L'orgue de Bettlach est caractéristique de la facture de Joseph CALLINET : le Buffet est de la plus pure tradition du célèbre facteur de Rouffach, et la réalisation de l'instrument toute empreinte de la tradition Callinet (qualité de matériaux, architecture, Composition sonore), même si l'on voit se dessiner les tendances qui amenèrent peu à peu les orgues Callinet vers des instruments pré-romantiques.

Bettlach, l'orgue Callinet. Toutes les photos de la page ont été fournies par Jean-Christophe FLOTA.

Le premier orgue de Bettlach a été construit entre 1781 et 1808, par Jean, Joseph ou Anton FRANZ. Il a été déménagé en 1844 à Geispitzen. Nul doute que si cet instrument était resté à Bettlach, il n'aurait pas connu le sort funeste qu'on lui connaît, puisqu'il est actuellement remplacé à Geispitzen par une machine électronique.

     Si l'orgue Franz a quitté Bettlach en 1844, c'est pour céder sa place à un magnifique orgue de Joseph Callinet.
Son devis est contemporain au jour près de celui de Lutter : 29/10/1843.

Cette date est extrêmement importante dans l'histoire des Callinet, car elle correspond au jour où les deux frères se séparèrent : si Joseph signa encore le reçu de Bourbach-le-Bas "Callinet Frères", il apposa sur le devis de l'orgue de Bettlach une nouvelle signature : "Callinet ainé".

Il y avait eu une première version du devis (l'un des quatre fameux devis imprimés). Dans cette version, l'orgue n'a qu'un clavier. En voici un extrait :

L'instrument fut reçu le 25/10/1844 : l'entreprise de Joseph Callinet continuait à travailler vite et bien, même en l'absence de Claude-Ignace.      La Composition d'origine est l'actuelle. C'est bien un orgue dit "de transition" : il y a une Gambe à chaque plan sonore. Il n'y a plus de Jeu de Tierce. Sur le devis, par rapport à sa jeunesse, Joseph Callinet restreint le Plein-jeu de deux rangs (Fourniture à 3 rangs et absence de Sifflet 1'). (On suivra l'histoire des Plein-jeux de Joseph Callinet à Oltingue.) Il proposait même de construire une Tirasse de Grand-orgue.

     Finalement, au cours de la réalisation, Joseph Callinet resta plus fidèle que prévu à l'orgue classique : il n'y eut pas de Tirasse (mais une remise sur le prix) et une Fourniture de 4 rangs (comme sur le premier devis).

Sur le Buffet, on retrouve bien sûr l'ornement préféré de Joseph Callinet : les angelots. Il y en a deux sur les Culots des Tourelles du grand-orgue, et un cinquième sous le Positif de dos.      Contrairement à la disposition de la façade du Callnet d'Issenheim, il n'y a pas d'angelots sous les Tourelles médianes. Les Culots cylindriques (et ornés) s'achèvent, en bas, sur le plafond de la Console.      Quant au cinquième angelot, celui du Positif, sa différence de facture tend à pourver qu'il n'est pas de Calliet. Il a probablement été placé avec les Jouées en 1943 (voir ci-dessous).

C'est en 1942 que Georges SCHWENKEDEL ajouta un Récit expressif (partageant le clavier du Positif, mais sur un Sommier indépendant). La transmission fut électrifiée (Console indépendante) et la Console en fenêtre de Callinet condamnée. Des Jeux Callinet furent bien sûr victimes de cette transformation. Comme les Buffets de l'orgue étaient à l'origine dépourvu de Jouées, on commanda à cette occasion quatre ce ces ornements au sculpteur Raphaël BRUTSCHY de Ribeauvillé. L'effet était très réussi. Plus que la traction de l'orgue, qui tomba en panne le jour de l'inauguration (30/05/1943).

Voici la Composition à l'issue de cette transformation :

     C'est Gaston KERN qui restaura l'instrument, de 1988 à 1989 : retour à la Composition originale (seuls trois noms de jeux diffèrent : Callinet avait appelé sa Trompette et son Clairon de Pédale "Trombone" et "Trombone alto", et son Salicional du Positif "Viole d'amour", comme il en avait l'habitude).

L'orgue restauré a été inauguré le 16/10/1989 par J.P. REY et la chorale paroissiale.

La Composition est assortie d'un Tremblant (qu'il y avait aussi à l'origine).

Vue de la tuyauterie du Grand-orgue. Au fond, les tuyaux de Montre. On voit parfaitement le Cornet posté, avec ses 5 tuyaux par note, et ses Postages qui amènent le vent. Au premier plan, la Trompette et le Clairon (les plus petits des tuyaux évasés). Entre, on peut voir les Bourdons (tuyaux bouchés, dont les plus grands sont en bois) et les petits tuyaux de la Doublette et de la Fourniture. Les tuyaux étroits sont ceux des Gambes. Le tuyau en bois au tout premier plan appartient à la Flûte 8 pieds de Pédale.

(1) C'est-à-dire avec une "reprise" comme les Mixtures : 4' (bouché) dans la basse, puis chute d'une octave, ce qui fait que le jeu se retrouve en 8' (ouvert) dans les aigus.

Sources :

• Remerciements à Jean-Christophe FLOTA (photos et éléments d'historique).
• Plaquette éditée à l'occasion de l'inauguration du 16/10/1989
• M. BARTH, "Elsass, 'Das Land der Orgeln' im 19. Jahrhundert", AEA XV (1965-66)
• P. MEYER-SIAT, "Les Callinet, facteurs d'orgues à Rouffach, et leur oeuvre en Alsace" ISTRA, 1965
• Caecilia 1989-3-4, article de François FUCHS.
• "Musique et tourisme", plaquette de la DOHA, 2002