L'orgue Bois de Walbach, dans son buffet de 1771, le 01/09/2012.Il n'y a pas d'orgue "Silbermann" à Walbach.
Même le buffet (tout ce qui reste de 1771) n'a pas été construit par les ateliers Silbermann : leurs buffets étaient sous-traités. A priori, celui-ci a été réalisé par Ketterer, mais ce n'est pas sûr. (Voir l'attribution des buffets des orgues Silbermann.)
Par contre, il y a eu entre 1900 et 1989 un orgue d'exception à Walbach.
Celui-ci n'existe malheureusement plus, car il a été victime de l'épouvantable vague "néo-baroque" qui a sévi à la fin du 20ème siècle, non seulement en Alsace mais partout en Europe. Elle a consisté à standardiser et à formater tous les orgues "façon 18ème". En Alsace, les cibles privilégiées furent les instruments construits entre 1870 et 1918, issus de la "période allemande". Puis on s'attacha à détruire ceux des années 1920-1939. En de nombreux endroits, comme ici à Walbach, ce fut une tragédie patrimoniale. L'orgue Martin et Joseph Rinckenbach, l'opus 66 de la prestigieuse maison d'Ammerschwihr, a été complètement éliminé ! Les propos qui vont suivre peuvent paraître sévères quand on n'a pas pris la mesure du désastre culturel qui a été commis. Ils ne visent en aucun cas Walbach, qui a simplement "suivi le mouvement", comme des dizaines d'autres localités. Comme par exemple les malheureux orgues de Folgensbourg, Lautenbach-Zell ou d'Ungersheim.
Rappelons une fois de plus que ce ne sont pas les facteurs qui sont à blâmer : entre 1960 et 2010, qu'auraient-ils pu faire d'autre à part changer de métier ? Le monde de l'orgue était complètement sclérosé, régi par un petit nombre de caciques qui imposaient leurs vues comme "universelles". Et, malheureusement, l'argent coulait à flots.
Ce ne sont pas non plus les commanditaires locaux (maîtres d'ouvrages, paroisses, communes) qu'il faut blâmer : au contraire, il s'agit des principales victimes. Que voulez-vous faire quand les "experts" détenant l'autorité sont "unanimes", et que leurs réseaux s'étendent à la presse et au milieu musical, qui vont défendre la Pensée unique, un peu par paresse, beaucoup par fayotage ? Le phénomène avait clairement pour objectif de remplacer les plus beaux orgues romantiques, symphoniques et post-symphoniques alsaciens par des "simili-silbermanns", "classiques-parisiens" ou, pire, les fameux "orgues nordiques du 17ème-18ème". Avec toutes les marottes en vigueur : sommiers à gravures obligés, consoles "en fenêtre", cortège de Cymbales, Larigots ou Sesquialteras. Mais surtout des compositions complètement déséquilibrées vers le sur-aigu. Ledit phénomène, d'ailleurs, mériterait d'être étudié pour lui-même, en tant que chef-d'œuvre de manipulation de l'opinion : l'une des "opérations de com." les plus durables, fécondes en usinage de clichés, et "efficaces" en terme de réalisation de ses objectifs et donc des ravages infligés à l' "ennemi".
C'est important d'en prendre conscience, car encore aujourd'hui, on trouve des gens pour répéter les fadaises qu'on leur a dit de seriner pour justifier ces remplacements : "Le pneumatique ne vaut rien", "Avec une transmission pneumatique, vous ne serez jamais tranquilles", "Le zinc ne vaut rien", "Les orgues du début du 20ème siècle sont de mauvaise qualité", "Seules les compositions classiques-françaises respectent la 'structure saine de l'orgue'", "Il faut mettre une console en fenêtre : c'est mieux", etc... Il faut se souvenir que de nombreux orgues de valeur ont encore été démolis ces dernières années, quand ce n'est pas remplacés par des instruments d'occasion venus de pays où on ferme les églises par dizaines chaque année, et qui cherchent à se débarrasser des instruments néo-baroques dont plus personne ne veut. En 1900, en matière d'orgue, l'Alsace était le phare de l'Europe. Aujourd'hui, c'en est la déchetterie.
