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Les orgues de la région d'Altkirch
Eglingen, St-Léger
Orgue authentique.
Eglingen, l'orgue Joseph Rinckenbach.
Toutes les photos sont de Martin Foisset, 13/10/2018.Eglingen, l'orgue Joseph Rinckenbach.
Toutes les photos sont de Martin Foisset, 13/10/2018.

La paroisse d'Eglingen semble avoir été fondée dès le début du 14ème siècle. Après la première guerre mondiale, on ne put sauver de l'ancienne église que la sacristie. La reconstruction du sanctuaire commença le 03/10/1926, et, pour l'orgue, Joseph Rinckenbach le dota en 1930 de l'opus 188 de la maison d'Ammerschwihr. Cet instrument, de style post-symphonique, est logé dans un buffet réalisé par Joseph Driesbach, de Munster.

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L'orgue de facteur inconnu (vers 1793)
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Historique

Un premier orgue serait arrivé vers 1793 (!), en provenance d'Altkirch, Notre-Dame de l'Assomption. [IHOA] [PMSSUND1982]

Le conditionnel est nécessaire, car, on le verra, les sources primaires ne sont pas formelles. Il est possible qu'un instrument était déjà installé à Eglingen avant la Révolution.

Les archives gardent (gardaient ?) la trace d'un payement par le conseil de fabrique, pour racheter un orgue à Altkirch. Ce fut l'occasion de retrouver un de ces délicieux passages où le "calendrier révolutionnaire" est décliné en Allemand. "Dem Bürger Pfarrer als ernannter Commissaire der Fabrique von Altkirch für die ihme abgekaufte alte Orgel laut Quittung vom 18. Nivos 2, bezahlt mit 400 livres." Et : "Item fordert der Bürger Bossringel am 3 vendémiaire 3 fur durch ihn im Namen der Fabrique die zu Altkirch erka." Toutefois, cet extrait des comptes, vu par Pie Meyer-Siat, n'a pas pu être confirmé depuis. [Visite] [PMSSUND1982]

Outre la date, qui peut surprendre, cette donnée peut être contestée par l'examen des panneaux peints que l'on trouve à Buethwiller. On y voit un petit orgue à un manuel, sur le côté duquel on a dessiné l'église d'Altkirch. Le paysage du fond représente Buethwiller. Ce panneau semble donc raconter que l'(ancien) orgue de Buethwiller était celui d'Altkirch. Il est donc possible qu'Eglingen se soit doté d'un autre orgue lors de la Révolution, ou même ait conservé un instrument plus ancien. Surtout que les deux articles, dans les comptes, ont été rayés par la suite, le commissaire aux comptes ayant noté : "vu qu'il n'existe aucune autorisation pour l'achat de l'orgue". Notons que d'autres sources font aller l'orgue d'Altkirch à Berentzwiller. Quoiqu'il en soit, l'instrument disparut en 1858. [PMSSUND1982]

Le panneau de gauche de la tribune de Buethwiller.Le panneau de gauche de la tribune de Buethwiller.

Il est donc possible que l'orgue d'Altkirch alla en fait à Buethwiller, et on ne connaît donc pas l'origine du premier instrument d'Eglingen.

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L'orgue François Antoine Berger,
1858
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Historique

Le deuxième orgue d'Eglingen a été construit en 1858 par François Antoine Berger. [IHOA] [Barth] [PMSSUND1982]

Il a été reçu le 12/08/1858 par François Antoine Ginck (Heimersdorf) et Jean Chrysostome Dietrich. On retrouve Jean Chrysostome Dietrich (21/07/1816 à Reiningue - 20/01/1871) expertisant des orgues à Burnhaupt-le-Haut, Rimbach-Zell, Saint-Bernard, Balschwiller ou Zimmersheim. Il a été ordonné prêtre le 10/08/1841, puis fut vicaire à Soultz de 1848 à 1852, puis à Pfaffenheim jusqu'en 1855 quand il devint curé de Zimmersheim. [PMSSUND1982]

