
Signé :
Alex. Cellier
J. Erb
Fritz Munch
Prof. Emile Rupp
Charles Muller.

     L'orgue de 1934 est le plus proche de l'idéal que Rupp recherchait : "la structure sonore de cet orgue, digne d'une cathédrale, est le résultat de la réforme accomplie dans la facture d'orgue française depuis vingt-cinq ans. C'est l'orgue de la tradition Cavaillé-Coll, mais complété par des mutations et des mixtures de l'Ecole de Dom Bedos, de sorte que l'orgue moderne français est apte à rendre dans une même mesure la musique ancienne et moderne".

Mais en pleine vague Néo-classique, les idées de Rupp avaient du mal à se concrétiser. Surtout pour prendre la forme d'un orgue homogène. Peut-être l'a-t-il réalisé à la Synagogue de Strasbourg (quai Kléber) en 1925 (62 Jeux sur 3 claviers). Malheureusement, cet instrument fut en 1940 l'une des innombrables victimes (comme l'édifice) de l'antisémitisme, et il n'est plus là pour témoigner.

C'est ainsi que l'on trouve à St-Paul plusieurs Jeux (surtout des Mutations) caractéristiques de ce qu'il recherchait :

  • Grosse Quinte 5'1/3, Grosse Tierce, Tierce/Septième, Basson 16' et Trompette du Grand-orgue.
  • Quinte 2'2/3, Tierce et Larigot du Positif.
  • Quinte, Flageolet, Tierce, Piccolo, Basson et Voix humaine au Récit. (L'Harmonia aethera 3 rgs 2'2/3 de Walcker s'y trouvait encore en 1986.)
  • La Quinte 5'1/3 de Pédale.

Bien sûr, le plus proche de l'idéal ne signifie pas "idéal" : Rupp, dans une lettre de 1947 à la revue "L'orgue", fait le commentaire suivant :
"il est incroyable combien de rangs de mutations digèrent certaines églises parmi lesquelles je compte surtout notre église Saint-Paul ! L'augmentation progressive des 15 rangs primitifs (1897) à 45 s'y est révélée insuffisante ; on pourrait y aller jusqu'à 60 rangs sans aucun inconvénient !"

Quant aux témoignages, il concordent sur un point : l'instrument était très réussi du point de vue des Fonds et des Anches. Il était donc, de ce point de vue, assez proche de l'esthétique Cavaillé-Coll. Quant aux Mixtures "Silbermanniennes" et aux Mutations patiemment ajoutées, elle ne devaient sûrement pas avoir le rendu prévu. La "synthèse" avait ses limites. Et Rupp n'était pas pleinement satisfait du travail de Hurbain sur les Mixtures, qu'il trouvait d'une "discretion peut-être un peu exagérée".
Il renoncera, finalement, faisant preuve d'une maturité finalement assez exceptionnelle pour son époque : "pour moi, ce ne sont pas les théories abstraites qui comptent, mais le résultat concluant, et c'est pourquoi je préfère un Cavaillé authentique à l'orgue synthétique le plus étudié, fût-ce l'orgue de Saint-Paul".

En 1942, les tuyaux de transmission de la Console supérieure (l'originale) furent volés. On finit par offrir cette Console au Pasteur VALOTTON de St-Dié, en 1956.

En 1947, la Composition donnée par Emile Rupp (et citée à titre d'Exemple) était la suivante :