Alors qu'il soit permis, devant l'ampleur de ce désastre patrimonial, et en particulier au sujet Walbach - qui perdit quand même en 1989 un des plus beaux orgues d'Alsace, toutes époques confondues - de parler franchement et sans détour. Car à l'époque (1990-2010), même si beaucoup commençaient à prendre conscience de la tragédie, personne n'osait élever sa voix pour dire qu'on allait trop loin, ou même pour avancer avec sagesse que c'est rarement une bonne idée de détruire ce qu'on ne sait pas reconstruire. Au contraire, tout le monde était obligé de faire semblant d'adhérer à la Pensée unique, laissant ses convictions de côté pour flatter les Caciques du milieu. En termes clairs, toute résistance était impossible ; il fallait mentir. Et il faut que ça cesse. Aujourd'hui, résister est possible, même si c'est au prix d'être définitivement ostracisé et mis au ban de la "communauté organistique" alsacienne. (Chose que finalement, on regrette beaucoup moins que sa liberté.)
Car construire un "néo-baroque", surtout de qualité (comme ici) là où il n'y avait pas d'orgue, pourquoi pas ? (Le seul problème, c'est que fin 20ème, il y en avait déjà des centaines, c'est-à-dire beaucoup trop !) Mais le faire en éliminant un orgue exceptionnel, d'une immense valeur historique et musicale, authentiquement alsacien, après l'avoir injustement dénigré... est juste calamiteux. Surtout en ayant l'audace de prétendre qu'un soit-disant "Silbermann" a "retrouvé sa place" ! Ça, c'est mentir au public et à la société dans son ensemble. Et vouloir réduire la facture d'orgues alsacienne à "Silbermann" a été aussi absurde et délétère que de vouloir réduire sa gastronomie à la seule choucroute.
Historique
En 1793, Joachim Henry amena à Walbach l'orgue Jean-André Silbermann, 1771, de Guebwiller, Dominicaines (Engelpforten). [IHOA] [HOIE] [PMSAEAHENRY]
Joachim Henry (1737-1804) et son fils Joseph (1763-1841) ont fait quelques travaux, surtout à la fin du 18ème, parfois pudiquement qualifiés de "déménagements". En fait, il semble qu'ils aient surtout tenté de profiter du juteux recèle d'orgues issus des spoliations dont ont été victimes les congrégations religieuses. L'orgue des Dominicaines de Guebwiller avait été volé puis mis en vente par la Révolution, comme beaucoup d'autres biens des abbayes et couvents spoliés. [PMSAEAHENRY]
L'instrument était fort réduit, et n'avait pas de pédale indépendante : les trois jeux jouables au pédalier (de toutes façons limité à 13 notes, donc inutilisable en pratique) étaient empruntés au Manuel :
En 1840, Valentin Rinkenbach installa l'instrument dans la nouvelle église de Walbach, conçue par le cabinet d'architecture A. Sassary de Colmar. (La précédente, de 1713, était située près du cimetière.) [IHOA] [HOIE]
En 1869, il y eut un projet de rénovation de l'orgue, projet qui reçut même un budget. Une année avant le conflit, on n'est pas surpris qu'il ne vint pas à exécution. [PMSAEAHENRY]
Pourquoi ce projet ? Il faut être lucide : ce petit orgue de 1771, conçu pour un couvent, très typé "parisien", sans 16' de pédale, extrêmement limité par ses caractéristiques techniques et inadapté à un usage paroissial, eh bien... plus personne n'en voulait ! Notons que 1869, c'est avant 1870, et que ce rejet ne date donc pas du tout de la "période allemande". Les "experts allemands" fantasmés par la fin du 20ème siècle, soit-disant responsables de la transformation des Silbermanns sont une pure désinformation. C'est le public qui voulait ça. En Alsace, la plupart des orgues du 18ème, surtout ceux qui ont été déménagés ont été modifiés au cours des deux premiers tiers du 19ème siècle. Et ça, c'est factuel : tout le monde peut le vérifier avec un simple tableur et les listes de travaux facilement disponibles. Le petit instrument a certes été finalement remplacé en 1900, mais la décision avait été prise 31 ans plus tôt.