En 1889, il y eut un entretien relativement important, puisque Martin Rinckenbach y travailla du 7 au 23 mai. [PMSSUND1982] [Barth]

L'instrument fut totalement détruit, par faits de guerre, en 1914-1918. L'église actuelle a été achevée en 1927. [IHOA] [PMSSUND1982]

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Historique

En 1930, Joseph Rinckenbach installa à Eglingen l'opus 188 de la maison d'Ammerschwihr. [IHOA] [Barth] [PMSSUND1982]

Le devis a été validé par François-Xavier Mathias le 24/05/1927. [PMSSUND1982]

La composition est caractérisée par une composante clairement "néo-classique" : un couple de Mutations { Nasard + Tierce }, placé au récit. Semblant succéder au Cornet de grand-orgue (que l'on vit revenir dès l'après-guerre), Rinckenbach l'avait déjà placé (justement au grand-orgue) à Brunstatt (1926), à l'orgue du Bonhomme (1928), et au grand instrument de Cernay (1928). A Schweighouse-près-Thann, Nasard et Tierce sont au récit, comme ici (cette solution, qui aura son heure de gloire plus tard, ne semble donc avoir été retenue que deux fois par Joseph Rinckenbach).

On retrouve ce Nasard et cette Tierce au grand-orgue dans de nombreux instruments contemporains de l'orgue d'Eglingen : Wattwiller, Vieux-Thann, Aspach-le-Bas (tous de 1929), Uffholtz (1930) et Balschwiller (1931, son dernier orgue alsacien).

Il y eut une première réception le 04/01/1930. A. Pfrimmer, "expert officiel du gouvernement pour cloches et orgues dans le Haut-Rhin", trouve l'instrument satisfaisant, "cependant le son du premier clavier est légèrement vacillant". (Il met le défaut sur le compte des sommiers.) Il trouve l'harmonisation bonne, mais suggère d'adoucir le Salicional du grand-orgue, afin d'en faire un meilleur accompagnateur des solos du récit. Du coup (ou pour maintenir l'équilibre), on pouvait rendre le Bourdon 8' plus fort, pour remplir son rôle de "Flûte". Il note que "la soufflerie est suffisante", et que "le constructeur se plaint d'avoir eu trop peu de place pour bien disposer son instrument", point sur lequel A. Pfrimmer ne pouvait "pas lui donner tort". [EglingenPVR]

Une seconde réception eut lieu le 17/04/1930. Cette fois, l'expert est satisfait, et indique que "le vent pour le premier clavier est maintenant suffisant et sa pression stable", confirmant que le problème trouvait son origine dans la soufflerie, et pas les sommiers. [EglingenPVR]

L'instrument a bénéficié de réparations (sur place), en 1987, par Michel Gaillard (pour le compte de la maison Aubertin). Bien entendu, de nombreuses membranes durent être remplacées. Les devis (des maisons Aubertin et Guerrier) confirment qu'il n'y a jamais eu de changement de composition. Les deux jeux de pédale ont été sorti du buffet, et déplacés juste de l'autre côté de la cloison, dans la partie droite de la tribune. [YMerlin] [EglingenDevis] [ABrun] [Visite]

Le buffet

La lyre constituant le couronnement de la tourelle centrale.La lyre constituant le couronnement de la tourelle centrale.

Le buffet néo-classique est l'œuvre de Joseph Driesbach, de Munster. Ce menuisier/sculpteur avait été élève de Théophile Klem, et s'était installé à Munster après la première guerre mondiale. Driesbach a également réalisé le buffet des orgues Roethinger de Muhlbach-sur-Munster et Mittlach (1929). [Visite] [ABrun]

Trois tourelles à entablements, les extérieures étant plus hautes et très larges (ce qui est courant dans le Sundgau) encadrent deux plates-faces. L'ornementation est constituée de claires voies à motifs végétaux, de jouées, et d'une frise de ceinture du buffet. Le couronnement de la tourelle centrale figure une lyre.