Composition, 1947
Grand-orgue Positif Récit expressif Pédale
Montre 16' Bourdon 16' Quintaton 16' Flûte (ouverte) 32'
Flûte majeure 16' Montre 8' Diapason 8' Flûte 16'
Montre 8' Bourdon 8' Cor de nuit 8' Soubasse 16'
Bourdon 8' Flûte harmonique 8' Flûte traversière 8' Bourdon expressif 16'
Flûte ouverte 8' Salicional 8' Viole de gambe 8' Grande quinte 10'2/3
Salicional 8' Unda maris 8' Voix céleste 8' Flûte 8'
Gemshorn 8' Fugara 4' Prestant 4' Bourdon 8'
Prestant 4' Flûte douce 4' Flûte octaviante 4' Violoncelle expressif 8'
Flûte à cheminée 4' Gemshorn 4' Viole d'amour 4' Grosse quinte 5'1/3
Nasard 2'2/3 Nasard 2'2/3 Quinte 2'2/3 Fourniture 5 rgs ?
Doublette 2' Quarte de nasard 2' Flageolet 2' Flûte 4'
Tierce 1'3/5 + Septième 1'1/7 Tierce 1'3/5 Tierce 1'3/5 Contre-bombarde 32'
Grand Cornet 3-5 rgs Larigot 1'1/3 Piccolo 1' Bombarde 16'
Cornet 5 rgs (D) Fourniture 4 rgs Cornet 3-5 rgs Basson 16' (Récit)
Grande Fourniture 2-5 rgs Cymbale 3 rgs Plein-jeu 5 rgs Trompette 8'
Fourniture 4 rgs Trompette 8' Cymbale 4 rgs Clairon 4'
Cymbale 4 rgs Basson 8' Bombarde 16' I/P (8', 4')
Bombarde 16' Cromorne 8' Trompette harmonique 8' II/P (8', 4')
Trompette 8' Musette 4' Basson/Hautbois 8' III/P (8', 4')
Clairon 4' III/II (16', 8', 4') Voix humaine 8'  
I/I (16', 4')   Clairon harmonique 4'  
II/I (16', 8', 4')   Trémolo  
III/I (16', 8', 4')      
Il y a pas mal de différences avec ce que l'on pourrait attendre. Correspondent-elles à des erreurs ou des adjonctions mal datées ? Toujours est-il que d'après Rupp :
  • Au Grand-orgue :
    • Il n'y avait pas de Grosse Quinte 5'1/3 et Grosse Tierce 3'1/5, Harmoniques de 16 pieds. C'est là, d'ailleurs, le fond du débat. Rupp était particulièrement attaché à ces Résultantes de 16 pieds.
    • Il y avait un Salicional 8' à la place de la Flûte harmonique 8'.
    • Il n'y avait pas de Violoncelle 8', mais un Grand cornet 3-5 rgs, sur Résultantes de 16 pieds : quinte de 5'1/3, double-octave de 4', Tierce de 3'1/5, double quinte de 2'2/3, triple-octave de 2'.
    • La Grande Fourniture allait jusqu'à 5 rangs et la Cymbale avait 4 rangs.
  • Au Positif :
    • On trouvait l'actuel Quintaton 16' du Récit.
    • Il n'y avait pas de Salicional 16'.
    • Le Bourdon 8' était un Quintaton.
    • Le 2 pieds était une Flûte (c'est actuellement une Doublette).
    • Les Pleins-jeux étaient plus classiquement constitués d'une Fourniture 4 rgs et d'une Cymbale 3 rgs.
    • Il y avait une Musette 4' en plus (19 Jeux quand même, puisque le Salicional l'a remplacée).
    • Notons que la Doublette avait 2 rangs à l'origine.
  • Au Récit :
    • On trouvait l'actuel Bourdon 16' du Positif.
    • L'Aéoline était appelée Voix céleste.
    • Le Cornet allait de 3 à 5 rgs.
    • La Fourniture était à 5 rgs et, elle était complétée par d'une Cymbale 4 rgs.
    • Il y avait une Viole d'Amour 4' en plus (21 Jeux au lieu de 19).
  • A la Pédale :
    • Les fonds ouverts de 32', 16', 8' et 4' étaient considérés comme des Flûtes.
    • Il y avait une contre-bombarde 32', un Basson 16' et une Fourniture 5 rgs en plus, mais pas de Contrebasse 16' (16 Jeux au lieu de 14).
    • Bourdon 16' et Violoncelle étaient placés dans le Boîte du Récit, et donc qualifiés d'"expressifs".

Cette même année (1947), Ernest MUHLEISEN fit des réparations, essentiellement à la Transmission (pendant la guerre, l'orgue avait été victime des intempéries). L'orgue est noté à... 72 Jeux.
Toujours la même année, l'instrument est officiellement confié à un nouveau titulaire : Paul NARDIN, qui le restera jusqu'en 1968. Mais voilà : son idéal d'orgue est résolument Néo-classique.

Emile Rupp mourut en 1948.

     L'orgue de St-Paul avait toujours une excellente réputation auprès des édiles, mais il devait être d'une qualité musicale à l'évidence déplorable. Extrêmement compliqué et bourré de tuyaux, cet énorme patchwork souffrait d'inhomogénéités flagrantes, d'un mauvais rendu sonore, et surtout d'une fiabilité désastreuse.