Historique
C'est en 1900 que Martin et Joseph Rinckenbach posèrent à Walbach un des merveilleux orgues post-symphoniques dont ils avaient le secret. [IHOA]
L'opus 66 de la maison d'Ammerschwihr a été reçu en août par Henri Wiltberger (Colmar, école normale). [PMSAEAHENRY]
La Belle Epoque
Comment sait-on qu'il s'agissait d'un instrument exceptionnel, vu qu'il a été détruit ? Par connaissance de ses contemporains que nous avons eu la chance de conserver : les merveilles de Mitzach (1901) ou de Dessenheim. Ou Romanswiller (1902).
Et il était presque contemporain d'une des 7 Merveilles du monde de l'orgue alsacien : Strasbourg, St-Jean (1902 ; l' "Hortus deliciarum de l'orgue", voulu par et conçu pour Marie-Joseph Erb, détruit sous les bombes en 1944. Il avait certainement connu les ateliers d'Ammerschihr en même temps que celui de Walbach.)
Un style post-romantique alsacien
Comme ses contemporains, l'orgue de Walbach a participé à la définition d'un style post-romantique alsacien, que Joseph Rinckenbach continua à développer jusqu'en 1930, et que Georges Schwenkedel ou Edmond-Alexandre Roethinger - soumis dès leur formation à d'autres influences - ont fait évoluer encore différemment jusqu'à la seconde guerre mondiale. S'il avait été conservé, cet instrument constituerait aujourd'hui un vrai trésor de la facture d'orgues. Ce serait aussi un fabuleux instrument de musique, qui donnerait accès à un répertoire très large.
Cette magnifique poignée, ici de la console de Mitzach,Depuis 1897 (à Bréchaumont), Joseph Rinckenbach, le fils de Martin, co-signait les œuvres de la maison d'Ammerschwihr sur les plaques d'adresses des consoles. Cela souligne l'importance qu'avait prise la nouvelle génération de facteurs, rêvant d'un style que l'on appellera plus tard "post-romantique". La composition de 17 jeux est caractéristique de son époque :
- le grand-orgue est constitué du "carré d'or" de jeux romantiques (un Principal, une Flûte ouverte, un Bourdon, une Gambe), adossé dans les graves par un Bourdon 16' et dans les aigus par un Principal 4'. Le tout est couronné par une Trompette puis une Mixture (plutôt grave : 2'2/3). Ici, la Flûte harmonique 4' est au grand-orgue, ce qui est plutôt spécifique.
- Le récit porte 3 fonds de 8', dont une Gambe obligée (ici le Salicional) destiné à jouer avec la Voix céleste. Le plan sonore est donc expressif, puisqu'il abrite ce jeu. Le seul 4' est une Flûte (et pas un Gemshorn comme à Mitzach. Ceci est probablement conséquence du choix de mettre la Flûte harmonique 4' au grand-orgue). L'orgue de Walbach avait une personnalité propre. Il n'y a pas de Hautbois : cela aurait été pour le "modèle au-dessus". La Trompette du grand-orgue est donc le seul jeu à anches de l'instrument.
- A la pédale, il n'y a que 3 jeux, et ce sont les "incontournables" : une Soubasse pour fonder l'instrument, une Flûte 8', et une Gambe : le Violoncelle 8', emblématique de l'orgue alsacien !
Un autre petit bijou issu des ateliers Rinckenbach peut servir à imaginer ce qu'était l'orgue de Walbach. Pas vraiment un contemporain, mais plutôt un voisin : celui de Zimmerbach. On peut bien sûr y apprécier la qualité de fabrication et de l'harmonisation, qui sont un démenti cinglant aux allégations du baratin oragnistique de la fin du 20ème siècle. Mais ce qui est encore plus intéressant, c'est qu'il présente des différences significatives : il est plus "romantique français", avec sa Trompette et sa Flûte octaviante au récit. Il rappelle que chaque Rinckenbach est absolument unique. Zimmerbach, c'est "Rinckenbach côté Vosges", et Walbach c'était "côté Forêt-Noire" : ils allaient vraiment bien ensemble.