Un grand nombre de tuyaux de façade parlent (seulement 22 sont muets) :

a h O dis O A H cis f g O___OOOO cis’ dis’ f’ g’ a’ h’ dis’’ ___OOOOOOOOO___e’’ d’’ c’’ ais’ gis’ fis’ e’ d’ OOOO___c’ O e d Ais Gis c O fis gis ais

Caractéristiques instrumentales

Composition, 2018
Grand-orgue, 56 n. (C-g''')
C-f bois ; dessus à cheminées
C-G sur vent en zinc, Gis-e’’ en façade (33 tuyaux), f’’-g’’’ sur vent en étain
C-f en bois
C-f zinc
C-G en zinc
I/I
Réelles : récit à 68 notes
Récit expressif, 56 n. (C-g'''')
C-H bois ; gis'''-g'''' ouverts et coniques
Freins Gavioli
(c-g'''')
Freins Gavioli
C-f en zinc ; fis-g''' harmoniques, gis'''-g'''' non harmoniques (et bouche en ogive)
Etoffe
Spotted ; c-g'''' harmoniques
Etoffe
C-f en zinc, puis Spotted ; fis''-g''' harmoniques, gis'''-g'''' bouche ; spotted
Pédale, 30 n. (C-f')
I/P
Console:
La console indépendante.La console indépendante.

Console indépendante face à la nef, fermée par un rideau coulissant. Tirants de jeux à porcelaines, placés en ligne au-dessus du second clavier. De gauche à droite : les 2 tirants de la pédale (porcelaine à fond marron-rouge), les 5 du grand-orgue (fond blanc), et les 8 du récit (fond rose). Il y a deux trous bouchés de chaque côté (soit 4), prévus pour des tirants supplémentaires. (Mais on voit fort mal comment on pourrait rajouter ne serait-ce qu'un jeu à cet orgue, vu la place disponible.)

Claviers blancs. Commande des tirasses et accouplements par pédales-cuillers à accrocher. De gauche à droite : "II aigu-I" (II/I 4'), "II grave-I" (II/I 16'), "II-P", "I-P", "II-I", "G.O." (I/I). Vient ensuite la pédale basculante de l'expression du récit (au-dessus du "gis" du pédalier, "Expression"), puis la pédale-cuiller à accrocher du trémolo ("Tremolo" ; porcelaine à fond blanc).

Commande des combinaisons fixes par pistons blancs, placés au centre sous le premier clavier, et repérés par de petites porcelaines blanches placées sur la table horizontale, sous chaque piston : "P.", "F.", "T." et "O." (annulateur et retour à la registration manuelle). Plaque d'adresse incrustée dans le bois à gauche des claviers, dans la partie inclinée, en laiton, avec cadre arrondi, et disant :

JOSEPH RINCKENBACH
Manufacture de Grandes Orgues
Opus 188
La plaque Rinckenbach à Eglingen.
Comme à , le mot "Ammerschwihr" ne figure plus.
Rinckenbach ne peut plus l'utiliser, car Lapresté en a racheté les droits.La plaque Rinckenbach à Eglingen.
Comme à Schweighouse-près-Thann, le mot "Ammerschwihr" ne figure plus.
Rinckenbach ne peut plus l'utiliser, car Lapresté en a racheté les droits.
Transmission:

Pneumatique tubulaire (notes et jeux).