En 1957, l'orgue tomba en panne en plein concert. Des réparations "de fortune" furent faites par Alfred KERN, commandité par Paul Nardin, trop heureux de l'incident. Kern plaça une Console neuve (en bas ; celle du haut avait été retirée l'année précédente), et rendit muets (faute de moyens et sur instruction) pas moins de 21 Jeux jugés "adipeux" (Réception le 28/01/1959).
Dépité par le peu d'envergure de cette opération (et par l'absence de virage Néo-classique), Paul Nardin insiste sur la laideur (visuelle et sonore) de l'instrument, et estime qu'au rythme des prises de décisions, l'orgue ne pourra pas être rendu convenable avant... 1975. Son pessimisme était justifié, mais sous-estimait encore nettement le délai de presque 20 ans. Entre temps, on échappa à la mode Néo-classique.

En 1983, un projet de restauratoin de "l'orgue Rupp" vit le jour. il s'agissait de remettre l'orgue dans son état de 1934. Le 17/04/1987 le Buffet et la Partie instrumentale de l'instrument ont été Classés Monument historique.

     En 1993, c'est donc l'orgue de Rupp (1934) et non l'instrument originel qui a servi de modèle pour la restauration, menée par la Maison Walcker. Ce fut une opération d'envergure, puisque 5 personnes (dont Richard DOTT, aujourd'hui installé à Sélestat) travaillèrent sur l'instrument durant une période de 6 mois.

La Console a été compétée par un combinateur permettant d'enregistrer 6000 registrations, et un Crescendo général.

A l'origine, la Console était placée de l'autre côté de la ballustrade supérieure.
A droite, vue sur les énormes tuyaux de Pédale. Le plus grand (sur la photo) est le Do# de la Flûte de 32 pieds (dotée d'un Sommier spécifique placé au même niveau que le bas du soubassement). Devant, il y a les tuyaux de la Contrebasse 16'. On distingue aussi quelques tuyaux des autres Jeux de Pédale placés à ce niveau : Soubasse 16', Flûte ouverte 8' et Trompette 8'.

Transmission : électropneumatique.
Le Buffet fait 12 mètres de large. Ses dorures et ornements, ainsi que sa disposition, en font une façade tout à fait exceptionnelle (et on se demande comment elle a pu être ainsi décriée ("palissade") par le passé).
Le Grand-orgue est situé à gauche, le Positif à droite, de Récit étant placé au milieu. La Pédale occupe l'arrière. La Soufferrie est logée dans le Soubassement.
En plus du Combinateur (8 plages de 8 combinaisons + disquettes), il y a un Appel du Tutti et un Crescendo général (61 positions). L'expression du Récit est visualisée par un cardan à 9 positions.

Les Crescendos étant après-tout d'intéressantes écoles de registration, on pourra visualiser ce grand crescendo sur la simulation (dimentionnez largement la fenêtre : le panneau de contrôle se trouve en bas à droite).

Association "Musique et orgues de l'Eglise Réformée Saint-Paul" :
1, place Eisenhower, 67000 Strasbourg. Tel 03 88 35 36 18

Webographie :

Sources :

  • Remerciements à Pierre LAUWERS.
  • Remeriements à Alexis PLATZ.
  • "Le Grand Orgue de la'Eglise Réformée Saint-Paul à Strasbourg", R.DOTT, dossier de la restauration.
  • Plaquette proposée lors des concerts par l'association "Musique et orgues de l'Eglise Réformée Saint-Paul"
  • Etienne JACQUOT, "L'orgue d'Emile Rupp".
  • Plaquette de la "Journée de l'Orgue" du 26/06/1993, organisée par l'Association pour la Formation des Organistes des Églises Protestantes.
  • Paul NARDIN, "Bonnes et mauvaises fortunes d'un Orgue Strasbourgeois", dans "L'Orgue - Histoire, technique, esthétique" N°95, 07-09/1960 et N°96, 10-11/1960.
  • Pierre VALLOTON, "Le testament d'Emile Rupp", dans "L'Orgue - Histoire, technique, esthétique" N°130, 04-06/1969.
  • Plaquette des 4è Journées Nationales de l'Orgue (1991, donc avant la restauration de 1993) (article de Christian LUTZ)

Activités culturelles :

  • Il y a de très nombreux concerts organisés à St-Paul (sur les deux orgues).

Si vous recopiez des éléments de cette page pour des articles, plaquettes ou pages Web, citez vos sources. D'abord par simple honnêteté intellectuelle, mais aussi pour pouvoir pister d'éventuelles erreurs.
Dernière mise à jour : 04/02/2014 12:53:50

F670482073P03