La console était à coup sûr du même modèle que celle de Mitzach. Elle présentait le grand avantage d'être indépendante. (Par rapport à une console "en fenêtre" : snobisme mis à part, quel organiste a *vraiment* envie de jouer avec la tête dans une armoire ?)
Il faut savoir que les archives de la maison Rinckenbach ont été perdues. Toute la précieuse information se trouve dans les archives des clients ou dans les instruments eux-mêmes. Les détruire revient à brûler une bibliothèque.
Ces instruments, certes influencés par le romantisme allemand et français, n'en sont pas une "synthèse" : ils ont défini un style propre, spécifiquement alsacien. On trouvera plus de détails sur cette esthétique dans la page consacrée aux compositions des orgues Martin et Joseph Rinckenbach de 1899 à 1917.
70 ans de bons et loyaux services malgré un contexte difficile
Les tuyaux de façade ont été réquisitionnés par les autorités le 03/04/1917. [HOIE]
Ce qui n'était pas très grave, car c'est probablement Joseph Rinckenbach qui les remplaça en 1927. Comme elle a été réalisée (et harmonisée) par le créateur de l'orgue, on pouvait considérer cette façade comme authentique. [HOIE]
Ensuite, l'orgue Rinckenbach fut très bien entretenu : il y eut une réparation en 1933 par Alfred Berger (et pas Antoine). [IHOA] [HOIE]
Il a passé les deux guerres sans encombre, alors que plusieurs de ses contemporains n'ont pas eu cette chance : celui de l'abbaye de l'Oelenberg (1904) en 1915, Friesen (1902) en 1944, comme celui de Strasbourg, St-Jean.
En 1953, il fut relevé (et malheureusement aussi légèrement transformé) par Curt Schwenkedel. [IHOA] [HOIE]
Dans les "Descriptions d'orgues" de Curt Schwenkedel, on trouve la composition de l'instrument (qui est à coup sûr celle d'origine). Sa transformation "néo-classique" a été vraiment été timide (ce qui témoigne d'un grand sens des responsabilité des décideurs à Walbach à l'époque). Ce fut tout de même incongru : pour disposer d'une Quinte indépendante au grand-orgue, Curt Schwenkedel sortit le rang de 2'2/3 de la Mixture à 3 rangs (!) (laissant celle-ci à 2 rangs), plaça cette "Quinte" sur la chape de la Gambe, et envoya la Gambe au récit, où elle prit la place de la Voix céleste. Il remplaça aussi le Violoncelle 8' de pédale par un inutile 4' (probablement en découpant les tuyaux, mais ce n'est pas établi). C'est pour ça que l'inventaire technique des orgues d'Alsace, en 1986, trouva la composition suivante : [SchwenkedelDO]
Le bilan n'était pas très reluisant, vu que la "Quinte" sonnait déjà auparavant dans la Mixture. Par contre, le grand-orgue était à présent dépourvu de Gambe, le récit de Voix céleste, et la pédale de Violoncelle 8'... Mais ces bricolages étaient tout à faits réversibles : on connaît les tailles des Voix célestes de Martin et Joseph Rinckenbach. L'instrument était parfaitement restaurable sans coût important : en d'autres endroits, on avait vu bien pire.
Il y avait donc encore 15 jeux Rinckenbach authentiques (puisque la Mixture pouvait être à nouveau assemblée).