Sommiers:

Les sommiers sont à membranes. Le grand-orgue est diatonique, en "M" (basses aux extrémités), placé en avant comme d'habitude, mais plutôt bas (pratiquement dans le soubassement) pour laisser passer le récit au-dessus des aigus. (Par manque de place en profondeur, il n'a pas pu être reculé, et par manque de place en hauteur, il n'a pas pu être sur-élevé.) Entre les deux sommiers du grand-orgue ont été placés deux anti-secousses (le réservoir principal est dans le clocher, à l'arrière de l'orgue). Les deux jeux de pédale étaient probablement logés dans le buffet, à droite, orthogonalement à la façade, aigus en avant. Ils devaient être complètement inaccessibles, c'est pourquoi Michel Gaillard les a déplacés à droite de l'orgue, en dehors du buffet.

Soufflerie:

Joseph Rinckenbach avait rencontré des problèmes avec la soufflerie : dans un premier temps, il a peut-être cherché à l'installer dans le buffet (à l'endroit des anti-secousses actuels), mais vu le peu de place disponible, le résultat n'était pas satisfaisant. Le réservoir principal et son ventilateur sont dans le clocher, dans une pièce située derrière l'orgue et un peu en hauteur. (C'était peut-être l'objet des travaux effectués entre les deux réceptions.) [Visite]

Tuyauterie:

La tuyauterie est plutôt à l'étroit dans son buffet : faire rentrer 15 jeux sur cette tribune constituait un véritable défi. Le déplacement de la pédale (en 1987) a ménagé un peu d'espace libre au fond à droite.

Une vue sur la tuyauterie du grand-orgue.
C'est la partie gauche ; le mur du fond est à gauche, la façade à droite.
Comme on le voit, les aigus passent sous le récit.
A gauche, un réservoir anti-secousses. De gauche (accès) à droite (façade) :
le Prestant, le Bourdon 8', le Salicional, la Montre 8'
et le Bourdon 16' (ce dernier ayant des dessus à cheminées).
Une vue sur la tuyauterie du grand-orgue.
C'est la partie gauche ; le mur du fond est à gauche, la façade à droite.
Comme on le voit, les aigus passent sous le récit.
A gauche, un réservoir anti-secousses. De gauche (accès) à droite (façade) :
le Prestant, le Bourdon 8', le Salicional, la Montre 8'
et le Bourdon 16' (ce dernier ayant des dessus à cheminées).
Une vue sur la tuyauterie du récit.
De gauche (gauche de la boîte, flanc) à droite (passerelle centrale entre les deux sommiers) :
la Gambe, la Voix céleste, le Cor de nuit, la Flûte harmonique 4',
le Nasard, l'Octavin, la Tierce et la Trompette.
les aigus sont contre le mur du fond, les basses contre les jalousies.
Par manque de place en profondeur, les moteurs du tirage des jeux du récit
ont été sortis et placés en hauteur au-dessus des aigus
(ce que l'on voit en haut à droite de la photo).Une vue sur la tuyauterie du récit.
De gauche (gauche de la boîte, flanc) à droite (passerelle centrale entre les deux sommiers) :
la Gambe, la Voix céleste, le Cor de nuit, la Flûte harmonique 4',
le Nasard, l'Octavin, la Tierce et la Trompette.
les aigus sont contre le mur du fond, les basses contre les jalousies.
Par manque de place en profondeur, les moteurs du tirage des jeux du récit
ont été sortis et placés en hauteur au-dessus des aigus
(ce que l'on voit en haut à droite de la photo).

Comme pour beaucoup de ses derniers instruments, Joseph Rinckenbach semble avoir donné à ses clients plus que ce son entreprise était capable d'offrir. Face aux difficultés (financières, et son absence de successeur), Joseph Rinckenbach savait la fin de l'aventure proche, mais chercha absolument à construire encore quelques instruments très complets, avec Flûtes harmoniques et Trompette. Il apporta aussi à l'harmonisation un soin sans concession, et, à l'écoute, il est une fois de plus évident que le zinc et le spotted, entre les mains d'un harmoniste de talent, donnent d'aussi bons résultats que l'étain ou les alliages "chers".

Références Sources et bibliographie :

Carte Localisation :

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Immatriculation de l'orgue actuel : F680077001P03
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