L'église luthérienne de Waldersbach, bien que pour partie plus ancienne, date de 1751, comme en atteste le chronogramme gravé sur le linteau "MoDesta eCCLesIa", qui associe une touchante expression d'humilité et la date d'achèvement de l'édifice (1000+500+100+100+50+1). Elle a été voulue par (Jean) Georges Stuber, qui resta à Waldersbach pendant 14 ans, avant de devenir pasteur à Strasbourg St-Thomas. Mais ce sanctuaire entouré de montagnes est surtout connu pour être l'"église-mère" de la paroisse de Jean Frédéric Oberlin, qui fut pasteur à Waldersbach et villages alentours pendant 59 ans (de 1766 à sa mort, en 1826). Elle a donc participé, jour après jour, à l'immense oeuvre de réforme sociale et éducative que l'on connaît. Avec le presbytère (abritant le musée Oberlin, 40 000 visiteurs annuels), c'est aujourd'hui un des hauts lieux du protestantisme alsacien. Avant d'entrer, on peut remarquer une méridienne (côté sud, évidemment), une pierre de restauration datée de 1653, et bien sûr le fameux tilleul, qui rappelle les tilleuls de mariages qui furent plantés au cours du 19ème siècle sur la route de Solbach.
Historique
En 1960, Curt Schwenkedel entra en possession d'éléments d'un orgue venant de Schirrhein, St-Nicolas. [ITOA]
Ce n'est qu'une partie de l'orgue de Schirrhein qui fut installée à Waldersbach et intégrée à l'orgue Schwenkedel : quelques tuyaux, les sommiers, la soufflerie, et la console. Donc pas le buffet, qui avait été vendu à un particulier. On ignore qui était réellement l'auteur de cet instrument. Il avait probablement subi de graves dégâts en 1945 (quand l'église de Schirrhein fut sinistrée "à 65%"), et était doté de sommiers datant des années 1870-1900 (mécaniques de 54 notes). L'orgue venait de Bischwiller, St-Augustin et son installation à Schirrhein datait de 1876. En 1936, il avait une curieuse composition, avec un grand-orgue qui correspondrait à un instrument à un seul manuel (avec Gambe et Voix céleste), visiblement "romantisé" (Cornet et Clairon, mais pas de Trompette), et un petit récit limité à deux jeux (Bourdon 8' et Flûte 4') qui faisait un peu "pièce rapportée" : [IHOA]
Mais Bischwiller n'était pas la provenance originelle de cet instrument, puisqu'il y avait été acheté d'occasion en 1824. On ne sait cependant pas d'où il venait.
L'hypothèse la plus vraisemblable (suite au croisement des données historiques et techniques) est que Bischwiller avait acheté un orgue de Michel Stiehr en 1824 (Trimbach ?). Il fut revendu à l'occasion de l'acquisition de l'orgue Chaxel (1829), de Fréland en 1876, et probablement déménagé à Schirrhein par Martin Rinckenbach qui le dota de nouveaux sommiers, d'une Gambe et d'une Voix céleste à la place de la Doublette et la Trompette. Abîmé en 1945, il fut vendu en pièces en 1958, et Schwenkedel en récupéra la console, les sommiers et la soufflerie.
En 1960, Curt Schwenkedel, sur la base des éléments récupérés, reconstruisit un instrument dans l'esthétique des années 1960 naissantes. [IHOA]
C'était une des premières tentatives pour harmoniser un orgue "à Plein vent" (c'est-à-dire sans limiter le flux d'air par le pied du tuyau). La pression est basse dans ce type d'harmonisation : ici 45 mm de colonne d'eau. [IHOA] [ITOA] [Marienthal1962]
Voici la composition trouvée par l'Inventaire de 1986 :
Comme on le voit, les jeux romantiques ont été éliminés : dans les années 1960, on préférait laisser les chapes vides plutôt que de porter atteinte à la "pureté" classique... Les jeux du grand-orgue étaient constitués en grande partie de tuyaux Stiehr (complètement réharmonisés). Les bouches des tuyaux ont été abaissées.
En 2011, l'orgue a été relevé et légèrement transformé par Gaston Kern. [JDTouchais]
L'instrument a été muni de deux panneaux latéraux et d'une petite clôture arrière placée sur le sommier du grand-orgue. Une Flûte à cheminée 4' a été posée à la place de la Doublette, restaurant ainsi la composition du second clavier en l'état de 1936. Il n'a malheureusement pas été possible de conserver les deux jeux, car les postages en Vestaflex des basses encombrent les chapes vides.
L'orgue a été inauguré le 23 décembre 2011 lors du concert de clôture des "Noëlies" avec Salomé Haller (chant), Elisabeth Geiger (orgue), Elodie Peudepièce-Widmer (violone) et Bruno Helstroffer (théorbe). Oeuvres de Praetorius, Schein, Lübeck, M.A. Charpentier, Clérambault.
Caractéristiques instrumentales
Harmonisée à Plein vent (sauf le Bourdon du positif qui présente des dispositifs de contrôle d'air au pied).
L'harmonisation à Plein vent
C'est une façon d'harmoniser les orgues (donc de donner une "couleur" et une intensité données à chaque tuyau) un peu particulière, qui connut son heure de gloire dans les années 1960. Après quelques tâtonnements (tuyaux qui "crachotaient", selon l'expression consacrée, surtout qu'on ne voulait plus faire de dents aux biseaux...) cette méthode d'harmonisation s'imposa tout particulièrement chez Schwenkedel. Les pressions sont basses (30 à 65 mm), et les pieds des tuyaux sont entièrement ouverts (on ne règle pas le débit d'air entrant dans le tuyaux par le pied). Les bouches sont très basses. L'intérêt est d'obtenir une attaque très nette, franche et aigüe, à laquelle les dimensions de la gravure participent grandement. En fait, on cherche bien à avoir des conditions de pression, juste sous le biseau, équivalents à ce qui se trouve dans la gravure. L'harmonisation à Plein vent est donc quelque part l'usage du sommier à gravures poussé au maximum. La chose est compliquée, car - outre le fait qu'on ne peut pas régler l'intensité par l'air admis dans le pied du tuyaux - l'interaction entre les jeux placés sur une même gravure est forte. Les jeux "gourmands" en vent le volent encore plus facilement aux autres, ce qui fait que la méthode est limitée aux compositions "classiques". Enfin, les inévitables turbulences dans les gravures produisent parfois un effet de vibrato en fréquence.
Voici une liste (non exhaustive) d'orgues harmonisés selon cette méthode par la maison Schwenkedel :
D'autres, facteurs, évidemment, utilisèrent cette méthode, comme Max Roethinger à Schiltigheim, Notre-Dame (1960) ou à Bourgheim (1963), mais aussi Georges Walther pour la maison Muhleisen, dès 1960, à Heiligenstein.
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Activités culturelles :
Sources et bibliographie :
Avec les photos de cette page et les informations historiques, et techniques sur les travaux de 2011.
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