L'arrivée des années noires
Mais après 1953, pendant plus de 30 ans, l'orgue fut privé d'entretien. Pourquoi ? Dans l'inventaire historique des orgues d'Alsace, paru en 1986, figure la composition en 1983, assortie d'une note : "Situation en 1983 : pneumatique bien fatiguée." [IHOA]
Si elle était seulement "fatiguée", c'est qu'elle était d'une grande qualité ! Imagine-t-on l'état d'une mécanique après 30 ans sans entretien ? Dit-on d'une voiture qui n'a pas bénéficié d'entretien pendant 30 ans qu'elle est "fatiguée" ? Et que signifie "fatigué" au juste ? Le mot est péjoratif. Avait-elle besoin d'un réglage ? Certes. Mais il faut se souvenir qu'en 1983, en gros un seul facteur d'orgues en Alsace savait régler une pneumatique correctement. Car c'était là le seul problème de cette superbe transmission : la perte de compétence des facteurs. Mais plutôt que de reconnaître leur incompétence (ou leur démission face à la nécessité d'acquérir des compétences qu'ils n'avaient plus), les facteurs et leurs experts-VRP préféraient affirmer que "le pneumatique ne vaut rien", que "ce n'est pas fiable"... même, comme ici, devant la preuve flagrante que c'est faux : elle avait duré sans encombre 83 ans... et tout ce qui était nécessaire, c'était de remplacer les membranes, qui sont des pièces d'usure !
Dans une publication parue en 1981, Pie Meyer-Siat (que l'on sait abhorrer les orgues issus de la "période allemande", qu'il voudrait tous voir envoyés à la chaudière) n'y va pas par quatre chemins : "En 1954, l'orgue fut restauré par Schwenkedel. Sauf le buffet, il ne présente plus d'intérêt." Dans l'inventaire historique, l'orgue de 1900 est "présenté" comme une "pneumatisation". [PMSAEAHENRY] [ITOA]
Ces remarques sont tout à fait en ligne avec l' "agenda de com." néo-baroque de l'époque. Le vocabulaire (péjoratif, et souvent ironique) utilisé par cette propagande est significatif, et il faut apprendre à la reconnaître : ici, "fatiguée". Ailleurs, c'est "à bout", ou "bien sûr à bout" (insinuant que c'est une évidence pour toute personne censée). Mais le plus significatif est l'usage du mot "pneumatisation" pour désigner la construction d'instruments neufs, en leur refusant par là l'essence même de l'acte créatif. Car cette obsession pour le mode de transmission est un fait central de la promotion du "néo-baroque", et repose sur une totale désinformation, dont l'origine se trouve dans le caractère "germanique" de la transmission pneumatique. Elle a été très peu pratiquée en France, mais utilisée avec un éclatant succès - surtout alliée avec d'excellents sommiers à cônes - en Allemagne après 1895 environ. Donc en Alsace jusqu'en 1918, mais aussi après, évidemment, jusqu'à ce qu'elle ait été diabolisée, un peu par pure xénophobie, et surtout par cupidité : remplacer ces transmissions pneumatiques par des mécaniques (en remplaçant les coûteux sommiers) était un immense marché, beaucoup trop juteux pour être négligé, même face à des considérations éthiques !
Enfin, l'affirmation "il ne présente plus d'intérêt" pose de vraies questions : que faisaient les relecteurs de ces publications de "Sociétés Savantes" (comme on disait) se voulant rigoureuses et "scientifiques" ? On a là une pure affirmation subjective, produit d'un (dé)goût personnel. Et une évidente tentative de manipulation, d'orientation de l'évaluation de l'orgue, perpétrée par quelqu'un qui s'octroie l'autorité. Car autant on peut dire "Je trouve l'orgue génial" (ça ne fait pas de mal), autant il est plus délicat d'avancer qu'on le trouve mauvais. Mais "sans intérêt", assorti d'un sous-entendu "c'est moi qui vous le dit, et moi je m'y connais, vous êtes donc obligés d'être de mon avis", c'est vraiment scandaleux. L'épisode illustre, une fois de plus, dans quel état était déjà le monde de l'orgue en 1981, avec un petit aréopage d'experts auto-proclamés qui avaient confisqué l'autorité sur le sujet à tous les autres, et surtout au bon sens.
Non, l'orgue de 1905 n'était pas la "pneumatisation" d'un instrument du 18ème : il suffit de comparer les compositions ! C'était un orgue neuf... malheureusement placé dans un buffet ayant contenu un orgue du 18ème.
Comment peut-on s'étonner, dès lors, que les plus influençables des propriétaires d'instruments hésitaient à réparer leur orgue, à l'entretenir, le protéger. "Notre orgue ne vaut rien", a-t-on cru. On a cru aux mensonges.
Historique
Entre 1989 et 1991, Antoine Bois construisit un instrument neuf, placé dans le buffet de 1771. Et l'orgue Rinckenbach a été perdu. 15 jeux Rinckenbach authentiques (ainsi que la magnifique console) ont été perdus. [IHOA]
...sous les applaudissements. Certains articles de presse, quand ils ne datent pas le petit Silbermann des Dominicaines d'Engelpforten de 1711, relayent des "[l'orgue précédent était dans un] état lamentable" pour "justifier" sa destruction. S'il était dans un état lamentable, c'est par manque d'entretien.
En 2002, 4 jeux ont été ajoutés par Antoine Bois. [IHOA]
Heureusement : vu ce que cet instrument a coûté à notre patrimoine, cela aurait été encore plus absurde de le laisser incomplet...
Il faut être clair : l'instrument actuel est loin d'être mauvais. Certains aiment beaucoup ce style, qui était très à la mode dans les années 60-70. S'agissant d'un orgue neuf, c'est un projet très réussi. Le problème, c'est qu'il y en a aujourd'hui de partout, souvent soit-disant construits "dans l'esprit Silbermann". Faire passer cet orgue pour un "Silbermann" est aussi démagogue qu'absurde.
Quel avenir, aujourd'hui ? Il en va ici de même qu'en tous les endroits qui ont radicalement cédé à la vague "néo-baroque". Dans 10-15 ans, soit plus personne ne s'intéressera aux orgues (qui seront donc à 95% à l'abandon, et le problème sera réglé), soit il y aura un regain d'intérêt, ce que l'on souhaite. On va alors re-découvrir tout ce que l'Alsace, entre 1870 et 1939, a fait pour l'orgue. Une première étape, incontournable, est donc d'assumer, et de réaliser l'ampleur de ce qui a été perdu en 1989 lors de la destruction de l'orgue Rinckenbach. Continuer à le dénigrer pour justifier son remplacement par un instrument à la mode de l'époque, en disant "Oh, de toutes façons, il était en mauvais état" est devenu injustifiable.
Caractéristiques instrumentales
Console en fenêtre frontale. Tirants de jeux de section carrée à pommeaux tournés repérés par des étiquettes en papier, disposés en colonne de part et d'autre des claviers. (Il y en a deux à droite, la colonne intérieure sortant non pas du montant, mais de la cloison arrière de la console.) Claviers noirs.
Sources et bibliographie :
Données sur l'orgue de 1991 / 2002.
Composition de la Fourniture et photos du 09/07/2004
Photo du buffet.
371. Walbach J. Lévy, Revue cath. d'Alsace 1929, Orgue J. A. Silbermann des Dominicaines de Guebwiller 1745, achetées le 18. 10. 1792; Rinckenbach, 1900; 19 Jeux, 2 Clav., Péd., sommier pneu., traction tub., soufflerie électr.
WALBACH, Kt. Wintzenheim. - 1792 : Die O. des Frauenklosters Engelporten in Gebweiler O. Praed., von Silbermann 1745, kam 1792 für 2.425 livr. nach Walbach. Diese O. hätte im Herbst 1791 der Kirche in Wasselonne zufallen sollen, doch gewisser Umstände wegen, Annullierung des Kaufvertrages.LEVY, in: RCA 1929, 271. Siehe auch MATHIAS 72. - Rinckenbach, 1900, 19 Reg., 2 Clav., Ped. Ebenda u. Liste Rinckenbach. - Abnahme der O. im Aug. 1900. Experte: Wiltberger, Musikdirektor in Colmar. Vfr. 43 (1900) 278 (Nr. 2. IX. 1900). - Siehe auch Liste WILTBERGER, Nr. 66, O. mit 19 Reg.
im68005718
Enfin, ce n'est PAS une source, puisque la plaquette de l'inauguration d'octobre 2002 a repris des paragraphes entiers d'une version précédente de cette page internet ('A la Découverte de l'Orgue') ...sans la citer ni la créditer.
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